"Pas d'honneur pour les violents": Lio évoque le meurtre de Marie Trintignant par Bertrand Cantat
Mardi 1er août marquera le 20e anniversaire de la mort de l'actrice Marie Trintignant, tuée par les coups de son compagnon Bertrant Cantat à Vilnius en 2003. À cette occasion, la chanteuse Lio prend la parole dans les colonnes de Libération pour évoquer le souvenir de son amie. Lio, elle-même victime de violences conjugales, dénonce l'omerta persistante qui entoure les violences faites aux femmes.
"Quand j’ai pris la parole, je n’ai reçu pratiquement aucun soutien", se souvient la chanteuse, qui tout de suite après le drame s'était opposée à toute relecture romantisée des événements, face à une société encore aveugle au fléau des violences conjugales.
"Je suis tombée, j’ai tout perdu", poursuit-elle. "Certains sont allés jusqu’à prétendre que j’avais touché de l’argent, jusqu’à me comparer à une 'hyène de service', jusqu’à dire qu’on en arrivait à comprendre le mec qui m’avait cassé la gueule."
"C’est ce que vaut la vie d’une femme? "
Bertrand Cantat, qui a retrouvé sa liberté après quatre ans de prison, a plusieurs fois tenté un retour sur le devant de la scène. Ces come-backs de l'ancien leader de Noir Désir déclenchent immanquablement des polémiques, de manifestations féministes devant ses salles de concerts, et d'appels au boycott.
À l'idée selon laquelle on peut séparer l'homme de l'artiste, Lio oppose un refus catégorique:
"C’est très simple: le phallus qui est dans le sexe d’une femme qui ne l’a pas demandé, comment lui dire qu’il fait partie de l’homme mais pas de l’œuvre? Il faut arrêter avec ce délire!".
"Je ne suis pas pour les autodafés, jamais", poursuit-elle. "Que ceux qui veulent continuer d’écouter ses disques chez eux le fassent. Un salopard peut avoir du talent. Mais pas d’honneur pour les violeurs, les violents."
Et de "saluer le courage" d'Adèle Haenel et Céline Sciamma lorsqu'elles ont quitté la cérémonie des César 2020, au moment où le prix de la meilleure réalisation a été attribué à Roman Polanski, lui-même accusé de viol par plusieurs femmes, pour son film J'accuse.
"Bertrand Cantat peut écrire pour d’autres, sans monter sur scène, sans qu’on l’applaudisse", estime Lio. "Et à ceux qui disent qu’il a payé sa dette, j’ai envie de dire: quatre ans de prison, c’est ce que vaut la vie d’une femme?"