Emmanuel Macron en froid avec Bruno Le Maire ? Comment la crise du déficit complique leur relation

Emmanuel Macron et Bruno Le Maire photographiés à l’Élysée en mars 2023 (illustration)
KIN CHEUNG / AFP Emmanuel Macron et Bruno Le Maire photographiés à l’Élysée en mars 2023 (illustration)

POLITIQUE - Dans ses bureaux de Bercy, Bruno Le Maire a une vue imprenable sur la Seine. Probablement l’un des meilleurs points d’observation de Paris pour admirer la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques, prévue le 26 juillet. Mais le ministre de l’Économie sera-t-il encore en poste pour profiter du spectacle ? La question se pose aux regards des tensions qui ont émergé dans le sillage du dérapage du déficit public.

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Depuis que l’Insee a révisé à la hausse l’ampleur de la dette, plusieurs indiscrétions de presse décrivent Emmanuel Macron passablement agacé par son ministre aux commandes de l’économie depuis 2017. En cause : l’approche du locataire de Bercy pour résoudre politiquement les dégâts causés par la dette, à l’heure où les oppositions s’en prennent aux « Mozart de la finance ».

Pour montrer qu’il veut prendre le sujet à bras-le-corps, Bruno Le Maire penche pour un budget rectificatif présenté à l’Assemblée. Tout l’inverse d’Emmanuel Macron qui estime que le sujet ne concerne pas tant les dépenses que les recettes, et qu’il serait malvenu d’offrir aux oppositions le cadeau de parler déficit matin midi et soir. Qui plus est en pleine campagne pour les élections européennes.

Exaspération présidentielle

Alors, naturellement, la situation se tend. Ce mercredi 10 avril dans Politico, des proches du chef de l’État jurent qu’Emmanuel Macron « ne supporte plus » Bruno Le Maire. La veille, c’est Le Monde qui relatait un rendez-vous tendu entre les deux hommes. Selon Les Échos, c’est l’initiative prise par le ministre de l’Économie de pousser en sous-marin pour un projet de loi de finances rectificative pour corriger le tir qui a fini d’achever sa patience.

Résultat : Emmanuel Macron a enterré la piste du projet de loi de loi de finances rectificatives (PLFR). Un acte d’autorité qui a fuité dans les heures qui ont suivi. Encore une fois, l’événement est compris comme une nouvelle exaspération présidentielle à l’égard de son ministre, qui a pris l’étrange initiative de publier un nouveau livre alertant sur le train de vie de notre modèle social, au moment où ses propres prévisions sur la dette étaient revues à la hausse.

D’autant que ce nouvel épisode intervient après un premier (et sévère) recadrage, prononcé sans ménagement lors d’une réunion à l’Élysée le 20 mars avec les poids lourds de la majorité et justement consacrée au déficit public. « Bruno, ça fait quand même sept ans que tu es là », lâche Emmanuel Macron, dans des propos rapportés par Le Figaro le 4 avril, et non démentis depuis. Le ministre de l’Économie serait-il particulièrement fragilisé par la séquence ? Son entourage relativise cette « tempête dans un verre d’eau » chroniquée dans les médias.

« Psychodrame »

« C’est le rôle du ministre de proposer différents vecteurs pour réduire le déficit, le président a tranché contre le PLFR, basta. Le ministre propose, le président dispose, c’est normal », démine un proche auprès du HuffPost niant toute tension lors de la réunion qui s’est tenue lundi entre Emmanuel Macron et Bruno Le Maire.

Reste que le soupçon est bien là en Macronie, où on suspecte le locataire de Bercy de jouer au « Père la rigueur » en anticipation de la dégradation de la France par les agences de notation. Le Point laisse même entendre que ce routier de la politique prépare ainsi sa sortie du gouvernement en endossant le costume du sérieux budgétaire au moment où les appétits s’aiguisent en vue de 2027. « Bruno Le Maire est un homme du temps long, il n’a jamais fait (et ne fera jamais) des petits coups de court terme. Il n’y a vraiment pas de quoi en faire un psychodrame », s’agace encore son entourage, en soulignant sa longévité au poste.

« Le ministre de l’Économie a acté qu’il n’y aura pas de PLFR et il a assuré qu’il était totalement aligné derrière le Président et le Premier ministre », confirme un cadre de la majorité présent ce jeudi à une réunion consacrée aux finances publiques. Ce dirigeant macroniste ne veut pas « spéculer sur l’état des relations personnelles entre les deux » mais il veut croire que « ce qu’à dit Le Maire, ce ne sont pas les paroles de quelqu’un qui va claquer la porte ». Plutôt celles de quelqu’un qui veut pouvoir profiter de la cérémonie d’ouverture des JO.

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