Dragon Ball Super Broly : pourquoi la Toei a-t-elle décidé de spoiler son propre film ?

La semaine passée, une nouvelle bande-annonce du film Dragon Ball Super: Broly confirmait la présence de Gogeta, la seconde fusion de Gokû et Vegeta. Mais loin de ravir les fans, cette annonce a déclenché de vives réactions d'hostilité, alors que ces derniers auraient préféré garder la surprise quant à l'apparition de ce personnage iconique, considéré jusqu'ici comme non-canon (il n'était en effet qu'apparu dans le film Fusions! ainsi que la série non-officielle Dragon Ball GT).

Les studios Toei Animation ont-ils spoilé (en français, gâché) Dragon Ball Super: Broly avec cette révélation ? Telle est la question qui anime depuis plus d'une semaine les réseaux sociaux. D'un point de vue spectateur, il ne fait guère de doute que la présence du personnage aurait eu un plus gros impact si elle avait été gardée secrète jusqu'à la sortie du film. D'un point de vue commercial, cette décision fait en revanche plus de sens. Explications.

Les spoilers, nouvel argument publicitaire

Les spoilers font désormais partie de notre paysage audiovisuel, au point d'être devenus un aspect de marketing extrêmement répandu : nombreux sont en effet les films et les séries à entretenir le culte du secret absolu, permettant ainsi à chaque divulgation de créer l'événement. Ce qui explique par exemple pourquoi Game of Thrones n'a pour le moment révélé aucune image de son ultime saison, attendue pour le mois d'avril prochain (la date précise n'est pas encore connue).

Pour faire un peu d'humour, on pourrait donc se demander si les spoilers ne gâchent pas les films et les séries… littéralement, tant le terme occupe désormais une place omniprésente dans le langage courant, et que la moindre information sur le contenu d'un film ou d'une série - y compris la plus insignifiante - est désormais considérée comme tel par une partie du public.

Le cas Gogeta ne fait pas exception, et il est même symptomatique de cette tendance. Quand sort en 1995 le film Dragon Ball Z: Fusions (couplé avec L'Attaque du dragon), l'affiche dévoile sans aucune gêne la présence du personnage, dont il s'agissait alors de la toute première apparition. A l'époque, cette révélation ne créée pourtant pas la polémique, puisqu'au contraire les fans se réjouissent de découvrir cette nouvelle fusion et de la voir à l’œuvre dans un combat sur grand écran.


Gogeta dans la bande-annonce du film Dragon Ball Super:Broly

Une franchise multimédia

Depuis, le regard des spectateurs a changé, mais pas la stratégie de la Toei. Il n'est guère cynique de dire que Dragon Ball est une franchise multimédia, dont l'objectif principal est de faire gagner de l'argent à sa société de production. Ainsi, la présentation du nouveau Gogeta dans le trailer de Dragon Ball Super: Broly a très vite été suivie par la révélation des figurines à l'effigie du personnage, mais également par son apparition prochaine dans les divers jeux vidéo (Xenoverse 2) et mobiles (Dokkan et Legends, bien que cela ne soit pas encore officialisé) de la franchise Dragon Ball.

D'un point de vue commercial donc, la Toei a misé sur l'impact de cette annonce pour sortir un tout nouveau catalogue entièrement dédié à ce personnage inédit, sous toutes les déclinaisons possibles : Gogeta en forme basique, en Super Saiyan et en Super Saiyan Blue. Car oui, les niveaux d'énergie introduits par la série Dragon Ball Super, sont autant de moyens pour les héros de se surpasser que pour la compagnie japonaise de lancer de nouvelles gammes de produits dérivés, et par conséquent d'augmenter leur chiffre d'affaires (les studios Toei ont d'ailleurs enregistré cette année un bénéfice record).

Plusieurs constats s'imposent. Tout d'abord, les fans qui ont grand avec la franchise ne se souviennent pas qu'à l'époque de leur enfance, la stratégie de la Toei était la même, et qu'il arrivait même que des figurines soient disponibles avant même la sortie des films auxquelles elles se rattachent.


Gogeta Blue bientôt disponible dans le jeu Dragon Ball: Xenoverse 2

Secondo, nous vivons désormais dans une ère qui, grâce à internet et aux réseaux sociaux, permet de s'informer plus rapidement qu'auparavant par le biais de nouveaux canaux : s'il était compliqué d'avoir des nouvelles fraîches en direct du Japon dans les années 90, ormis par le biais de la presse spécialisée, il ne faut désormais guère plus d'une minute pour qu'une information - et donc un spoiler - soit diffusée dans le monde entier grâce à Twitter.

Enfin, Dragon Ball est une franchise multimédia, et le film Broly est à la fois une suite directe de l'animé Dragon Ball Super, une introduction à la prochaine série (l'arc narratif qui fait suite au long métrage vient d'ailleurs de débuter dans le manga) et une publicité grandeur nature pour les nouveaux produits dérivés, principale source de revenues de la saga. Car, au risque de choquer et même de contrarier certains fans, Dragon Ball plaît autant pour la qualité de ses personnages et de son histoire que pour ses figurines, ses cartes à collectionner et ses jeux vidéo.

Et cela ne semble pas près de s'arrêter, puisqu'en parallèle à ses bénéfices record, la Toei a récemment ouvert une section entièrement dédiée à la gestion de la franchise Dragon Ball, qui fêtait ces jours-ci son 34ème anniversaire ! Une longévitié inouïe pour une franchise dont nous n'avons pas fini d'entendre parler !