Donald Trump jugé coupable dans l’affaire Stormy Daniels : quelles conséquences pour la présidentielle ?

Mathieu Gallard, directeur d’études chez Ipsos, explique au « HuffPost » pourquoi la condamnation de Donald Trump renforce sa base électorale « antisystème ».

Un boulet au pied ou une carte à jouer ? Donald Trump a été jugé coupable dans l’affaire Stormy Daniels ce jeudi 30 mai par un jury de douze habitants de New York. Pour savoir s’il passera par la case prison ou non, il faut attendre le verdict que le juge Juan Merchan rendra le 11 juillet prochain. Si le milliardaire a été condamné, rien ne l’empêche légalement d’être candidat à la présidentielle de novembre 2024 face à Joe Biden.

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En revanche, sa popularité et ses chances de retourner à la Maison Blanche sont-elles mises à mal ? Sur le papier, devenir le premier ex-président de l’histoire des États-Unis à être reconnu pénalement coupable pourrait entacher sa réputation.

Mais pour Mathieu Gallard, directeur d’études chez Ipsos et spécialiste des opinions politiques, les électeurs républicains ne vont pas tourner le dos à Donald Trump. Il explique même au HuffPost pourquoi, malgré les scandales et les procès, l’ex-président américain reste favori de l’élection de novembre.

Le HuffPost. Cette condamnation peut-elle entacher la popularité de Donald Trump et le faire reculer dans les sondages ?

Mathieu Gallard. Non, pour plusieurs raisons. D’abord, les États-Unis sont un pays extrêmement polarisé. Schématiquement, il y a deux blocs : 50 % des électeurs votent pour le parti républicain, 50 % votent pour le parti démocrate. Chez les républicains modérés, qui pourraient s’offusquer de cette condamnation, ils voteront in fine pour le candidat de leur parti plutôt que celui du candidat adverse.

Par ailleurs, depuis la première élection de Donald Trump en 2016, il a dit et fait des choses qui auraient pu dissuader les républicains modérés. Malgré tout, ils ne l’ont jamais abandonné. Par exemple, Donald Trump a contribué indirectement à l’assaut sur le Capitole, le 6 janvier 2021. C’est « pire » d’un point de vue démocratique que d’être condamné, et pourtant, les modérés sont revenus.

Iriez-vous jusqu’à dire qu’il a une carte à jouer ?

Je pense en effet que Donald Trump peut jouer sur la carte du « prisonnier politique » qui va booster sa base électorale « antisystème ». C’est un argument de plus pour les républicains de montrer qu’il est le candidat qui sait mettre un coup dans la fourmilière et changer le fonctionnement de l’État et ses institutions.

Cela ne peut même pas décourager les électeurs très indécis ?

C’est une question de la temporalité. Nous sommes à cinq mois de l’élection. Si, ça peut jouer sur quelques électeurs à court terme, le 5 novembre, on parlera d’autre chose que de cette condamnation. Quand ils voteront dans cinq mois, ils se décideront sur des critères très concrets comme la ligne politique du candidat sur l’immigration ou l’économie du pays.

Et Joe Biden, le président démocrate, peut-il tirer profit de cette situation ?

Joe Biden a deux options. La première est « combative », il se positionne alors en « gardien des institutions démocratiques » face à Donald Trump qui est condamné en justice. Deuxième option, il n’en parle pas du tout et se concentre sur les aspects économiques de la campagne. On ne peut pas dire quelle option est la bonne, mais en tout cas, la manière dont vont réagir les démocrates est certainement plus déterminante que la condamnation en elle-même.

Si cette condamnation a finalement peu d’effets sur l’élection, quelle est la prochaine étape décisive pour les candidats ?

C’est la rentrée de septembre 2024. En fonction de la situation économique, Donald Trump ou Joe Biden peut gagner en popularité. Si l’économie est au beau fixe, ce sera à l’avantage de Biden, si l’inflation repart à la hausse, ce sera bon pour Trump. C’est à ce moment-là que les Américains qui s’intéressent peu à la politique vont se pencher sur la présidentielle et les sondages seront significatifs. En revanche, les procès ou les débats à la télé (le premier a lieu le 27 juin sur CNN, NDLR) n’auront pas d’influence.

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