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Djamel Beghal libéré et expulsé vers l'Algérie

Djamel Beghal, une figure de l'islam radical qui est considéré comme le mentor d'un des tueurs de Charlie Hebdo, a été libéré lundi matin et pris en charge par la Police de l'air et des frontières (PAF). /Photo d'archives/REUTERS/Charles Platiau

PARIS (Reuters) - Djamel Beghal, figure de l'islam radical considéré comme le mentor d'un des tueurs de Charlie Hebdo, a été libéré lundi matin au terme de sa peine et expulsé dans la foulée vers l'Algérie, a-t-on appris de sources proches du dossier.

Selon une source familière des questions de sécurité à Alger, l'Algérie pourrait cependant n'être qu'une étape : les autorités algériennes et françaises auraient pu conclure un marché pour qu'il aille dans un autre pays africain. La même source cite le Burkina Faso parmi les destinations possibles.

Détenu à la prison de Vezin-le-Coquet, en Ille-et-Vilaine, Djamel Beghal, 52 ans, "a été libéré ce matin à 5h20 et pris en charge par la PAF" (Police aux frontières), a fait savoir la direction de l'administration pénitentiaire (DAP), selon laquelle il avait alors "un comportement calme".

Selon une source proche du dossier, il a été conduit à l'aéroport parisien Roissy Charles-de-Gaulle, où il a été mis un peu plus tard dans la matinée dans un vol à destination d'Alger.

Djamel Beghal, un ressortissant franco-algérien déchu de sa nationalité française, purgeait une peine de 10 ans de prison pour avoir participé à un projet d’évasion d'un membre du Groupe islamique armé (GIA) algérien, Smaïn Aït Ali Belkacem, condamné à perpétuité pour un attentat dans le RER, à Paris, en 1995.

Il est connu des services de police français depuis le milieu des années 1990. Selon ceux-ci, il a notamment passé plusieurs mois en Afghanistan au début des années 2000 dans un camp d'entraînement militaire financé par Oussama Ben Laden, alors chef du réseau djihadiste Al Qaïda.

Il est soupçonné d'avoir envisagé des attentats. Il est aussi considéré comme le mentor de Chérif Kouachi, un des auteurs de l'attaque de janvier 2015 à Paris contre Charlie Hebdo, ainsi que d'Amedy Coulibaly, qui a tué quatre juifs dans une supérette et une policière à la même époque.

DIMENSION DIPLOMATIQUE

Il a bénéficié de remises de peine pour un total de 23 mois et 15 jours. Il était libérable ce lundi mais cette libération conditionnelle a été accordée sous la condition suspensive de son expulsion vers l’Algérie.

La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, avait déclaré que la France souhaitait le renvoyer en Algérie à sa sortie de prison. Ce qui a fait l'objet de négociations entre Paris et Alger et donné à ce dossier une forte dimension diplomatique.

La garde des Sceaux avait précisé que si l'Algérie refusait de le reprendre, il serait assigné à résidence.

Son avocat, Me Berenger Tourné, a déclaré au Parisien qu'il avait finalement demandé son rapatriement en Algérie, "même s'il sait que son retour ne se fera pas sans difficulté sur place", plutôt que d'être assigné à résidence en France.

L'avocat de parties civiles dans le dossier de l'Hyper Cacher de la Porte de Vincennes, Me Axel Metzker, a tenté en vain de s'opposer à son renvoi en Algérie en déposant un référé suspension auprès de la justice à Rennes et une demande d'acte auprès du juge d'instruction chargé de cette affaire.

Son expulsion "est une entrave à la justice et engage la responsabilité de l'Etat français", a dit à Reuters Me Metzker. "Le mentor des frères Kouachi et d'Amedy Coulibaly a fui la justice française avec la bénédiction de l'Etat français."

Signe de la sensibilité du sujet, les ministères français des Affaires étrangères, de l'Intérieur et de la Justice, interrogés à plusieurs reprises ces derniers jours, refusent de faire le moindre commentaire.

(Emmanuel Jarry, avec Lamine Chikhi, édité par Yves Clarisse)