Emmanuel Macron à la Sorbonne : pourquoi le discours embarrasse (déjà) les eurodéputés Renaissance

Pourquoi le discours de Macron à la Sorbonne met les eurodéputés de son camp dans l’embarras (photo de Macron et Hayer prise le 17 avril 2024 à Bruxelles)
LUDOVIC MARIN / AFP Pourquoi le discours de Macron à la Sorbonne met les eurodéputés de son camp dans l’embarras (photo de Macron et Hayer prise le 17 avril 2024 à Bruxelles)

POLITIQUE - La contre programmation du président. Emmanuel Macron entre de plain-pied dans la campagne des élections européennes ce jeudi 25 avril en prenant la parole à la Sorbonne, sept ans après son discours fondateur qui sert encore aujourd’hui de corpus européen à ses élus.

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Problème : ce grand raout, censé « définir les priorités de la France pour l’agenda stratégique de l’UE », selon le vocable de l’Élysée, est organisé au moment même de la dernière session plénière au Parlement européen. Concrètement, pendant que le président de la République dissertera sur l’importance d’une organisation puissante, les eurodéputés sont appelés à écouter, à Strasbourg, une déclaration de la commission concernant l’élargissement de l’Union. Ils doivent ensuite voter sur divers sujets.

Un télescopage d’agenda qui ne manque pas de faire hurler les élus français opposés à Emmanuel Macron. Invitée à la Sorbonne, Manon Aubry, la cheffe de file des insoumis a d’ores et déjà fustigé une « atteinte grave à la démocratie » quand sa collègue socialiste Nora Mebarak prévient qu’elle a « vote », et qu’elle séchera donc le discours présidentiel. Dans ce contexte, la Macronie elle-même apparaît un brin gênée.

Dilemme en Macronie

C’est en tout cas ce que reflètent les réactions des ministres interrogés sur le sujet dans les médias ce mardi, deux jours avant le rendez-vous. Et aussi l’atermoiement qui règne chez les eurodéputés. La porte-parole du gouvernement, par exemple, semblait bien en peine sur LCI pour justifier cette concordance.

Prisca Thevenot a d’un côté appelé les eurodéputés à « faire leur travail de parlementaire », en votant à Strasbourg. Et assuré, de l’autre, que « le président peut bien évidemment avoir un propos sur l’Europe. » Avant de finalement botter en touche, face à l’insistance du journaliste : « si le président ne les avait pas invités (les eurodéputés français) vous m’auriez posé la question dans l’autre sens. »

Au même moment, sa collègue Marie Guévenoux, ministre des Outre-mer, tentait une pirouette en expliquant que ce télescopage d’agenda « prouve bien » qu’Emmanuel Macron « n’est pas focalisé sur la campagne électorale dans le cadre du discours qu’il prononcera jeudi. » « S’il avait été focalisé sur la campagne, il aurait probablement fait attention à ce souci logistique », a-t-elle encore ajouté.

Reste que les eurodéputés du camp présidentiel - prompts à critiquer les absences répétées de Jordan Bardella à Bruxelles et Strasbourg - sont désormais face à un dilemme : écouter la bonne parole du chef de l’État à Paris ou remplir leur fonction d’eurodéputé en prenant part aux votes à Strasbourg. Pas simple.

Valérie Hayer choisit (presque) la Sorbonne

« Je ne me suis pas encore décidée » confie dans ce contexte la porte-parole Nathalie Loiseau au HuffPost, une des rares responsables de la campagne de Valérie Hayer à souhaiter s’exprimer sur la question (délicate) en ce mardi.

« Je vais donc peser le pour et le contre en regardant si les votes de jeudi sont serrés ou non », précise celle qui menait le camp présidentiel en 2019, en prenant soin de souligner au passage qu’il « n’est pas rare qu’un grand discours se tienne à un moment où des élus ont des votes. » Il n’empêche. Le camp macroniste - qui laisse le choix à ses élus - ne sait pas à sur quel pied danser. De quoi prêter le flanc aux critiques, d’un côté comme de l’autre.

« Nous serons pour la plupart présents pour les votes jeudi au Parlement européen », nous assure la députée européenne Fabienne Keller, en indiquant toutefois que Valérie Hayer devrait pour sa part être aux côtés du président de la République pour l’écouter en direct. « Elle sera à la Sorbonne », avançait en début d’après-midi le député de Paris (et porte-parole de la campagne) Clément Beaune.

Quitte à sécher les votes au Parlement, et à ébrécher l’argument phare des macronistes sur l’assiduité de leur candidate ? Que nenni dément finalement auprès du HuffPost le parti présidentiel, qui assure que la tête de liste sera bien à Strabourg, et démontre au passage l’embarras des troupes.

Quant aux eurodéputés « Renew » désireux de prendre part aux débats, ils ne bouderont pas le discours du chef de l’État pour autant. « Nous écouterons la première partie en direct, puis la seconde en replay », précise Fabienne Keller. Une gymnastique qui symbolise bien ces soucis de calendriers, soucis dont le camp présidentiel aurait pu aisément se passer.

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