Entretien. Procès Sankara : “On aura une vérité judiciaire, pas une vérité des faits”

Le procès des assassins de Thomas Sankara s’est ouvert le 11 octobre dernier à Ouagadougou. Il tente de sonder et solder une mémoire encore à vif au Burkina Faso, celle de l’assassinat de l’ancien président révolutionnaire et de douze de ses compagnons en octobre 1987. Essayiste et journaliste, Serge Oulon couvre ce procès historique pour le bimensuel burkinabè L’Evènement.

Courrier international – Comment s’est déroulé le procès jusqu’à présent, notamment la tenue des débats ?

Serge Oulon – Globalement, le procès se passe bien. Les audiences sont publiques, les accusés ont accès à des avocats, comme exigé par la loi. Le public a pu être au rendez-vous, même s’il y a eu des pics lors de l’audition de certains accusés, dont l’un des principaux accusés, le général Gilbert Diendéré.

Une fois cela constaté, la tenue des débats est de qualité contrastée. La mémoire des Burkinabè garde le souvenir du procès du putsch manqué de septembre 2015. Ce procès, qui a eu lieu de février 2018 à septembre 2019, avait vu la comparution de soixante-seize accusés, alors que dans le procès Sankara, ce sont douze personnes qui se trouvent sur le banc des accusés. La comparaison de ces deux procès penche en faveur de celui du putsch. La tenue des débats y avait été autrement plus solennelle et marquée par le président du tribunal, Seidou Ouédraogo, qui avait su tenir les audiences.

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Nous assistons, dans le procès des assassins de Sankara, à une nette régression dans la tenue des débats, avec parfois des applaudissements ou des rires qui jurent avec la solennité des débats et la dimension historique des débats. Cela tient au manque d’expérience et à la personnalité du président du tribunal Urbain Meda. Le juge qui a présidé au procès du putsch manqué Seidou Ouédraogo est considéré comme l’un des meilleurs juges du siège du Burkina Faso. Il savait écouter, mener les témoignages et tenir l’audience. Le juge qui préside au procès Sankara a une carrière plus bureaucratique dans la magistrature burkinabè. Il intervient beaucoup et ne recadre pas souvent les acteurs, le parquet militaire, les accusés, la défense, la

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