Européennes : Face à Glucksmann, Hayer et le camp Macron ne savent toujours pas sur quel pied danser

Européennes : Face à Glucksmann (ici le 1er mai 2023), Hayer et le camp Macron ne savent toujours pas sur quel pied danser
OLIVIER CHASSIGNOLE / AFP Européennes : Face à Glucksmann (ici le 1er mai 2023), Hayer et le camp Macron ne savent toujours pas sur quel pied danser

POLITIQUE - Quatre consonnes et trois voyelles, c’est le prénom qui fâche le camp présidentiel. Loin derrière Jordan Bardella, le candidat des socialistes aux élections européennes Raphaël Glucksmann est le seul, pour l’instant, à avoir bénéficié d’une dynamique positive dans les sondages. Il a fait le trou à gauche, s’est installé comme le troisième homme de la campagne et menace désormais Valérie Hayer.

Européennes : Hayer, sous la pression de Glucksmann, réagit à ses alliés qui frayent avec l’extrême droite

De quoi donner des sueurs froides à la candidate Renaissance et à ses colistiers, à moins de quatre semaines du scrutin. Qui plus est lorsque les coups d’accélérateur successifs ne permettent pas de distancer la concurrence. D’autant que le carburant apporté par Emmanuel Macron et Gabriel Attal échoue à relancer la machine.

Dès lors, quelle stratégie adopter pour reprendre une longueur d’avance et éviter le croisement des courbes ? Ignorer Raphaël Glucksmann ? Le ménager ? Le prendre pour cible ? En réalité, le camp présidentiel peine à trouver la riposte à ce candidat susceptible d’attirer à lui les électeurs de gauche déçus par le locataire de l’Élysée et ses coups de barres à droite successifs. Un tâtonnement qui dure depuis plus de deux mois maintenant.

La faute originelle

La première erreur stratégique de Valérie Hayer, de l’aveu même de nombreux macronistes, est aussi la plus fâcheuse : en entrant en campagne, l’eurodéputée réputée pour sa connaissance des dossiers européens, a pris le parti de souligner la proximité idéologique entre les socialistes et son groupe, les libéraux de Renew.

« Avec Raphaël Glucksmann, on vote à 90 % de la même façon au Parlement européen. Il devrait être avec nous, et il le sait. Il serait beaucoup plus efficace pour porter ses idées et avoir des résultats », lançait-elle au Figaro, fin février, lors de sa première interview comme candidate, avant de marteler ce pourcentage de plateaux télés en studios radios.

Une stratégie habile pour neutraliser un rival et capitaliser sur un « vote utile » face à la poussée irrésistible de l’extrême droite derrière la liste de Jordan Bardella. Mais qui s’avère contre-productive quand le candidat en question devient lui-même le « vote utile » de ceux qui, déçus des inclinations droitières du pouvoir macroniste, veulent lui infliger une défaite par la gauche.

Cette embardée rend, en tout cas, toutes les attaques qui la suivent relativement inaudibles. Après avoir souligné ses convergences de vues avec Raphaël Glucksmann, Valérie Hayer a par exemple rapidement tenté de rapprocher le candidat des socialistes de Jean-Luc Mélenchon en l’accusant, en substance, d’être à la botte de la Nupes et de l’insoumis en chef. Difficile à suivre, d’autant que le même est littéralement pilonné par la gauche radicale.

Pas de recette magique

Deux mois plus tard, force est de constater que l’ambiguïté du début poursuit la candidate. Alors que le numéro 2 sur sa liste, Bernard Guetta, dressait le portrait d’un homme qui « incarne aux yeux de certains électeurs de gauche (...) la reconstruction d’un grand parti social-démocrate », le 9 mai sur RTL, en soulignant encore le fameux ratio de votes communs, la Macronie a finalement décidé de rejouer le refrain des attaques contre le fondateur de Place-Publique.

Lundi 13 mai, l’eurodéputé Pascal Canfin (rare figure de l’aile écologiste chez Renaissance) a par exemple fait de Raphaël Glucksmann « l’impuissance européenne » sur France inter, l’accusant de ne pas avoir voté les principaux textes sur l’immigration ou le climat. Le lendemain, la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot l’a qualifié de « traître dans sa propre famille politique », sur Sud Radio en lui reprochant de ne « jamais, jamais, jamais » voter comme les socialistes. « C’est quelqu’un sur lequel sa propre famille politique ne peut pas compter. Alors comment son pays pourra compter sur lui ? », a-t-elle enfoncé.

À son tour, la ministre de l’Agriculture Agnès Pannier-Runacher a accusé l’eurodéputé de 44 ans de représenter « le retour du vieux parti socialiste », avec « 5 parisiens dans les dix premiers candidats », quand Valérie Hayer se plaît elle-même à le dépeindre comme « l’arbre qui cache la Nupes ».

En face, dans l’entourage du 3e homme de la course, on aime à penser que ces attaques coordonnées reflètent le vent de fébrilité qui soufflerait dans le camp présidentiel. Ce changement de pied à un peu plus de trois semaines du scrutin rompt, en tout cas, avec la doctrine qui a un temps prévalu dans la campagne macroniste : ostraciser Raphaël Glucksmann. Ou, « on l’ignore », selon les mots d’ordre attribués par Le Monde à Emmanuel Macron. Un précepte difficile à respecter face au risque d’un croisement des courbes désastreux.

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