Stellina Kizoglu, atteinte du syndrome des ptérygium multiples : "Sincèrement, je voulais mourir, je n’avais pas les épaules assez larges"

Atteinte du syndrome des ptérygium multiples, Stellina Kizoglu a su accepter avec le temps son handicap. Pour Yahoo, la jeune femme au caractère bien trempé a accepté de se livrer sur son histoire, expliquant notamment la manière dont elle s’est détachée du regard des autres. Un récit inspirant.

Son tempérament de feu l’a aidée à se faire une place dans une société parfois compliquée. Atteinte du syndrome des ptérygium multiples, Stellina Kizoglu n’a pas le physique de madame tout le monde, une différence qui semble lui avoir insufflé une certaine force face au monde extérieur. Pour Yahoo, la jeune femme a accepté de se livrer, revenant en détail sur sa maladie et sur les différentes épreuves qu’elle a traversée depuis son enfance. (Retrouvez l’intégralité de l’interview en fin d’article)

"On m’a mis une barre de fer dans le dos"

Stellina a 31 ans et mesure 1m30. Une petite taille qu’elle doit, sans grande surprise, à cette maladie génétique extrêmement rare. "Dès ma naissance, j’étais un peu plus petite que les autres", confie-t-elle expliquant avoir développé rapidement une scoliose qui la faisait ressembler à "Quasimodo". Rapidement, la jeune fille côtoie le monde hospitalier. À l’âge de quatre ans, elle se rend dans un centre de rééducation où une barre en fer est placée dans son dos avec un halo. "Ce sont des vis au niveau de la tête pour redresser la colonne vertébrale".

Fort heureusement, Stelinna ne souffre pas du regard des autres. Du moins, elle n’y prête pas attention. "On n’a jamais rigolé de moi, on m’a toujours aidée", explique-t-elle tout en confiant s’être défendue par ses propres moyens lorsque certaines situations s’y prêtaient. "Je me défendais avec des mots, des actes. Au collège par exemple, si une personne me parlait mal, je lui jetais ma trousse".

Retrouvez l'interview Différent.e.s de Stellina Kizoglu en intégralité en podcast :

Un cas de figure loin d’être régulier. La jeune fille n’a aucun problème pour se faire des amis et poursuit sa scolarité sans encombre, jusqu’à ses 15 ans, âge où tout bascule. Certaines personnes la dissuadent de poursuive ses études en raison des multiples difficultés auxquelles elle devra faire face dans sa vie professionnelle. Une décision qu’elle regrette encore amèrement aujourd’hui. "On m’a un peu découragée, je n’aurai pas dû les écouter", admet-elle tout en relativisant malgré tout. "Je suis la seule à n’avoir pas fait de stage en troisième. Personne ne voulait de moi. Alors travailler plus tard aurait été compliqué".

"Sincèrement, moi, je voulais mourir"

Sa quinzième année est également marquée par une autre épreuve. Victime de problèmes respiratoires, elle se rend à l’hôpital où son état de santé empire. "On m’a donné de l’Atarax, j’ai fait une réaction allergique et je suis tombée dans le coma", se remémore-t-elle tout en expliquant que la trachéotomie était son seul recours pour rester en vie. Il s’agit d’une intervention chirurgicale consistant à créer une petite ouverture au niveau du larynx et à y glisser une petite canule qui permet d’améliorer la ventilation.

Mais lorsque les médecins lui annoncent ce qui l’attend, c’est le choc. "Sincèrement, je voulais mourir, je n’avais pas les épaules assez larges pour tout ça", confie-t-elle avec émotion expliquant n’avoir pas été rassurée par les dires des médecins. "Ils disaient que ça allait être dur, que je devrais toujours être accompagnée." Elle explique également avoir paniqué à l’idée d’être dépendante de machines, de ne plus pouvoir voyager, de ne plus aller à l’école ou encore de ne plus pouvoir sortir normalement, comme n’importe quel autre jeune de son âge. Mais ses parents ne lui laissent pas le choix. Une décision qu’elle comprend désormais.

"Les harceleurs ? Je les vois comme des idiots. Même handicapée, j’arrive à les rendre jaloux"

Malheureusement, la vie ne lui fait pas de cadeaux et les épreuves s’accumulent. Stellina doit faire face à une montée de haine, à du harcèlement. "Tu aurais dû mourir" ; "tu as un collier de chienne" ; "tu ne vas jamais percer", reçoit-elle.Des messages qu’elle efface dans l’immédiat dans la plupart des cas. Pour autant, rien ne parvient à miner son moral. "Ils sont idiots. Je m’assume malgré mon handicap. Je me maquille, je pars en vacances et je pense que c’est un problème pour eux", analyse-t-elle expliquant avoir puisé chez eux une certaine force. "Même handicapée, j’arrive à les rendre jaloux, qu’ils continuent."

Malgré tout, elle pointe du doigt le manque d’empathie des internautes, expliquant avoir une fois porté plainte. "C’est de la méchanceté ou de la jalousie mais c’est débile parce qu’ils ont la santé. Il n’y a rien à envier". À travers son témoignage, Stellina souhaite donner du courage à celles et ceux qui pourraient vivre la même situation, un message d’espoir qui, elle l’espère, prendra son sens. "Il ne faut pas perdre confiance en soi. Nous sommes tous des bijoux, des créatures de Dieu. Nous avons nos différences mais nous sommes tous beaux à notre propre niveau. Il n’y a pas de moche sur cette terre".

"Je reçois parfois des commentaires assez blessants, comme "Tu aurais dû mourir""

Pour elle, les réseaux sociaux "donnent des ailes" et doivent être utilisés avec précaution. Elle exhorte les jeunes à prendre de la hauteur sur les commentaires des haters. "Lorsque je coupe ma 4G, il n’y plus de réseau, c’est le retour à la vie normale" confie-t-elle tout en rappelant que la plupart des internautes se cachent derrière leur écran. Une force de caractère qu’elle a acquis avec le temps. "Peu importe ce que les gens disent, rien ne va m’abattre. Tu peux me jeter des cailloux sur ma tête, je ne m'évanouirai pas".

"Je n’ai jamais eu de problème pour rencontrer un homme, la différence attire"

Fort heureusement, les personnes qu’elle côtoie ne reflètent pas ce monde virtuel qu’elle dépeint. Aujourd’hui, Stellina est bien entourée et heureuse. Et si elle n’a pas encore trouvé le prince charmant, rien ne la jamais bloquée dans ses recherches. "Je pense que la différence attire", confie-t-elle précisant n’avoir jamais eu de problèmes pour rencontrer un homme. Dans tous les cas, la jeune femme n’a jamais vu de "la pitié" dans les yeux d’un prétendant et détesterait devoir y faire face. Elle fait d’ailleurs tout pour vivre comme tout le monde. "Chez moi, je n’ai rien adapté. Je n’ai pas envie de me réveiller chaque jour et de voir une différence." Quant à son envie de maternité, la jeune femme explique ne fermer aucune porte. "Je prends la vie comme elle vient, je ne me pose pas trop de questions", conclut-elle.

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