Enquête Ligne Rouge: affaire Maëlys, itinéraire d'un prédateur

Appel à témoins pour retrouver Maëlys, affichée le 28 août 2017 à Pont-de-Beauvoisin - Capture d'écran BFMTV
Appel à témoins pour retrouver Maëlys, affichée le 28 août 2017 à Pont-de-Beauvoisin - Capture d'écran BFMTV

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L’histoire de Charlotte, une adolescente de l’est de la France, aurait pu ne pas faire de bruit. En mars 2017, alors âgée de 14 ans, la jeune fille est victime d'une agression lors de l'enterrement de son père. Et l'agresseur se trouve être son cousin, Nordahl Lelandais.

"Mon cousin a voulu m’accompagner pour aller fumer, donc on s’est éloigné sur le côté de la maison. Je pleurais, forcément (...). Il me prend dans ses bras, je sens ses mains descendre dans mon dos. Ses mains se mettent sur mes fesses avec insistance", raconte-t-elle.

Elle poursuit en expliquant qu'elle tente de le repousser, mais qu'il lui touche également la poitrine. Finalement, il menace de la tuer si elle se confie à sa famille sur ce qu’il vient de se passer.

Face aux caméras de BFMTV, la mère de Charlotte explique que sa fille se sent coupable de n'avoir pas parlé avant de ce qui lui était arrivé: "Elle a été rongée par la culpabilité, parce qu’elle se dit que si elle en avait parlé plus tôt, peut-être que la petite Maëlys serait encore en vie".

Une attirance pour les mineurs

Car quelques mois plus tard, le 26 août, c'est à Maëlys de Araujo, âgée de huit ans, que Nordahl Lelandais s'en prendra. Ce jour-là, dans l'Isère, rien ne laisse présager du drame qui va s’ensuivre. La météo est au beau fixe, et 180 invités sont réunis dans la salle des fêtes de Pont-de-Beauvoisin pour célébrer un mariage auquel Maëlys et sa famille participent. Nordahl Lelandais, lui, a réussit à se faire convier au vin d'honneur par le marié, la veille.

L’ancien maître-chien, qui vit toujours chez ses parents, n’a plus de travail fixe, ni de relation stable.

"C’est un homme qui aime faire la fête, il est souvent en discothèque et dans les soirées. C’est quelqu’un d’accro au sexe, à la drogue, à l’alcool, et qui, en 2017, a eu une vie assez dissolue", décrit Serge Pueyo, grand reporter à RTL.

Plus tard, l'enquête révèlera qu'il avait également des tendances pédophiles. Par deux fois, quelques semaines avant le mariage, il agresse sexuellement deux de ses petites cousines tout en filmant les attouchements.

"Il avait l'air gentil"

Le jour de l'enlèvement de Maëlys, il repart vers 21 heures 30, non convié au repas. Il se rend à une autre soirée, au cours de laquelle les convives croisent un homme "au regard froid, à l’air inquiétant", qui s’intéresse de près à la fille du couple qui organise la soirée, rapporte Serge Pueyo.

Il revient ensuite au mariage, vers minuit, et fait la connaissance de Maëlys. Dans une interview donnée un an après le meurtre de sa fille, Jennifer Cleyet-Marrel raconte que la petite-fille lui demande alors la permission d’aller voir "les chiens de [son] copain".

"Je trouvais ça bizarre mais après je me suis dit qu’il avait l’air gentil, qu’il avait dû savoir que Maëlys aimait bien les animaux", confiait alors sa mère.

Vers 3 heures du matin, ses parents se rendent compte de la disparition de la petite fille. Avec les autres invités, ils se lancent à sa recherche, mais rien n'y fait: la petite fille est introuvable. Les gendarmes sont appelés une heure plus tard.

Des coups violents

Pendant plusieurs jours, d’importants moyens sont déployés pour retrouver Maëlys. Grâce aux chiens-pisteurs, les enquêteurs déduisent rapidement qu'elle a vraisemblablement quitté le mariage à bord d’une voiture. Comment Nordahl Lelandais est-il parvenu à convaincre la petite fille de monter à ses côtés?

“On peut penser que c’est autour de cette passion commune avec les chiens. (...) Il fait attention à ce qu’on ne le voie pas quitter la salle des fêtes avec Maëlys”, relate Aude Bariéty, journaliste au Figaro et auteure d’un livre sur le meurtrier.

D’après ce que racontera le tueur aux enquêteurs, la petite fille se met à pleurer et crier, apeurée, au cours du trajet en voiture. Le meurtrier l’aurait alors frappée violemment. "À tel point que le mannequin qui représente la petite Maëlys [pendant la reconstitution] va perdre sa tête sous les coups de Nordahl Lelandais”, précise Thibaut Solano, rédacteur en chef à Marianne.

Un profil de manipulateur

Le tueur affirme avoir agi sous le coup de la colère, comme lors de l'aveu du meurtre d'Arthur Noyer en avril 2017, pour lequel il a été jugé en mai. Le soir des faits, il déambule en voiture dans les rues de Chambéry. Il prend alors en stop le caporal, qui sort de boîte de nuit en état d’ébriété.

Il soutiendra plus tard avoir tué Arthur Noyer parce que ce dernier l’accusait du vol de son portable. Cependant, les circonstances du meurtre restent encore floues.

Les enquêteurs ne retrouvent le corps de Maëlys que six mois après sa mort, un retard que Nordahl Lelandais aurait intentionnellement souhaité, soupçonnent les avocats de la famille de la victime. Plusieurs éléments de l'enquête le désignent comme un manipulateur.

Il tente notamment d’effacer les preuves en résiliant la ligne téléphonique qu’il utilisait alors, et en nettoyant son véhicule dans une station de lavage. Mais une petite tâche du sang de Maëlys, prélevée par les enquêteurs dans son coffre, finit par le trahir et le pousse à avouer.

"Incapable d'éprouver de la culpabilité"

Plusieurs expertises psychiatriques ont été réalisées depuis son placement en détention, et concluent sur une personnalité "clivée, de type pervers", "incapable d’éprouver de la honte ou de la culpabilité".

Nordahl Lelandais comparaîtra devant la Cour d’Assises de l’Isère dès lundi pour enlèvement, séquestration et meurtre concernant la petite fille, mais également pour les agressions sur ses cousines et pour la détention d’images pédopornographiques. Il encourt la réclusion à perpétuité.

Article original publié sur BFMTV.com