Européennes 2024 : la liste EELV de Marie Toussaint en plein chemin de croix dans la campagne

Marine Tondelier et Marie Toussaint le 28 mars 2024 lors d’un happening contre TotalEnergie à La Défense.
THOMAS SAMSON / AFP Marine Tondelier et Marie Toussaint le 28 mars 2024 lors d’un happening contre TotalEnergie à La Défense.

POLITIQUE - La récolte s’annonce maigre chez les Écologistes. Leur tête de liste Marie Toussaint se démultiplie pourtant sur le terrain : des happenings, deux débats en quatre jours, sans oublier les interventions médiatiques régulières de la secrétaire nationale du parti Marine Tondelier. Mais rien ne semble y faire. À moins de 60 jours des élections européennes, un scrutin où ils ont pourtant emporté certains de leurs plus beaux scores par le passé, les Écologistes sont en difficulté.

Le terme est employé par la numéro 1 du parti elle-même, dans un e-mail envoyé jeudi 11 avril en fin de journée aux membres du Conseil Fédéral. Marine Tondelier y appelle à « la bienveillance » et à la « responsabilité » face à « la difficulté de la séquence » qu’elle dit « mesurer », rapporte Politico. Auprès du HuffPost, l’entourage de Marie Toussaint ne dément ni le message ni son contenu. Mais assure malgré tout : « le moral est bon ».

Les sondages, eux, ne le sont pas. Selon notre compilateur, la liste des Écologistes est sur une pente descendante. Dans l’enquête d’opinion YouGov pour Le HuffPost parue ce 12 avril, Marie Toussaint est à 6 %, un recul d’un point par rapport au mois de mars, de trois par rapport à janvier.

« Vent de dos » et « vent de face »

« On ne va pas dire qu’on ne regarde pas les sondages et c’est sûr qu’on préférerait qu’ils soient plus élevés », reconnaît-on en interne, même si « on reste combatifs et déterminés ». Marine Tondelier fait valoir sur Public Sénat le 11 avril que « cette élection se détermine très tard ». Sous entendu, rien n’est joué et en 2019, personne n’avait vu venir la surprise Jadot.

À l’unisson, le duo Toussaint-Tondelier pointe le « backlash écologiste » du moment. « On préfère désigner les écologistes comme coupable de tout : il n’y a pas assez d’eau, c’est de la faute des écolos, l’agriculture c’est de la faute des écolos » s’agace la cheffe du parti le 11 avril. Trois jours plutôt sur le plateau de L’Évènement sur France 2, Marie Toussaint brandissait aussi l’influence des « lobbies » en réponse à une question sur sa faible popularité, laquelle contraste avec la percée de l’écologie dans les préoccupations des Français.

« En 2019, on avait le vent dans le dos, aujourd’hui, on a le vent de face », soulignait dès janvier la cheffe de file. Un élément de langage répété désormais par l’ensemble de son équipe mais qui vient presque court-circuiter l’espoir d’une bonne surprise façon 2019. Surtout, il pose la question de la stratégie choisie.

Bayou, Ghebali... les Écologistes rattrapés par les bisbilles

Marie Toussaint a placé sa campagne sous le signe de la « douceur politique » et se refuse à taper à bras raccourcis sur ses adversaires - de gauche a minima. Elle et Marine Tondelier ont aussi assumé des happenings (dont le fameux booty shake du lancement de campagne) qui ont fait sourciller en interne. Et il n’y a pas que la forme qui interroge.

La composition de la liste doit être votée en Conseil fédéral samedi 13 avril avant une présentation officielle dans la semaine. Plusieurs noms sont déjà sortis : Charles Braine pêcheur et activiste breton, Priscilla Ludosky ex-figure des gilets jaunes, Flora Ghebali, chroniqueuse radio... L’équipe de Marie Toussaint dit vouloir « faire entendre toutes les voix de l’écologie ». Le message heurte en interne. Avant même son officialisation, le nom de Ghebali a suscité l’ire de Bénédicte Monville, qui y a vu « un camouflet » à la ligne (plus radicale) qu’elle défend. Pressentie pour être sur la liste, l’ex-conseillère régionale d’Île-de-France n’en sera finalement pas et son exclusion du parti est aussi à l’ordre du jour samedi pour infractions répétées aux règles.

« L’affaire Bayou impacte forcément la campagne »

Les bisbilles internes ne s’arrêtent pas là. Le 7 mars, l’affaire Bayou se réinvite dans la campagne après la plainte de son ex-compagne, et la menace de grève de certaines troupes si le parti ne prend pas de sanctions officielles. L’ex-député écolo se met d’abord en retrait puis démissionne de son groupe et du parti, dénonçant « un « acharnement déloyal et scandaleux », après le lancement d’une enquête externe.

Depuis, impossible pour Marine Tondelier et Marie Toussaint de faire une interview sans une question sur ce sujet. « L’affaire Bayou impacte forcément la campagne », souffle un membre de son entourage qui espère cependant que la séquence touche à sa fin. « Julien Bayou a démissionné, c’est plutôt une page qui se clôt plutôt qu’une page qui s’ouvre » veut aussi croire Marie Toussaint sur France 2.

Le risque de « se prendre le mur »

Et une nouvelle page stratégique ? Début avril, Libération annonçait l’arrivée de Sandrine Rousseau au sein du comité stratégique de la campagne. Ce, alors que ses désaccords avec la secrétaire nationale Marine Tondelier sont connus. Mais la candidate (malheureuse) à la primaire des Verts en 2022 est connue et bien identifiée sur des sujets comme l’égalité femme-homme. Sa présence dans l’équipe resserrée indiquerait-elle le début d’un changement ?

Nullement, balaie l’entourage de la cheffe de file : « Le comité stratégique est un cadre de coordination assez classique entre les grandes figures d’un parti. Ça va de Sandrine Rousseau à Yannick Jadot en passant par Cyrielle Châtelain et Marine Tondelier».

Il n’empêche... Le 11 avril, Marine Tondelier en a publiquement appelé à toutes les bonnes volontés. « Celles et ceux qui veulent nous aider, on les attend de pied ferme », lance-t-elle sur Public Sénat, soulignant sur l’importance de « rester très vigilants sur ce qui est en train de se passer ». «Quand on est écolo, il faut être des militants du quotidien et aussi du lendemain. Si on oublie les lendemains, on va se prendre le mur assez violemment », insistait-elle. La saison n’est pas encore finie.

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