Quand Emmanuel Macron parle de l’Ukraine, il pense aux élections européennes

C’était évidemment une provocation de la part du président français lorsque, à l’issue du sommet sur l’Ukraine, il a vaguement évoqué le possible envoi de troupes françaises sur le front ukrainien. Vladimir Poutine le sait pertinemment. Cette menace lui est néanmoins utile sur le plan intérieur car elle lui permet de justifier son agression en cours contre l’Ukraine, à la veille de l’élection présidentielle [qui aura lieu en Russie du 15 au 17 mars], et de se présenter en protecteur de la Grande Russie [idée d’une Russie incluant la Biélorussie et l’Ukraine].

L’annonce française n’est pas non plus dénuée de calculs politiques : Emmanuel Macron voulait faire impression auprès de l’opinion publique – française et internationale – et faire oublier que, jusqu’à présent, l’aide française à l’Ukraine a été nettement moindre que celle de l’Allemagne et des autres alliés de Kiev.

Ses provocations ne font qu’attiser les craintes – très réelles – d’une extension du conflit. Le président français n’a ni l’intention ni les moyens de défier le nouveau tsar sur le champ de bataille. Ses menaces d’intervention relèvent surtout d’une stratégie politique en vue des élections européennes. Macron n’envoie pas ses “troupes” dans les tranchées ukrainiennes, mais sur le front de la campagne électorale.

Marginalisation des adversaires politiques

Tous les sondages prédisent, en effet, une défaite cinglante pour le camp présidentiel au mois de juin, loin derrière le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen. Et la proximité du RN avec Vladimir Poutine, talon d’Achille du parti, représente l’angle d’attaque le plus prometteur pour Emmanuel Macron : tous ceux qui ne soutiennent pas le président et sa politique pro-ukrainienne seraient du côté du Kremlin – c’est en tout cas le raccourci opéré par le président pour marginaliser ses adversaires d’extrême droite.

C’est surtout au nom de cette stratégie, et non d’une volonté d’inclure le Parlement, qu’a été ouvert le débat sur l’aide à l’Ukraine et le vote de l’accord bilatéral de sécurité à l’Assemblée nationale. Les pacifistes de gauche qui se sont opposés à l’accord ou se sont abstenus – refusant de donner au président un blanc-seing pour une éventuelle escalade du conflit –, se sont fait accuser d’être pro-Poutine. Et se retrouvent ainsi dans le même sac que les nationalistes d’extrême droite.

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