Fake news, écoles brûlées... Evras, le programme scolaire au coeur d'une polémique en Belgique

"Ne touchez pas à nos enfants", "Pédophilie déguisée"... Selon les chiffres de la police locale, 1500 personnes se sont réunies dimanche au Mont des Arts de Bruxelles pour protester. Leur cible ? Le décret Evras, pour "éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle", voté au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles le 7 septembre dernier.

Depuis quelques jours, ce cours de deux fois deux heures par an destiné à répondre aux questions des élèves de primaire et du secondaire sur ces sujets sensibles suscite une vive polémique en Belgique francophone.

En ligne, de nombreuses fake news circulent à son sujet. Ces dernières décrivent l'Evras comme un programme permettant "la pédophilie organisée et banalisée", qui pervertirait les jeunes enfants.

Au point que huit écoles ont été vandalisées cette semaine à Liège et à Charleroi, où l'on a constaté des départs de feux durant la nuit. Des tags "No Evras" sur plusieurs d'entre elles ont été retrouvés et la justice belge a ouvert une enquête pour "incendies criminels".

Une animation adaptée en fonction de l'âge

Mais qu'en est-il vraiment de cette "animation"? En place depuis 2012, elle n'était jusque-là pas systématiquement assurée faute de moyens. Selon la RTBF, seulement 20% des écoles organisaient ces formations.

"Le plus souvent, les sujets abordés sont choisis en fonction des besoins des enfants ou adolescents: les animateurs vont partir des questions que les jeunes se posent et construire leur animation autour de ces préoccupations. Dans tous les cas, les animateurs apportent des réponses adaptées en fonction de l’âge ou du stade de maturité des jeunes rencontrés", peut-on lire sur la plateforme dédiée.

L'idée est donc de "donner aux jeunes les informations nécessaires pour devenir des adultes éclairés acteurs de leur santé", précise le site de l'Evras. Pas question donc d'enseigner ou de pratiquer le moindre acte sexuel, comme certains détracteurs du programme le dénoncent, ni même de consulter des images pornographiques.

"On ne va évidemment pas encourager une hyper-sexualisation chez les jeunes, ni susciter une orientation sexuelle ou une identité de genre. J'ai lu qu'on allait 'apprendre aux enfants à se masturber', c'est complètement inadmissible de faire peur aux parents sur ce sujet", a tranché Caroline Désir, la ministre francophone de l'Education, la semaine dernière sur la RTBF.

Un guide de plus de 300 pages, à destination des professionnels chargés d'encadrer ces ateliers, permet d'ailleurs de "baliser les interventions d’Evras réalisées auprès des enfants et des jeunes".

Une polémique qui touche aussi la France

La polémique a pour autant traversé les frontières. Le rappeur français Rohff a notamment partagé sur X la vidéo d'une femme, relatant le témoignage d'un père de famille désireux de quitter la France après que son enfant, dénudé, a été forcé à toucher le vagin d'une camarade à l'école.

Si les médias belges ont dénoncé une désinformation évidente de la part de l'artiste, d'autant plus que le programme ne concerne que la Belgique, une pétition lancée lundi dernier a néanmoins pris de l'ampleur dans l'Hexagone.

Celle-ci demande à Gabriel Attal, le ministre français de l’Éducation nationale, "la suppression de la loi Evras". Elle avait déjà été signée par plus de 15.500 personnes ce dimanche. L'Evras, qui n'est pas une loi mais qui a fait l'objet d'un décret, n'a cependant aucun lien avec la France.

Les fake news sur ce sujet ne sont d'ailleurs pas rares en France. En 2019, une rumeur circulant en ligne affirmait qu’un manuel scolaire pour les classes de CE1 et CE2 abordait les pénétrations vaginales, anales et orales, notamment avec des sextoys.

Il s’agissait en réalité d’une brochure de Santé Publique France sur la sexualité destinée à des adolescents, qui n'était pas distribuée dans les écoles primaires.

Article original publié sur BFMTV.com