Européennes: économie, immigration… Ce qu'il faut retenir du débat entre Gabriel Attal et Jordan Bardella
"Deux visions qui se confrontent". Ce jeudi 23 mai, le Premier ministre Gabriel Attal a débattu avec le président du Rassemblement National, Jordan Bardella, à plus de deux semaines des élections européennes. Vision de l'Europe, pouvoir d'achat, passes d'armes… Voici ce qu'il faut retenir de cet échange de plus d'une heure.
• "L'Union fait la force", ou l'envie de réforme
Le thème central du débat: faut-il plus ou moins d'Europe? De son côté, Jordan Bardella ne souhaite pas sortir de l'union mais la réformer. "Je ne suis pas contre l'Europe, je suis contre le fonctionnement actuel de l'UE", a lancé le candidat du parti historiquement opposé à l'UE. Il désire mettre en place des réformes, notamment pour protéger les pays de ce qu'il qualifie de "désordre migratoire".
Pour sa part, le chef du gouvernement assure que le 9 juin auront lieu "les élections européennes probablement les plus importantes de notre histoire", alors que 400 millions d'électeurs sont appelés aux urnes. "Je suis convaincu que l'Union fait la force", a appuyé avec insistance Gabriel Attal, face aux volontés de protectionnisme de son opposant.
• Libre-échange, moteurs thermiques… Le grand enjeu de l'économie
Faut-il protéger l'économie française de la concurrence intra-européenne? Pendant une grande partie du débat, le pouvoir d'achat et la santé des industries françaises étaient au cœur des échanges. Deux visions se sont opposées sur la plupart de ces grandes questions économiques.
D'un côté, Jordan Bardella a affiché sa volonté d'imposer des mesures de protectionnisme favorisant les entreprises françaises, notamment sur la question des marchés publics.
Sur la question des droits de douane, et de l'importation de voitures électriques, le président du Rassemblement national s'est attaqué aux voitures chinoises. "J'assume, lorsqu'une filière est menacée de disparition, il faut mettre des droits de douane, pour réindustrialiser", a-t-il demandé.
La réponse du représentant de Valérie Hayer: "Sur les droits de douane, il n'y a pas de tabou", assure-t-il, renvoyant la décision aux institutions de l'UE.
• Le dérèglement climatique, le "grand défi d'une génération"
Les deux adversaires en conviennent, le dérèglement climatique est "le combat d'une génération". La manière de régler le problème fait toutefois divergence. D'un côté, Gabriel Attal affirme défendre une politique ambitieuse avec 1.000 milliards d'euros d'investissements dans la transition écologique.
Des objectifs trop ambitieux? C'est l'opinion de Jordan Bardella qui fustige des "intentions irréalistes" de la majorité présidentielle. Il assure que "l'enfer est pavé de bonnes intentions" et redoute des normes contraignantes pour l'industrie française.
• Une position "révoltante" sur l'immigration
Le sujet était inévitable. L'immigration, dans le top 5 des préoccupations des Français dans de nombreux sondages derrière le pouvoir d'achat, a été l'objet d'échanges particulièrement vifs et divergents.
Le Rassemblement national désire fermer l'entrée des migrants aux frontières de Schengen, évoquant un "problème sécuritaire" dans l'Europe. Le candidat d'extrême droite a de nouveau rappelé la volonté de proposer un référendum aux Français sur la question migratoire, hors du cadre des Européennes.
Gabriel Attal a immédiatement fustigé cette position. "On ne sera jamais d'accord sur l'immigration et c'est une fierté pour moi de ne pas l'être. En vous écoutant, on a l'impression que derrière chaque étranger, il y a un délinquant ou un terroriste en puissance. C'est révoltant".
• Un échange tendu sur la Russie et l'Ukraine
Avant de conclure, les deux politiques ont été invités à prendre la parole sur la question de la guerre en Ukraine menée par la Russie. Jordan Bardella a vivement décrié les déclarations d'Emmanuel Macron sur l'envoi de troupes françaises, pestant contre un "risque d'escalade majeur" de la part du président qui "joue" au "général de l'Europe". Le représentant du RN a rappelé son opposition à l'entrée de Kiev dans l'Union.
Le représentant du gouvernement a, lui, rappelé le soutien affirmé de Paris à l'Ukraine, et la volonté d'Emmanuel Macron d'un apaisement, raison pour laquelle celui-ci a rendu visite à Vladimir Poutine.
Jordan Bardella a assuré que son parti avait "condamné sans la moindre ambiguïté" l'invasion russe en Ukraine mais reconnu une "naïveté collective à l'égard de Vladimir Poutine". Selon Attal, Marine Le Pen aurait de son côté "félicité l'annexion de la Crimée". Une passe d'armes emplie d'agacement, des deux côtés.
• Un débat de gentleman et quelques punchline
Au lancement de ce débat, les deux opposants se sont salués d'une manière très cordiale. Alors que Gabriel Attal promettait "un débat respectueux et utile aux Français", Jordan Bardella appelait de ses voeux un échange capable de "réconcilier les Français avec la politique", le "grand défi de (leur) génération".
D'une manière générale, les deux dauphins n'ont pas fait de coup d'éclat. Malgré des oppositions sur le fond, la forme était, elle, cordiale. Avec quelques exceptions et des petites piques.
Sur la question litigieuse du nucléaire, Gabriel Attal a par exemple accusé son adversaire de "raconter n'importe quoi". Sur ce point, le patron du RN a tancé les "talents macronistes de Monsieur le Premier ministre".
"Votre programme c'est un 'banco' (un jeu à gratter, NDLR). Il y a plein de promesses, mais quand on gratte il n'y a rien derrière", a aussi lancé le dirigeant, sur la question de l'immgiration.