"Enfants soldats", habitations détruites: escalade dans la guerre des gangs en Suède

Depuis plusieurs années, la Suède est confrontée à une vague de violences inédites. Fusillades commises par des "enfants soldats", immeubles détruits par des engins artisanaux, parents devenus cibles de règlements de compte et matinales d'information ouvrant sur le nombre de morts qui s'accumule: des événements devenus réguliers dans ce royaume à la réputation habituellement calme.

La guerre entre bandes criminelles pour le contrôle du trafic de drogues et d'armes, qui sévit depuis presque dix ans, a franchi un nouveau cap en 2023 car elle touche désormais les proches des membres de bandes et fait des "victimes collatérales", parmi lesquelles des enfants.

Depuis le début de l'année, la police suédoise dénombre 314 fusillades qui ont fait 47 morts. En 2016, elle recensait 25 fusillades et 7 morts.

Des membres de gangs de plus en plus jeunes

Cette violence débridée a coïncidé avec un rajeunissement des auteurs des règlements de compte, constatent les experts. Selon un rapport publié par l'administration de la prévention des crimes (Brå) le 1er novembre, 336 enfants entre 15 et 17 ans étaient soupçonnés de détention illégale d'armes à feu en 2022 contre 42 en 2012.

Dans les banlieues défavorisées de Suède, recruter des mineurs pour commettre des meurtres contre rémunération s'intègre dans la stratégie des gangs, puisque les moins de 15 ans ne peuvent pas être condamnés à une peine de prison. Les fusillades sont aujourd'hui plus dangereuses en partie parce que leurs auteurs sont très jeunes et ne savent pas manier les armes.

Et les mineurs "contactent eux-mêmes les bandes criminelles" sur des boucles Whatsapp pour commettre des meurtres, souligne Anders Thornberg, chef de la police nationale.

Afin de prémunir les plus jeunes de cet enrôlement, la police suédoise a diffusé, sur son site officiel, un petit guide à l'attention des adolescents et de leurs parents. "La prévention constitue le moyen le plus efficace de mettre fin à long terme au nouveau recrutement d’enfants et de jeunes dans les réseaux criminels", apprend-on, alors que les autorités proposent la mise en place de "tuteurs" afin de favoriser le dialogue dans les familles concernées.

"Parlez à d’autres adultes autour de vous et soyez ouvert à accepter du soutien et de l’aide. En tant que parent, vous êtes toujours la personne la plus importante dans la vie de votre enfant. Cela reste le cas même lorsque votre enfant ne vous répond pas ou que vous vous disputez sur tout", est-il encore écrit.

Quelle réaction?

Auprès de l'AFP, Thomas Cervin, 61 ans, détaille la dégradation de son quotidien dans la ville d'Uppsala. Le 13 septembre dernier, il est réveillé en pleine nuit par des coups de feu dans son immeuble: sa voisine est la cible de la guerre des gangs qui sème la terreur en Suède.

Face à cette situation devenue intenable, les politiques souhaitent réagir fort. "La Suède n'a jamais vu rien de tel auparavant, aucun autre pays en Europe ne connaît une telle situation", déclarait fin septembre le Premier ministre Ulf Kristersson, mettant en cause "l'immigration irresponsable et l'échec de l'intégration".

"Le droit suédois n'est pas conçu pour les guerres de gangs et les enfants soldats. Mais nous sommes en train de changer cela", avait-t-il dit.

Le 28 septembre, jour où trois personnes ont perdu la vie dans le pays, le Premier ministre avait assuré dans une adresse à la nation qu'il allait "demander aux forces armées d’aider la police dans la lutte urgente contre la criminalité des bandes. Nous déploierons toutes les ressources nécessaires pour traquer les gangs et les vaincre."

Article original publié sur BFMTV.com