Feu vert de Strasbourg à la protection des lanceurs d'alerte

Le Parlement européen a définitivement adopté mardi un projet de directive sur la protection des lanceurs d’alerte qui ne pourront être condamnés ou sanctionnés lorsqu’ils dénoncent les activités illégales ou dangereuses d’une entité publique ou privée. /Photo prise le 26 mars 2019/REUTERS/Vincent Kessler

STRASBOURG (Reuters) - Le Parlement européen a définitivement adopté mardi un projet de directive sur la protection des lanceurs d’alerte qui ne pourront être condamnés ou sanctionnés lorsqu’ils dénoncent les activités illégales ou dangereuses d’une entité publique ou privée.

Le texte, qui s’applique tant aux lanceurs d’alerte qu’à ceux qui les informent, a déjà fait l’objet d’un accord de principe entre le Parlement et le Conseil européen – les gouvernements - et doit encore être adopté formellement par ce dernier. Il entrera en vigueur d’ici deux ans.

"Il s’agit de reconnaître le rôle essentiel joué par les lanceurs d’alerte dans nos démocraties, de placer nos exigences de transparence et de bonne gouvernance au-dessus des pouvoirs économiques et financiers", a affirmé la rapporteuse du texte, Virginie Rozière, députée française radicale de gauche, lors du débat en plénière, lundi.

L’eurodéputée s’est également félicitée que la directive sur les lanceurs d’alerte vienne « contrebalancer » celle sur le secret des affaires, adoptée en 2016, qui protège les entreprises contre le vol ou la divulgation de leurs données lorsqu’aucun motif d’intérêt public ne le justifie.

Le Parlement a obtenu la levée d’un verrou que souhaitaient maintenir certains Etats, dont la France et l’Allemagne : les lanceurs d’alerte ne seront pas tenus de dénoncer les infractions d’abord en interne pour être autorisés à les porter sur la place publique ou devant la justice.

Toute organisation publique ou privée, à partir d’une certaine taille, sera en revanche tenue de prévoir un canal de signalement des infractions qui pourraient être commises en leur sein.

Les domaines dans lesquels cette nouvelle législation s’appliquera vont de la passation des marchés publics à la protection des consommateurs et de la vie privée, en passant par la sécurité des transports, celle des « produits », la sûreté nucléaire, les infractions financières ou la protection de l’environnement.

Les règles relatives à l’impôt sur les sociétés et aux avantages fiscaux font partie des domaines concernés mais pas les activités liées à la Défense ou à la sûreté de l’Etat.

Parmi les événements qui ont conduit le Parlement européen à demander à la Commission européenne de légiférer sur les lanceurs d’alerte figure le scandale Luxleaks, qui a révélé en 2014 les accords confidentiels conclus entre des multinationales et des Etats membres de l'UE, dont le Luxembourg, pour réduire leurs impôts.

Raphaël Halet et Antoine Deltour, deux anciens employés du cabinet d’audit PricewaterhouseCoopers qui étaient à l’origine de ces fuites dans la presse, ont été condamnés par la justice luxembourgeoise. Seul le second a vu cette condamnation annulée en cassation.

(Gilbert Reilhac, édité par Sophie Louet)