Euro de handball: le "rêve" éveillé de Samir Bellahcene, le gardien qui se révèle avec les Bleus
"Samir? Il est vraiment très nul au Uno." Le chambrage est signé Benoit Kounkound, l’ailier droit des Bleus. Sur le terrain de hand, Samir Bellahcene (huit sélections) n’a en tout cas pas manqué la carte qu’il avait à jouer. En cinq mois, la carrière de l’ancien gardien de Dunkerque a basculé. Appelé pour suppléer comme joker médical le taulier du poste Vincent Gérard, blessé, dans le mythique club allemand de Kiel, Bellahcene a su saisir sa chance. Pour sa découverte de la Ligue des champions, il a impressionné. Meilleur gardien de la compétition au pourcentage d’arrêts (36,6%), il a réussi à convaincre les dirigeants allemands de le prolonger pour une saison supplémentaire. A tel point que Kiel ne compte plus sur Vincent Gérard, l’indéboulonnable n°1 de l’équipe de France.
Sur cet Euro, pour sa première compétition internationale, Bellahcene a démarré la compétition en tribunes contre la Macédoine du Nord. Avant de rentrer sur les feuilles de match puis d’occuper le poste de titulaire contre l’Islande avec réussite (12 arrêts). En quatre matchs, le gardien des Bleus affiche le meilleur pourcentage de l’équipe et croque à plein dents dans tout ce qui lui arrive. "C'est fou… Il y a un an j'étais devant ma télé et je regardais les matchs de l'équipe de France. Je me dis un an après tu y es", confie-t-il. "C'était mon rêve, j'ai toujours voulu faire ça dans ma vie et maintenant que je l'ai, je n’ai pas envie de le gâcher. J'essaie de tout mettre de mon côté, de me donner à fond à chaque opportunité."
Bellahcene: "J’ai vraiment galéré pour en arriver là"
Derrière Rémi Desbonnet lors de ses premières apparitions en compétition internationale, il a su tout de suite être performant. Le sélectionneur Guillaume Gille n’a donc pas hésité à le lancer dès le coup d’envoi ce samedi contre l’Islande. Un bon choix. Bellahcene a réussi une première mi-temps stratosphérique (8 arrêts à 44%). "Il a envie de vivre ces aventures, poursuit le sélectionneur. Envie d’être présent dans le groupe France et de saisir chaque opportunité. C’est un grand compétiteur qui se dit: « Je ne sais pas où je vais, je ne sais pas comment ni quand j’y vais mais quand la porte s’ouvre je veux être présent ». Le taulier sur le poste Vincent Gérard n’est pas là, il a bénéficié d’ouvertures, il en a profité, il a été bon."
Pas vraiment une surprise pour ses coéquipiers. "Quand tu joues à Kiel, avec les performances qu’il fait, ce qu’il fait avec nous c’est juste une confirmation", lâche le capitaine Luka Karabatic. "Ce qu’il démontre en club, c’est très, très fort", enchaine l’ailier gauche Dylan Nahi.
Révélé sur le tard après avoir dû quitter Montpellier, barré par Vincent Gérard et Nicolas Portner, deux des meilleurs gardiens du monde, il a lancé sa carrière professionnelle à Massy en deuxième division avant de filer à Dunkerque. "J'ai beaucoup galéré. Ma première année à Dunkerque, ça a été compliqué, même mes deux premières années... Ça m’a construit. Mentalement, ça m'a fait passer un autre niveau, ça m’a permis d'avoir des responsabilités. Je prends tout en fait, je sais que c'est court, je sais que ça peut aller très vite dans un sens comme dans un autre."
"A l’Euro chaque match est un enjeu et c’est ce qui m’anime"
En Allemagne, l’imposant Bellahcene (1m91) apprend un peu plus chaque jour. Avec 33% d’arrêts, il devra encore augmenter son niveau si les Bleus veulent se parer d’or mais les promesses sont là. "A l'Euro, chaque match est un enjeu, souffle l’ancien montpelliérain. Tu n’as pas le temps de te rattraper et j'ai l'impression que c'est ce qui m'anime. Tu as un peu plus de pression et j'aime jouer avec la pression. Tu joues avec les meilleurs joueurs du monde dans ton équipe et tu n’as pas envie de décevoir ces gens-là parce que ces mecs, ils se dépouillent toute la saison dans leur club. T'as envie de tout donner pour eux."
Surtout que l’objectif des Jeux olympiques plane forcément dans les têtes du trio de gardiens sélectionnés par Gille en Allemagne. Desbonnet, Bellahcene et Bolzinger seront en concurrence derrière Vincent Gérard si le patron retrouve un club, du temps de jeu et un niveau digne de son rang. "À chaque fois que je me dis: "je vais faire le bilan plus tard", il se passe de nouvelles choses, décrit l'expressif Bellahcene. Je m'étais dit que je ferai le bilan à Noël et finalement, je me retrouve à partir à l'Euro. Je veux faire le bilan en fin d'année mais je vais tout faire pour participer à la préparation des Jeux. Je n’ai pas fait de bilan, je pense que c'est aussi ce qui m'aide à ne pas me rendre compte des choses. J’ai vraiment cette insouciance en moi, je profite."
Samir Bellahcene s’est fondu dans le groupe. Une intégration express pour un joueur qui a disputé son premier match en bleu le 26 avril dernier et ne totalisait que 3 sélections avant le tournoi. "Quand j’ai vu la liste pour l’Euro, la seule chose à laquelle j’ai pensé c’est rentrer à Kiel le 30 avec la médaille d’or." Finalement les seuls échecs de Samir Bellahcene ces dernier mois semblent se résumer aux parties de Uno. "Celui qui perd doit offrir des chocolats et Samir, il a une belle petite ardoise", se marre Benoit Kounkound. En plus de l’ardoise, Bellahcene compte bien repartir d’Allemagne avec une première ligne en or à son palmarès.