"Notre Europe peut mourir", avertit Emmanuel Macron, qui appelle à "faire des choix maintenant"
Il est venu "parler d'Europe". Emmanuel Macron a tenu un grand discours sur l'Union européenne à la Sorbonne, jeudi 25 avril, à Paris, dans lequel il a notamment évoqué la défense, la politique commerciale et plus globalement les moyens nécessaires pour faire face aux grandes puissances.
Après un rapide bilan de son discours de 2017, et malgré des "pas historiques" effectués, le président de la République a dressé un tableau dramatique des "défis du temps" auxquels doit répondre l’Union européenne.
"Notre Europe est mortelle", assure Emmanuel Macron. C’est dire si les défis qui se posent sont d’importance : le risque, c’est "la relégation". "Les règles ont changé", croit le président. Et pour s’y adapter, l’Europe doit passer par "la puissance", "la prospérité" et "l’humanisme".
Le président français a aussi accusé les nationalistes de vouloir rester dans "l'immeuble" européen sans "payer le loyer" ni respecter les "règles de copropriété".
Sur les frontières de l'UE : retrouver la "maîtrise"
Emmanuel Macron a appelé l'Union européenne à "retrouver la maîtrise de [ses] frontières" et "à l'assumer". "Si nous voulons résister à ce changement de règles, à cette escalade de la violence, à cette désinhibition des capacités sur notre continent et au-delà, nous devons nous adapter en termes de concept stratégique, de moyens et nous devons retrouver la maîtrise de nos frontières pleinement, entièrement et l'assumer", a déclaré le président français.
Il a évoqué la création d'une "structure politique" qui permettrait de prendre, entre "pays qui la partagent", "des décisions" sur "les sujets d'immigration, de lutte contre la criminalité organisée, de terrorisme, de lutte contre le trafic de drogue ou la cybercriminalité".
Sur les questions de défense : "la préférence européenne"
Emmanuel Macron veut inscrire dans les traités "la préférence européenne" dans "la défense et le spatial."
Emmanuel Macron compte inviter dans les prochains mois "tous nos partenaires" à bâtir " une initiative européenne de défense" qui soit "crédible" face "aux missiles russes", incluant "peut-être" un bouclier antimissile européen.
"Les règles du jeu ont changé" du fait de "puissances désinhibées", comme la Russie et l'Iran, a observé le chef de l'État qui a aussi déploré "un réveil encore trop faible face au réarmement généralisé du monde". Face au désengagement américain, le président français a plaidé jeudi pour une "Europe puissance", qui "se fait respecter", "assure sa sécurité" et reprend "son autonomie stratégique".
Le président français a aussi plaidé notamment pour "une capacité européenne de cybersécurité et de cyberdéfense". Il défend "une préférence européenne dans l'achat de matériel militaire" et soutient l'idée d'un emprunt européen pour financer cet effort de défense.
Le chef de l’État français appelle aussi à nouveau à un "emprunt européen" pour investir dans l'armement.
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Sur le commerce : une "révision" de la politique commerciale
Le président français Emmanuel Macron a appelé jeudi à une "révision" de la politique commerciale européenne "en défendant nos intérêts" car la Chine et les États-Unis "ne respectent plus" les règles.
"Cela ne peut pas marcher si on est les seuls au monde à respecter les règles du commerce telles qu'elles avaient été écrites il y a quinze ans, si les Chinois, les Américains, ne les respectent plus en subventionnant les secteurs critiques", a-t-il déclaré.
Emmanuel Macron a dit jeudi souhaiter voir l'Union européenne devenir d'ici à 2030 un "leader mondial", avec des "stratégies de financement dédiées", dans cinq "secteurs stratégiques de demain" : intelligence artificielle, informatique quantique, espace, biotechnologies et "nouvelles énergies" (hydrogène, réacteurs modulaires et fusion nucléaire).
Sur l’économie : un "choc d'investissements communs"
Emmanuel Macron a plaidé jeudi pour intégrer dans les missions de la Banque centrale européenne (BCE) "au moins un objectif de croissance, voire un objectif de décarbonation" et réclamé "un choc d'investissements communs" passant par un doublement de la capacité d'action financière de l'UE.
"On ne peut pas avoir une politique monétaire dont le seul objectif est un objectif d'inflation, qui plus est dans un environnement économique où la décarbonation est un facteur d'augmentation des prix", a jugé le chef de l'État.
"Il nous faut à nouveau un choc d'investissements commun, un grand plan d'investissement budgétaire" pour la défense, l'intelligence artificielle, la décarbonation, a-t-il plaidé en demandant un doublement de "la capacité d'action financière" de l'UE.
Sur l'Union des marchés des capitaux : "se donner douze mois"
"Il faut se donner douze mois" pour mettre en place le projet d'Union des marchés de capitaux, "pas plus parce que cela fait trop d'années qu'on le promet", a plaidé jeudi Emmanuel Macron.
"On a besoin de créer cette union indispensable pour pouvoir faire circuler le capital", a ajouté le président, le jour de la publication d'un rapport commandé par le ministère français de l'Économie et qui propose quatre recommandations principales pour " relancer" ce projet.
"Ce sont des subventions qu'il nous faut. [...] Est-ce que c'est une capacité d'emprunt commun ? Est-ce que c'est utiliser des mécanismes qui existent aujourd'hui [...] Au fond, il nous faut réussir à doubler la capacité d'action financière de notre Europe ou au moins la doubler en budgétaire", a-t-il dit.
Pour cela, l'Union européenne doit avoir "des ressources propres supplémentaires" mais " sans jamais peser sur les citoyens européens", a-t-il jugé en évoquant des pistes comme la taxe carbone aux frontières ou la taxation des transactions financières.
Pour atteindre ces objectifs, le chef d'État a aussi appelé "à davantage mobiliser l'investissement privé et nos capacités de financement privé".
Sur les réseaux sociaux : pour "une majorité numérique à 15 ans"
Emmanuel Macron a plaidé pour que la majorité numérique dans l'Union européenne passe à 15 ans, et pour un "contrôle parental" de l'accès aux réseaux sociaux en dessous de cet âge.
"Je veux défendre une Europe de la majorité numérique à quinze ans. Avant quinze ans, il doit y avoir un contrôle parental sur l'accès à cet espace numérique. Parce que c'est un accès, si on n'en contrôle pas les contenus, qui est le fruit de tous les risques et des déformations d'esprit, qui justifient toutes les haines", a déclaré le président français.