Face aux agriculteurs en colère, Marc Fesneau reporte un projet de loi pour ajouter un volet sur la simplification des normes

Face à la colère montante des agriculteurs et après trois jours de blocage de l’autoroute 64 en Haute-Garonne, le ministre de l’Agriculture a annoncé ce dimanche 21 janvier le report d’un projet de loi initialement attendu mercredi 24 en Conseil des ministres.
Face à la colère montante des agriculteurs et après trois jours de blocage de l’autoroute 64 en Haute-Garonne, le ministre de l’Agriculture a annoncé ce dimanche 21 janvier le report d’un projet de loi initialement attendu mercredi 24 en Conseil des ministres.

POLITIQUE - Tentative d’apaisement en cours. Face à la colère montante des agriculteurs et après trois jours de blocage de l’autoroute 64 en Haute-Garonne, le ministre de l’Agriculture a annoncé ce dimanche 21 janvier le report d’un projet de loi initialement attendu mercredi en Conseil des ministres. Objectif : ajouter au texte des mesures susceptibles de répondre aux doléances des professionnels en colère.

Le texte portait initialement sur l’installation de nouveaux agriculteurs. Il va finalement être complété avec un volet « simplification », a annoncé le ministre Marc Fesneau sur RTL. Ce dimanche, les agriculteurs ont maintenu le blocage de l’autoroute Toulouse-Bayonne après des échanges avec la préfecture. Selon le préfet, si les échanges ont été « corrects et techniques », il n’était « pas possible d’apporter des réponses dans l’urgence ».

« Le projet de loi devait être présenté la semaine prochaine. Pour adjoindre quelques mesures réglementaires − il y a quand même des sujets juridiques qu’il faut qu’on pose −, donnons-nous quelques semaines », a déclaré Marc Fesneau lors de l’émission Le Grand Jury RTL/Paris Première/M6/Le Figaro, précisant que l’objectif était de voir le texte débattu au Parlement « au premier semestre 2024 ».

« Les agriculteurs, il faut leur foutre la paix »

Prenant acte d’un « moment d’exaspération » avec la multiplication des manifestations de colère dans les campagnes, le ministre a assuré « être au côté des agriculteurs » face à une triple crise, de confiance avec la société, de la norme −notamment européenne− et du modèle agricole face au dérèglement climatique. « C’est une crise de la norme, européenne ou nationale. La “surnormation” (...) produit de l’exaspération », estime Marc Fesneau.

Le ministre de l’Agriculture plaide pour « interroger » le Green Deal européen, qui concentre une partie de la colère des agriculteurs. « Est-ce que le Green Deal assure la souveraineté agricole ? Manifestement, nous ne sommes pas au rendez-vous », observe Marc Fesneau. Néanmoins, ajoute-t-il, « interroger, ce n’est pas mettre sur pause » ce texte phare de l’UE dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique.

Sa collègue ministre déléguée à l’Égalité Femmes Hommes, Aurore Bergé, a également joué l’apaisement dimanche. « Les agriculteurs, il faut leur foutre la paix », a-t-elle déclaré sur France Inter. Il ne s’agit pas de « leur laisser tout faire », mais « on a l’agriculture la plus saine et la plus durable au monde » et « ajouter en permanence de la contrainte (...) ce n’est pas forcément une bonne décision ».

Vers une visite périlleuse pour Macron au Salon de l’Agriculture ?

La loi « en faveur du renouvellement des générations en agriculture » est attendue par les agriculteurs, à l’heure où la population des près de 500 000 chefs d’exploitation vieillit. Le ministère estime qu’« un tiers des agriculteurs, soit 166 000 exploitants ou co-exploitants agricoles », seront partis à la retraite dans la décennie qui vient.

Le projet de loi doit notamment créer un nouveau diplôme de niveau bac+3, un « bachelor agro », et instaurer un réseau « France services agriculture », un guichet ou point d’entrée unique pour les prétendants à l’installation sous l’égide des chambres d’agriculture. Mais les reports successifs du texte, finalement moins ambitieux que la « loi d’orientation agricole » annoncée en 2023, avaient agacé les syndicats, suscitant en particulier l’ire de la puissante FNSEA qui avait menacé, sans avancée rapide, de chahuter la visite du chef de l’État, Emmanuel Macron, au Salon de l’agriculture, qui se tiendra à partir du 24 février à Paris.

Reconnaissant la nécessité d’une « simplification » du mille-feuille de normes et de réglementations, Marc Fesneau a estimé qu’il fallait se saisir de l’occasion de cette loi pour « accélérer » sur ce sujet et « crédibiliser la parole publique ». « Au lieu de prendre quelques mois, on va essayer de le faire en quelques semaines », a-t-il dit, listant « trois sujets de simplifications » : le besoin de « raccourcir les délais » administratifs, la « simplification » des règles et l’arrêt de la « surtransposition » des normes européennes quand elle menace la compétitivité française.

Ce dimanche, les responsables politiques de tous bords invités en plateaux ont affiché leur soutien du monde agricole. Le président du groupe LR à l’Assemblée Olivier Marleix a pointé la hausse de la fiscalité sur le gazole non routier (GNR) qui « déclenche la colère » et demandé au gouvernement « à renoncer dans l’immédiat à cette mesure », sur la même ligne que le numéro 1 du PCF Fabien Roussel. À l’extrême droite, Éric Zemmour (Reconquête !) et Jordan Bardella (RN) ont tous les deux pointé comme responsable les normes européennes.

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