Face à la hausse des prix de l’énergie, ces entreprises sortent les grands moyens

An employee works at the French agri-food company William Saurin factory on December 20, 2016 in Saint Thibault des Vignes. / AFP / LIONEL BONAVENTURE        (Photo credit should read LIONEL BONAVENTURE/AFP via Getty Images)
LIONEL BONAVENTURE / AFP via Getty Images An employee works at the French agri-food company William Saurin factory on December 20, 2016 in Saint Thibault des Vignes. / AFP / LIONEL BONAVENTURE (Photo credit should read LIONEL BONAVENTURE/AFP via Getty Images)

ÉNERGIE - Comment réagir en tant que chef d’entreprise quand le montant de sa facture d’électricité est multiplié par dix ? En plein contexte inflationniste, le groupe agroalimentaire Cofigeo ne voit qu’une seule solution : fermer. À partir de ce mois de janvier, l’entreprise qui comprend les marques William Saurin, Garbit, Panzani, Raynal ou encore Roquelaure va temporairement mettre 80 % de sa production à l’arrêt.

Au total, 800 des 1 200 salariés du groupe vont être mis en chômage partiel pour un mois, au minimum. L’entreprise espère ensuite être en mesure de reprendre son activité normale. Une solution radicale, que de plus en plus de patrons sont obligés de prendre ces derniers mois face à la hausse spectaculaire des prix de l’énergie, et ce malgré les aides de l’État.

« Notre facture annuelle serait passée de 4 à 40 millions d’euros pour l’ensemble de nos sites, soit un coût multiplié par dix », a expliqué la direction de l’usine William Saurin de Saint-Thibault-des-Vignes (Seine-et-Marne) au Parisien. Une situation qui n’est « plus viable économiquement » pour l’entreprise, qui plus est au regard de l’augmentation des prix des matières premières, telles que le bœuf, le porc et les tomates, mais aussi des emballages et du transport.

Cinq mois de fermeture pour Duralex

Comme Cofigeo, d’autres entreprises sont forcées d’adapter leur production… Voire de fermer pour survivre. C’est ainsi le cas du verrier Duralex, qui a décidé en décembre de suspendre sa production pendant 5 mois pour faire face à la hausse des coûts de l’énergie. « Notre facture (de gaz et d’électricité) est passée de 3 à 13 millions d’euros par an, soit 46 % de notre chiffre d’affaires », a déploré le PDG de l’entreprise, José-Luis Llacuna, auprès de BFM Business.

L’ensemble des 250 employés de Duralex ont en conséquence été mis au chômage partiel, ils recevront 95 % de leur salaire net. « C’est d’autant plus frustrant que la société va finir l’année avec 40 % de progression de son chiffre d’affaires », s’est encore désolé José-Luis Llacuna. Le même sentiment d’impuissance se ressent du côté de Cofigeo, qui assure que son groupe n’est pas en mauvaise santé financière.

Le constat est le même du côté du groupe sidérurgique Ascométal. Le fabricant d’aciers spéciaux, qui distribue dans le monde entier, a d’abord interrompu sa production à deux reprises en novembre et en décembre sur deux de ses sites principaux, à Fos-sur-Mer dans les Bouches-du-Rhône et à Hadongange en Moselle. Sur ce dernier site, l’entreprise a également décidé de décaler la production la nuit, pour bénéficier d’une électricité moins chère, selon BFMTV.

Une initiative payante, qui a permis à Ascométal de diviser par deux la facture d’énergie sur son usine de Moselle. En visite à Hadongange, le ministre chargé de l’Industrie, Roland Lescure, a salué « l’adaptabilité » du fabricant d’acier : « C’est la première fois que je vois une entreprise qui collectivement est prête à aller jusqu’à une certaine forme de révolution pour s’adapter à la crise ».

Les aides « pas suffisamment connues » des entreprises

Toutes les entreprises ne peuvent toutefois pas se permettre de travailler la nuit, et les fermetures temporaires ne sont pas souhaitables pour maintenir la production. La Première ministre Élisabeth Borne, qui a dit regretter la fermeture partielle de Cofigeo ce mardi 3 janvier sur franceinfo, a indiqué que la direction du groupe agroalimentaire serait reçue dans l’après-midi « au ministère de l’Industrie pour voir comment l’accompagner ».

Du côté des TPE et PME, l’herbe n’est pas plus verte. Les boulangeries, particulièrement concernées par l’augmentation du coût de l’électricité, mais aussi des céréales, font face à un manque cruel de trésorerie. Certaines sont contraintes de réduire le nombre de fournées voire de diminuer leur personnel.

Dans la Vienne, Grégory et Elise Auroy ont ainsi dû fermer boutique au mois d’octobre, comme le rapporte France 3 Nouvelle-Aquitaine. Propriétaire de deux boulangeries ouvertes en 2017 et 2019, le couple s’en sort plutôt bien... Jusqu’au renouvellement de son contrat d’électricité. Le prix est alors multiplié par six par rapport à l’ancien, passant de 1600 à 9800 euros par mois. Avant de jeter l’éponge, les deux boulangers réduisent leur masse salariale en passant de six à trois employés. Asphyxiés par les charges, ils finissent par mettre la clé sous la porte le 15 octobre. Leurs deux commerces sont liquidés le mois suivant. « On repart avec rien, tout ce qu’on a mis dans ce projet. Ça a duré cinq ans, je suis dégoûté de tout ça », regrette le couple auprès de nos confrères.

Pour éviter que ce cas de figure ne se reproduise trop fréquemment, Élisabeth Borne a annoncé ce mardi sur franceinfo que les 33 000 boulangers de France pourront « demander le report du paiement de leurs impôts et cotisations sociales », mais aussi l’étalement du paiement de leurs factures d’électricité auprès des fournisseurs.

« Au global, on prend en charge avec [les] différentes aides de l’ordre de 40 % de la facture d’électricité », a rappelé la cheffe du gouvernement, regrettant que la plupart des aides en place ne soient « pas suffisamment connues » des entreprises. Une situation évoquée une nouvelle fois par le ministre de l’Économie Bruno Le Maire dans la matinée, qui a assuré en conférence de presse que « seule une cinquantaine de PME par jour sollicite l’aide financière à laquelle ils ont droit. »

À l’issue d’une réunion avec les principaux fournisseurs d’électricité dans l’après-midi, Bruno Le Maire a également annoncé que les boulangers pourront résilier sans frais leur contrat de fourniture d’électricité en cas de hausse de prix « prohibitive ». Appliquée « au cas par cas », cette mesure pourra être appliquée tant qu’elle « menace la survie de l’entreprise ».

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