Didier Raoult visé par de nouvelles accusations : ce que l’on sait

Didier Raoult, ici prenant la parole lors d’une conférence de presse sur le Covid-19 à l’IHU de Marseille, le 20 avril 2022.
Didier Raoult, ici prenant la parole lors d’une conférence de presse sur le Covid-19 à l’IHU de Marseille, le 20 avril 2022.

COVID-19 - Didier Raoult est revenu dans l’actualité en ce dernier week-end de mai, après un appel lancé par des médecins à prendre des sanctions contre l’IHU de Marseille. La conséquence d’un essai « sauvage » mené pendant la pandémie de Covid-19.

Le HuffPost fait le point sur ces nouvelles accusations qui visent le professeur spécialiste des maladies infectieuses, aujourd’hui à la retraite, et sur sa contre-attaque médiatique entamée ce mardi 30 mai.

  • Par qui et de quoi Didier Raoult est-il accusé ?

Seize sociétés savantes de médecine ont interpellé, dimanche 28 mai, les autorités sur une absence de sanctions face au « plus grand essai thérapeutique “sauvage” connu », dénonçant l’étude de Didier Raoult, ancien patron de l’IHU de Marseille, sur l’hydroxychloroquine.

Dans une tribune publiée sur le site du Monde, ces sociétés impliquées dans la recherche reprochent à des équipes de l’Institut hospitalier universitaire (IHU) Méditerranée Infection « la prescription systématique, aux patients atteints de Covid-19 (...) de médicaments aussi variés que l’hydroxychloroquine, le zinc, l’ivermectine ou l’azithromycine (...) sans bases pharmacologiques solides, et en l’absence de toute preuve d’efficacité ».

Plus grave, selon elles, ces prescriptions ont continué « pendant plus d’un an après la démonstration formelle de leur inefficacité ». Ce qui fait dire aux sociétés savantes que les autorités doivent prendre « les mesures adaptées aux fautes commises », au nom de la « sécurité des patients » et de la « crédibilité de la recherche médicale française ».

Le professeur Raoult, qui a acquis une notoriété médiatique en tenant des positions, aujourd’hui discréditées, sur le Covid-19 et notamment sur l’efficacité supposée de traitements comme l’hydroxychloroquine, a publié en mars un « pre-print », c’est-à-dire une version non relue par des pairs, de son étude sur plus de 30 000 patients Covid.

  • Que répond Didier Raoult à ces accusations ?

« Il n’y a jamais eu d’essai thérapeutique », s’est défendu ce mardi Didier Raoult, interviewé sur BFMTV dans une ambiance parfois très tendue avec le journaliste Bruce Toussaint. Interrogé sur le fait qu’il ait administré de l’hydroxychloroquine à des patients atteints de Covid pendant plusieurs mois après l’interdiction par le Haut conseil de la Santé publique, il répond : « J’avais parfaitement le droit, moi, mais aussi les autres, de prescrire de l’hydroxychloroquine ». L’interdiction est « une décision politique, mais qui n’engage pas la responsabilité personnelle des médecins ».

L’infectiologue affirme même que « des milliers de gens qui auraient pu être traités n’ont pas été traités ». Au sujet de son étude publiée en « pre-print », Didier Raoult affirme que « c’est juste une étude observationnelle », ajoutant que cette étude « peut servir et elle servira pour l’Histoire ».

En avril, l’Agence du médicament (ANSM) avait estimé que l’utilisation de l’hydroxychloroquine « expose les patients à de potentiels effets indésirables qui peuvent être graves ».

  • Quelle est la position du ministère de la Santé ?

Interrogé par l’AFP, le cabinet du ministre de la Santé, François Braun, a rappelé que ce dernier, ainsi que la ministre de la recherche et de l’enseignement supérieur Sylvie Retailleau, avaient saisi le Procureur de la République de Marseille « sur les pratiques inacceptables de l’IHU ».

Depuis la convocation des établissements fondateurs de l’IHU par les ministres en octobre, assure le ministère, « les prescriptions inappropriées et dangereuses ont cessé ». « Au regard de la gravité de ces nouveaux éléments, les deux ministères seront donc amenés à réentendre les établissements fondateurs et la direction de l’IHU-MI rapidement », a indiqué le ministère.

À l’issue du Conseil des ministres ce mardi, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, qui était ministre de la Santé durant la pandémie, a répondu aux questions des journalistes sur le sujet : « Ce qui est une certitude, c’est que l’hydroxychloroquine n’a jamais marché contre le coronavirus, hélas. Si les conditions de réalisation d’essais cliniques n’ont pas été respectées (...) il faut en saisir les autorités. Je crois l’avoir fait d’ailleurs en mon temps ».

  • Où en est-on sur le plan judiciaire ?

Après un rapport d’inspection administrative accablant (Igas/IGESR) sur les dérives médicales, scientifiques et managériales de l’IHU sous la direction de Didier Raoult, le gouvernement avait annoncé le 5 septembre dernier saisir la justice. Sur ce volet, le parquet de Marseille est toujours en phase d’analyse, a-t-il indiqué à l’AFP.

Le parquet avait aussi ouvert en juillet 2022 une information judiciaire, après un rapport cinglant de l’ANSM, pour « faux en écriture », « usage de faux en écriture » et « recherche interventionnelle impliquant une personne humaine non justifiée par sa prise en charge habituelle ». À ce stade, il n’y a pas eu de mise en examen.

  • Que devient Didier Raoult ?

Retraité depuis l’été 2021 de son poste de professeur d’université-praticien hospitalier, il a été remplacé fin août à la tête de l’IHU Méditerranée par Pierre-Édouard Fournier. Le professeur Raoult, qui vient à l’IHU « de temps en temps », est désormais professeur émérite et encadre deux thèses ayant commencé avant son départ, selon un porte-parole de l’institution.

  • Quelles sont les conséquences à l’IHU de Marseille après son départ ?

Au sein de l’IHU, tous les essais cliniques impliquant la personne humaine ont été suspendus depuis l’arrivée du professeur Fournier. L’institut a indiqué à l’AFP attendre un prochain retour de l’ANSM à ce sujet.

Côté ANSM, « la prochaine étape est le suivi, et potentiellement, la levée des injonctions faites à l’IHU, comme sur les essais cliniques. Il faut que l’IHU démontre qu’ils ont répondu aux attentes », a déclaré une porte-parole de l’agence du médicament, sans horizon temporel.

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