Fed et PMI ont plombé les places européennes

par Wilfrid Exbrayat

PARIS (Reuters) - Les Bourses européennes, fermées pour la plupart mercredi pour le 1er mai, ont connu un retour difficile jeudi, terminant dans le rouge sous l'effet des annonces faites la veille par la Réserve fédérale, d'indices PMI manufacturiers sans bonne surprise et de résultats d'entreprises provoquant des réactions mitigées.

À Paris, le CAC 40 a terminé en baisse de 0,85% à 5.538,86 points. Le Footsie britannique a cédé 0,46% tandis que le Dax allemand terminait quasiment inchangé, soutenu plus par de bons chiffres des ventes au détail.

L'indice EuroStoxx 50 a lâché 0,73%, le FTSEurofirst 300 0,55% et le Stoxx 600 0,58%.

En déclarant que la Réserve fédérale n'avait aucun motif sérieux de modifier sa politique monétaire pour le moment et que l'inflation fléchissait en raison de facteurs de nature ponctuelle, son président Jerome Powell a fait décrocher Wall Street mercredi et les places européennes n'avaient guère d'éléments dans ce contexte pour les orienter à la hausse.

D'autant que l'activité du secteur manufacturier s'est contractée pour le troisième mois consécutif en avril dans la zone euro, affectée par l'affaiblissement de la demande mondiale, les tensions commerciales et les inquiétudes autour du Brexit, selon les résultats définitifs des enquêtes d'IHS Markit auprès des directeurs d'achat.

"Les banquiers centraux décrivent toujours l'inflation, qu'elle monte ou qu'elle baisse, comme 'transitoire', et on ne pouvait pas raisonnablement penser que la Fed ouvrirait la porte à la possibilité d'une baisse des taux lorsque les hausses de salaires dépassent 3% et quand l'enquête ADP d'avril parue hier a révélé 275.000 emplois nouveaux", commente Michael Hewson (CMC Markets).

Le gouverneur de la Banque d'Angleterre (BoE) Mark Carney est venu enfoncer le clou en déclarant jeudi que les investisseurs sous-estimaient sa capacité à durcir les conditions monétaires en fonction de l'évolution des discussions sur le Brexit après que le comité de politique monétaire de l'institution a observé le statu quo.

VALEURS

BNP Paribas a gagné 1,16% et figure parmi les principales hausses du CAC 40 après avoir fait état de résultats supérieurs aux attentes.

A la baisse, Legrand a reculé de 5,13%, après des résultats jugés décevants par les investisseurs, en particulier au regard de ceux annoncés par ses concurrents.

Ailleurs en Europe, Bayer a pris 3,76% après la publication mardi par l'Agence américaine de protection de l'environnement (EPA) d'un communiqué affirmant que le glyphosate n'était pas cancérigène.

Zalando a perdu 3,31%. Le groupe allemand, premier site européen de prêt-à-porter en ligne, envisage de facturer des frais de livraison pour de plus petites commandes et sur un plus grand nombre de marchés afin de contrer une baisse de la taille moyenne des commandes qui pèse sur sa rentabilité.

Le fabricant de composants autrichien AMS est la plus forte hausse du Stoxx 600 avec un gain de 10,37%, bénéficiant des solides résultats d'Apple publiés mardi soir.

L'indice européen des valeurs high tech n'en a pas moins cédé 1,33%, deuxième perte sectorielle en Europe derrière l'indice des ressources de base (-1,63%), plombé par la chute des cours pétroliers.

A WALL STREET

Wall Street est en baisse affirmée au moment de la clôture des Bourses européennes, alors qu'elle était en hausse modeste en matinée sur quelques résultats de sociétés positifs.

Ces derniers ont un temps fait passer la pilule d'une Fed qui ne semble guère disposée à détendre les taux cette année mais l'effet salvateur semble s'être dissipé.

LES INDICATEURS DU JOUR

En Europe, l'activité du secteur manufacturier s'est contractée pour le troisième mois consécutif en avril dans la zone euro, affectée par l'affaiblissement de la demande mondiale, les tensions commerciales et les inquiétudes autour du Brexit, selon les résultats définitifs des enquêtes d'IHS Markit auprès des directeurs d'achat.

Les ventes au détail ont baissé en mars en Allemagne mais moins qu'attendu, montrent des données publiées jeudi par Destatis, l'office fédéral de la statistique.

Aux Etats-Unis, le nombre des inscriptions au chômage n'a pas varié la semaine dernière, sans remettre en cause le constat d'un marché du travail qui reste tendu.

La productivité a augmenté au premier trimestre à son rythme le plus soutenu depuis plus de quatre ans, exerçant une pression baissière sur les coûts du travail et plus largement sur l'inflation.

Les nouvelles commandes à l'industrie ont augmenté à leur rythme le plus soutenu en sept mois en mars grâce à la forte demande d'équipements de transport mais la hausse des stocks et un faible rebond des carnets de commandes annoncent un ralentissement de l'activité manufacturière.

CHANGES

Le dollar, en baisse durant la matinée, a repris des couleurs et progressait face à la plupart des autres grandes devises, les traders ne pariant plus autant sur une baisse des taux d'ici la fin de l'année à la suite des déclarations du président de la Fed Jerome Powell mercredi.

Powell a certes déclaré que si l'inflation persistait à rester en deçà de l'objectif de 2% fixé par la Fed, celle-ci en serait préoccupée et le prendrait en compte dans la détermination de la politique monétaire.

Prié de dire si cela impliquait que la Fed réagirait en abaissant les taux, il a répondu: "Je ne peux vraiment pas être plus précis". Il a en outre estimé que la baisse actuelle de l'inflation s'expliquait sans doute par des éléments de nature "transitoire".

L'euro perd 0,13% à 1,1179 dollar.

L'indice dollar, qui mesure la valeur du billet vert face à un panier de devises de référence, remontait pareillement, de 0,14% à 97,819, renouant avec sa tendance de la veille.

Le sterling, qui avait réagi à la hausse au relèvement des prévisions de croissance annoncé par la Banque d'Angleterre (BoE), s'est retourné, cédant 0,14% à 1,3030 dollar.

TAUX

Les rendements des Treasuries sont en légère hausse, portés par les déclarations du président de la Fed sur l'inflation et la croissance.

Les traders des futures de taux évaluent dorénavant à 54% la probabilité d'une baisse des taux d'ici décembre, alors qu'elle était de 64% avant les annonces de la banque centrale, selon le baromètre FedWatch de CME Group.

Au vu de l'accent mis sur l'inflation par la banque centrale, le prochain catalyseur du marché sera la statistique d'inflation du 10 mai.

"Soit nous confirmerons qu'il n'y a plus lieu de parier sur une baisse des taux, soit ce sera décevant et on remettra le couvert", a dit Tom Simons (Jefferies).

Le rendement du 10 ans gagne 4,5 points de base à 2,556% et celui du deux ans, le plus sensible aux événements sur les taux, 3,9 points de base à 2,341%.

En Europe, les rendements obligataires européens ont également terminé en hausse, celui du Bund finissant en hausse de 1,9 point de base à 0,031%.

Il en est de même pour l'OAT équivalente, dont le rendement ressort à 0,376% (+0,7 pdb).

PÉTROLE

Les cours aggravent nettement leurs pertes, réagissant encore à une hausse plus forte que prévu des stocks de brut américains annoncée la veille, avec de surcroit une production locale qui a atteint un nouveau record de 12,3 millions de barils par jour (bpj).

Le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) perd autour de 4% et est retombé autour de 61 dollars le baril, tandis que le Brent se retrouve au niveau des 70 dollars le baril, avec un recul de l'ordre de 3%.

(Édité par Patrick Vignal)