Emmanuel Macron veut des « prix planchers » pour les agriculteurs, Marc Fesneau était contre il y a moins d’un mois

Emmanuel Macron veut des « prix planchers » pour les agriculteurs, Marc Fesneau était contre il y a moins d’un mois
FRED TANNEAU / AFP Emmanuel Macron veut des « prix planchers » pour les agriculteurs, Marc Fesneau était contre il y a moins d’un mois

POLITIQUE - En marge d’un Salon de l’agriculture houleux ce samedi 24 février, le président de la République Emmanuel Macron s’est dit favorable à la mise en place de « prix planchers » pour protéger les revenus des agriculteurs. Obligeant dès lors son ministre de l’Agriculture à changer son fusil d’épaule ?

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« L’objectif que je fixe aux travaux qui ont été lancés par le Premier ministre et ses ministres, et en particulier les travaux parlementaires, c’est qu’on puisse déboucher sur véritablement ces prix planchers qui permettront de protéger le revenu agricole et de ne pas céder à toutes les pratiques les plus prédatrices qui aujourd’hui sacrifient nos agriculteurs et leurs revenus », a déclaré Emmanuel Macron à la sortie d’un entretien avec les responsables des syndicats agricoles au tout début de la journée.

Ce « prix plancher » sera fondé sur l’indicateur de coût de production agricole sur lequel chaque filière agricole (volailles, lait, viande bovine…) a dû se mettre d’accord pour objectiver les coûts de production des agriculteurs.

Cette annonce a été favorablement accueillie par la Confédération paysanne. « Poser le mot sur le concept de prix plancher est déjà une petite révolution », a salué auprès de l’AFP sa porte-parole Laurence Marandola. « Après, ce prix plancher va être construit par filière, du coup ça va être tiraillé entre producteurs et l’aval. On fera attention », a-t-elle ajouté. Plus partagée, une source syndicale s’interroge de son côté sur la légalité de ce dispositif qui revient à un prix minimum garanti.

Dans l’opposition de gauche aussi, l’annonce a été bien reçue, et pour cause. Insoumis comme communistes ne se sont pas privés de rappeler que l’instauration de ce dispositif était réclamée « de longue date » par leurs soins.

Côté insoumis, le sujet a même fait l’objet d’une proposition de loi débattue le 30 novembre 2023 lors de leur niche parlementaire à l’Assemblée nationale. Contrairement à Emmanuel Macron, les insoumis plaidaient pour que le prix plancher soit établi par des négociations entre chaque filière. La fixation du prix à partir de l’indicateur de coûts ne devait intervenir qu’en cas d’échecs des négociations, par les ministères compétents.

Les prix plancher, une « proposition démagogique » ?

À l’époque, le gouvernement avait donné un avis défavorable. « Nous ne sommes plus au temps des coûts stables des matières premières agricoles » et « un prix plancher, par définition, viendrait rigidifier, voire scléroser le système. Il vaudrait mieux instaurer, sans tarder, un système plus flexible, permettant de suivre en temps réel les cours des matières premières, comme le prévoit la loi Egalim 2, et sanctuariser le coût de la matière première agricole dans la négociation », argumentait Olivia Grégoire, ministre déléguée au PME. La proposition de loi avait ensuite été rejetée.

Le 27 janvier, en plein blocage des agriculteurs et alors que Gabriel Attal venait d’annoncer un premier panier de mesures, le ministre de l’Agriculture se montrait très critique lui aussi. « Les propositions démagogiques du genre ’on va fixer une obligation de prix plancher’, ce qu’on peut ne faire que sur les prix agricoles français et qu’on ne peut pas faire sur les prix des autres pays, qu’est-ce que cela fait ? Cela vient mettre en concurrence déloyale les produits agricoles français », taclait Marc Fesneau interrogé sur franceinfo.

Selon lui, des prix plancher instaurés uniquement à l’échelle française auraient surtout pour conséquence de favoriser la concurrence déloyale, dont se plaignent déjà les agriculteurs : « Si on met le kilo de tomates (...) à 10 euros en France et qu’il arrive de la tomate à 3 euros, vous croyez qu’il va se passer quoi ? », faisait-il valoir.

À défaut de prix plancher, le gouvernement s’appuyait sur la loi Egalim 2 qui « a permis l’instauration de clauses de révision automatique des prix en fonction d’indicateurs de coûts de production », selon Olivia Grégoire le 30 novembre.

Il s’agit désormais d’aller « au bout de la logique », ont souligné des conseillers de l’exécutif à l’AFP. « On mettra en place un prix plancher par filière pour que le travail paie et que les agriculteurs ne soient pas obligés de vendre en dessous du coût de production moyen de la filière », précisent-ils.

Le 21 février, le Premier ministre Gabriel Attal avait annoncé prévoir « d’ici l’été » de mettre sur pied un nouveau texte de loi pour améliorer la rémunération des agriculteurs. Contacté par Le HuffPost pour connaître la position de Marc Fesneau, son cabinet n’avait pas donné suite à l’heure où nous écrivons ces lignes.

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