Des soldats sud-soudanais accusés d'exactions dans une ville proche de l'Ouganda

Des centaines de réfugiés sud-soudanais ont gagné mercredi l'Ouganda pour le deuxième jour d'affilée, amenant avec eux de nouveaux témoignages glaçants sur une attaque menée en tout début de semaine par les forces gouvernementales contre une localité située à la frontière. /Photo prise le 26 février 2017/REUTERS/Siegfried Modola

NGOMOROMO, Ouganda (Reuters) - Des centaines de réfugiés sud-soudanais ont gagné mercredi l'Ouganda pour le deuxième jour d'affilée, amenant avec eux de nouveaux témoignages glaçants sur une attaque menée en tout début de semaine par les forces gouvernementales contre une localité située à la frontière. D'après des informations recoupées par Reuters, l'attaque contre Pajok, une ville de 10.000 habitants située à 15 km au nord de la frontière, a fait au moins 17 morts, certains égorgés avant d'être pendus dans des encadrements de porte, d'autres abattus d'une balle dans le dos alors qu'ils s'enfuyaient. En deux jours, plus de 3.000 Sud-Soudanais se sont réfugiés du côté ougandais de la frontière, et leurs témoignages offrent un aperçu de la brutalité de la guerre civile entre les partisans du président Salva Kiir et de son ex-vice-président Riek Machar qui fait rage depuis trois ans dans leur pays. Le gouvernement sud-soudanais dément que les forces de l'Armée de libération du peuple du Soudan (SPLA) aient visé des civils et présente l'intervention menée lundi à Pajok comme une opération contre des rebelles qui contrôlaient la ville depuis deux ans. D'après le colonel Santo Domic Chol, porte-parole adjoint des SPLA, les accusations lancées contre ses soldats sont mensongères. "C'est une campagne fabriquée contre les SPLA", a-t-il dit par téléphone à Reuters. "Ce que je sais, c'est que des bandits pillent et tuent la population de Pajok depuis vendredi, samedi", a-t-il poursuivi. Mais les témoignages des réfugiés recueillis au poste frontalier de Ngomoromo incriminent les soldats gouvernementaux. L'un d'eux, un paysan du nom de Password Okot, dit ainsi avoir vu, alors qu'il était caché, des soldats égorger un de ses frères et en abattre un autre à Ywayaa, un faubourg de la ville. Deux autres réfugiés disent avoir vu des soldats des SPLA envahir l'hôpital de la ville et tuer un médecin qui tentait de s'interposer. Quatre autres personnes auraient été tuées dans le bâtiment. Des enfants auraient également été visés alors qu'ils prenaient la fuite. Deux sont tombés sous les balles, dit un réfugié, deux autres ont été mortellement renversés par une voiture qui les avait pris en chasse. L'attaque contre Pajok est la dernière en date d'une série d'opérations menées dans la région d'Equatoria, dont les villes et villages se vident progressivement de leurs habitants à mesure de l'exode vers l'Ouganda voisin. Au cours des neuf derniers mois, on estime que plus de 1,5 million de personnes ont ainsi franchi la frontière entre les deux pays. (Henri-Pierre André pour le service français)