Face à Bardella, Macron et Attal tentent une contre-attaque qui en dit long sur les européennes
POLITIQUE - Le saloon de l’agriculture. Depuis son inauguration, samedi 24 février, le traditionnel rendez-vous des Français avec les paysans, organisé comme de coutume porte de Versailles à Paris, se mue en champs de bataille politique.
« La perche à selfie » de Jordan Bardella au salon de l’agriculture moquée par la Macronie
Après la visite calamiteuse du président de la République Emmanuel Macron, dans un climat de tension et de défiance inédit, Jordan Bardella et Gabriel Attal ont tour à tour investi les allées du Salon. L’occasion de mettre en scène leur proximité avec le monde agricole, d’enchaîner les selfies ou de goûter le camembert de Normandie. Mais pas uniquement.
Ces différentes visites sont effectivement marquées par des prises de parole acrimonieuses, voire des injures, envoyées de part et d’autre par caméras interposées. Lundi, le président du Rassemblement national a ainsi disserté sur la « dérive schizophrénique », « paranoïaque », ou « complotiste » du chef de l’État. Quelques heures plus tard, ce mardi, c’est Gabriel Attal qui a qualifié le RN de « passagers clandestins » de la crise.
Adversaires choisis
Des noms d’oiseaux qui en disent long sur la situation politique du moment. Ces échanges sont en effet le signe, tout d’abord, que la campagne des élections européennes a bien débuté. Ils montrent, également, que le Rassemblement national et le camp présidentiel se sont mutuellement choisis comme adversaires principaux.
En essayant de déambuler dans le Salon, samedi, le président de la République n’a ciblé qu’un camp : l’extrême droite. « Le Rassemblement national, c’est le parti du Frexit, de la sortie de l’euro (...) c’est des transformistes du Frexit. Je vais vous dire s’il n’y a pas d’Europe, il n’y a pas d’agriculture », a-t-il par exemple fustigé, se montrant à l’offensive contre « le projet de décroissance et de bêtise » du parti de Jordan Bardella et Marine Le Pen.
Une aubaine, ou presque, pour les dirigeants du Rassemblement national, qui s’échinent à donner à ces élections européennes un relent de référendum pour ou contre l’action du chef de l’État. « Je n’ai qu’un seul adversaire, c’est Emmanuel Macron », a ainsi plastronné le président du RN, dimanche, pour son premier passage porte de Versailles, en multipliant les flèches contre celui qui « n’a plus les capteurs du pays et ne se rend plus compte des souffrances que génère sa politique ».
Pour la formation lepéniste, on imagine aisément les raisons et les bienfaits prêtés à cette stratégie, la même qu’en 2019 : se présenter comme la seule alternative à la décennie Macron et achever ainsi une normalisation presque totale.
Macron et Attal dans l’arène
Pour le camp présidentiel, plus proche de Raphaël Glucksmann que de Jordan Bardella dans les derniers sondages pour les Européennes, force est de constater que cette méthode charrie avec elle plusieurs risques. Le principal étant de subir un camouflet retentissant dans ce duel choisi qui sera aussi le seul scrutin national avant 2027. Et ceci malgré l’investissement personnel d’Emmanuel Macron.
Car c’est l’un des autres enseignements majeurs de ces échanges indirects : le président de la République, avec son Premier ministre, entend bien prendre de l’espace, et s’imposer comme tête de liste officieuse pour les prochains mois, lui qui a fait de la construction européenne l’une de ses ambitions cardinales depuis son arrivée à l’Élysée en 2017.
En ce sens, le Salon de l’agriculture a permis au couple exécutif d’entrer de plain-pied dans la campagne, ce « combat existentiel », selon les mots d’Emmanuel Macron, pour lequel il assure ne « rien » exclure… Pas même une participation à un meeting électoral.
En attendant, le bison futé de l’agriculture continue de voir rouge face aux chassés-croisés porte de Versailles. Après Emmanuel Macron samedi, Jordan Bardella dimanche et lundi, puis Gabriel Attal dimanche soir et mardi, c’est Marine Le Pen qui va investir les travées de leur Salon, mercredi. L’occasion d’entrer à son tour dans l’arène, banderilles en main.
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