Emmanuel Macron veut une défense européenne avec l’arme nucléaire, « folie » lui répondent LFI et la droite

Photo d’illustration, Emmanuel Macron au CESE le 26 avril 2024.
LUDOVIC MARIN / AFP Photo d’illustration, Emmanuel Macron au CESE le 26 avril 2024.

POLITIQUE - « Folie », « gravité exceptionnelle »... Le président de la République s’est mis à dos une grande partie des oppositions en se disant prêt, dans la presse régionale, à « ouvrir le débat » d’une défense européenne qui comprendrait aussi l’arme nucléaire - que la France est la seule à posséder dans l’UE depuis le Brexit.

Discours d’Emmanuel Macron à la Sorbonne : Des étudiants manifestent au Panthéon pour Gaza

Dans son deuxième discours sur l’Europe à la Sorbonne le 25 avril, le chef de l’État français a plaidé pour bâtir un « concept stratégique » de « défense européenne crédible ». Et pour ce faire, Emmanuel Macron estime que la puissance de dissuasion nucléaire française ne doit pas être exclue. « Être crédible, c’est avoir aussi des missiles de longue portée qui dissuaderaient les Russes. Et il y a l’arme nucléaire : la doctrine française est qu’on peut l’utiliser quand nos intérêts vitaux sont menacés. J’ai déjà dit qu’il y a une dimension européenne dans ces intérêts vitaux, sans les détailler car cette dissuasion concourrait à la crédibilité de la défense européenne », a-t-il précisé dans un entretien avec les journaux du groupe Ebra.

Il souhaite donc « ouvrir ce débat qui doit donc inclure la défense antimissile, les tirs d’armes de longue portée, l’arme nucléaire pour ceux qui l’ont ou qui disposent sur leur sol de l’arme nucléaire américaine. » C’est le cas de l’Italie et de la Belgique. « Mettons tout sur la table et regardons ce qui nous protège véritablement de manière crédible », a déclaré le président en ajoutant que la France garderait « sa spécificité mais est prête à contribuer davantage à la défense du sol européen ».

« Augmenter le risque de conflit nucléaire en Europe »

Si les contours ne sont pas définis - l’Élysée compte présenter son programme lors du Conseil européen post-élections les 27 et 28 juin et rien ne dit que l’UE suivra ce chemin - la sortie du président a provoqué une levée de boucliers sur sa droite.

« Un chef de l’État français ne devrait pas dire ça », s’est emporté François-Xavier Bellamy, tête de liste Les Républicains. « Cette expression est d’une gravité exceptionnelle, parce que là nous touchons au nerf même de la souveraineté française », a-t-il dit au Grand Rendez-Vous sur Europe1/CNews. « Nous l’avions annoncé, il a nié, il mentait. Emmanuel Macron souhaite bien partager avec l’Union européenne notre dissuasion nucléaire », a aussi réagi Marine Le Pen. Dans le cadre des élections européennes, le RN plaide pour inscrire la dissuasion nucléaire dans la Constitution comme « élément inaliénable » de la souveraineté française.

À gauche, la France insoumise est aussi vent debout. « C’est une folie et c’est complètement irresponsable » qui « augmente le risque de conflit nucléaire en Europe » a fustigé la présidente du groupe à l’Assemblée nationale Mathilde Panot dans Le Grand Jury. Dans un communiqué, le groupe soutenu par Jean-Luc Mélenchon a dénoncé « un abandon de la doctrine de dissuasion nucléaire française » qui « fragilise la position militaire de la France ».

Les Écologistes disent « pourquoi pas »

Aux antipodes, la tête de liste des Écologistes aux européennes Marie Toussaint, favorable à un « saut fédéral européen », a considéré sur France 3 que cela signifiait le « partage de cette force qu’est l’arme française, donc le nucléaire aussi ». Estimant que « c’est déjà un peu le cas » au vu des alliances et traités - même si la dissuasion nucléaire n’est jamais clairement évoquée - le numéro 2 de la liste David Cormand répond aussi « pourquoi pas » mais appelle, sur franceinfo, à ne pas réduire la défense européenne à la seule réponse nucléaire.

Outre les écologistes, le chef de l’État peut aussi compter sur le soutien président du MoDem François Bayrou. « Il peut y avoir des circonstances dans lesquelles un gouvernement français décide qu’une menace sur l’Europe est une menace contre la France », a déclaré François Bayrou sur LCI. Tout en gardant l’entière responsabilité de l’arme nucléaire, « les autorités françaises peuvent toujours considérer que ce qui se joue en Europe, c’est leur destin ».

À voir également sur Le HuffPost :

Le Charles-de-Gaulle, porte-avions nucléaire déployé sous l’égide de l’Otan, va commencer la mission « Akila »

Sûreté nucléaire : le Parlement approuve la fusion décriée ASN-IRSN