Emmanuel Macron nomme une « mission » pour la Nouvelle-Calédonie, ce que dit le choix des experts
POLITIQUE - Quelques ministres et trois noms moins connus se sont glissés dans l’avion du président de la République pour son déplacement - surprise - en Nouvelle-Calédonie. Attendu à Nouméa ce mercredi 22 mai en toute fin de soirée (heure de Paris, début de journée heure locale) après plusieurs jours d’émeutes meurtrières, Emmanuel Macron va « exprimer sa solidarité » aux Calédoniens, fait savoir son entourage et installer une « mission » censée rétablir un dialogue mis à mal par son projet de dégel du corps électoral.
Dès son arrivée à Paris, le chef de l’État prévoit de rencontrer l’ensemble des élus de l’archipel ainsi que des acteurs économiques, alors que le bilan s’annonce lourd pour les entreprises et commerces. À ce stade, l’entourage présidentiel ne s’avance guère sur les personnalités qui répondront présentes, d’autant que sa dernière visite en juillet 2023 avait été boycottée par une partie des leaders indépendantistes. Mais insiste : après « la priorité » du retour à l’ordre, « le président est attaché à la reprise du dialogue ».
C’est dans cet esprit que sera installée la mission composée, selon des informations de Politico, Libération et l’AFP, de trois hauts fonctionnaires : Éric Thiers, Frédéric Potier, et Rémi Bastille.
Dépassionner le débat politique
Aucun de ces trois hommes n’a d’étiquette politique revendiquée. Éric Thiers a été nommé en février 2024 directeur de cabinet de la ministre de l’Éducation nationale Nicole Belloubet, Frédéric Potier est actuellement cadre à la RATP et Rémi Bastille, préfet du Doubs.
Pour autant, tous ont en commun d’avoir travaillé au sein de gouvernements et sur les Outre-mer, voire directement sur le dossier calédonien. Éric Thiers a occupé pendant deux ans, et jusqu’à récemment, le poste de « conseiller institutions » à l’Élysée. Présenté dans un portrait de Libération comme spécialiste des révisions constitutionnelles, il a dans ce contexte travaillé sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie dans le cadre de l’application des accords de Nouméa. Frédéric Potier a lui été conseiller de l’Assemblée nationale sur l’Outre-mer entre 2012 et 2014 avant de devenir conseiller technique Outre-mer au sein du cabinet du Premier ministre occupé à l’époque par Manuel Valls puis Bernard Cazeneuve. Enfin, Rémi Bastille occupait jusqu’en janvier 2024 le poste de secrétaire général du Haut-Commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie.
Avec ce choix, Emmanuel Macron tente donc de s’éviter un procès en incompétence, alors que les élus ultramarins reprochent très régulièrement aux personnalités nommées depuis Paris une méconnaissance des dossiers et des réalités locales. En parallèle, la nomination de trois hauts fonctionnaires et non pas de personnalités politiques - le nom d’Édouard Philippe, connaisseur du dossier avait été évoqué - témoigne aussi d’une tentative de dépassionner un débat très clivant entre partisans de l’indépendance et loyalistes. L’entourage du chef de l’État assure d’ailleurs que si la mission « s’inscrira dans le volet politique », elle se fera aussi dans « un cadre beaucoup plus global ».
La mission, une possible « première réponse »
Reste à savoir quels seront les objectifs fixés. L’entourage du président reste flou à ce stade, arguant que « le cadre de cette mission, en fonction des échanges que le président aura avec les uns et les autres, pourrait être amené à évoluer ».
Sur place, le projet ne crispe pas - en tout cas à ce stade. Dans un communiqué, le bureau politique du FLNKS (le parti au sein duquel se retrouvent les mouvements indépendantistes et nationalistes) a dit « prendre acte de cette initiative qui pourrait constituer une première réponse ». « Le FLNKS attend de cette visite que le Président de la République fasse une annonce relevant de sa seule responsabilité qui permette d’impulser un nouveau souffle en vue de renouer un dialogue apaisé et serein entre les trois partenaires politiques des accords », indique les cadres calédoniens.
Comprendre : renoncer à la tenue du Congrès au mois de juin qui doit acter le dégel du corps électoral. Au sein de la majorité présidentiel, de plus en plus de voix plaident pour un report. « Sinon c’est le pire qui est certain », redoute le député (Renaissance) Philippe Dunoyer. Emmanuel Macron est jusqu’à présent resté ferme : au lendemain du vote de l’Assemblée, il fait savoir que sans accord plus large entre indépendantistes et loyalistes, le Congrès sera réuni « avant la fin juin ». Ce qui laisse près d’un mois aux experts pour dénouer la situation.
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