Derrière "The Duke", l'histoire vraie et improbable du vol d'un Goya à la National Gallery de Londres

Jim Broadbent dans le rôle de Kempton Bunton dans
Jim Broadbent dans le rôle de Kempton Bunton dans

Jim Broadbent dans le rôle de Kempton Bunton dans "The Duke", au cinéma le 11 mai 2022 (Photo: Nick Wall)

CINÉMA - Dans les années 1960, l’histoire avait fait les gros titres de la presse anglo-saxonne, mais elle n’avait encore jamais été adaptée en film. C’est chose faite avec The Duke, dernier long-métrage du réalisateur Roger Mitchell (Coup de foudre à Notting Hill) décédé en septembre dernier, qui sort au cinéma ce mercredi 11 mai.

C’est le petit-fils du vrai Kempton Bunton qui a contacté la productrice Nicky Bentham pour lui raconter l’incroyable histoire de son grand-père, personnage excentrique et touchant à l’origine du vol du portrait du duc de Wellington de Goya, au petit matin du 21 août 1961 à la National Gallery de Londres.

Chauffeur de bus à la retraite (de taxi, dans le film), Kempton Bunton a déjà fait de la prison a deux reprises pour avoir refusé de payer les redevances de la BBC. Pour cet ancien combattant aussi marqué par le décès d’un de ses enfants, la télévision est un remède à la solitude des personnes âgées, et il milite pour qu’elles y aient accès gratuitement.

L’étonnante “rançon” du Goya

Lorsqu’en 1961, le gouvernement britannique dépense 140.000 livres (l’équivalent de 3 millions de livres aujourd’hui) pour garder ce tableau du maître espagnol dans ses collections plutôt que de le rendre aux États-Unis, Kempton Bunton enrage de voir autant d’argent dépensé à ce dessein.

Le vrai Kempton Bunton, ici en photo en 1965 (Photo: Mirrorpix via Getty Images)
Le vrai Kempton Bunton, ici en photo en 1965 (Photo: Mirrorpix via Getty Images)

Le vrai Kempton Bunton, ici en photo en 1965 (Photo: Mirrorpix via Getty Images)

Au lendemain de la disparition mystérieuse du Goya, volé dans la salle centrale de la National Gallery, l’agende de presse Reuters reçoit une étonnante demande de “rançon”: si 140.000 livres sont versées à une œuvre de charité visant à payer les redevances télé des citoyens les plus pauvres, et que l’auteur du vol est amnistié, le chef-d’œuvre sera rendu. Mais la requête n’aboutit pas.

“Pour nous, le vrai charme du film c’est Kempton, assurent les scénaristes dans les notes de production. Même si la réalité n’a cessé de le contredire, il était réellement convaincu qu’il pouvait changer le monde et améliorer le comportement de son prochain. Cette conviction est profondément ancrée chez lui depuis l’enfance et n’a jamais été ébranlée.”

Un homme avec un cadre emballé lors de l'enquête des détectives de Scotland Yard à la National Gallery, peu après le vol en 1961 (Photo: Keystone via Getty Images)
Un homme avec un cadre emballé lors de l'enquête des détectives de Scotland Yard à la National Gallery, peu après le vol en 1961 (Photo: Keystone via Getty Images)

Un homme avec un cadre emballé lors de l'enquête des détectives de Scotland Yard à la National Gallery, peu après le vol en 1961 (Photo: Keystone via Getty Images)

Alors que toutes les polices de Grande-Bretagne sont à la recherche de l’auteur de ce vol - qu’ils prennent pour un casseur de haut vol - pendant plus de quatre ans, Kempton Bunton finit par rendre le tableau en 1965 en le déposant dans une consigne à bagages. Et de se rendre à la police quelques semaines plus tard.

Lors du procès de ce Robin des bois moderne largement suivi et soutenu par le peuple britannique - ces séquences avec des extraits des transcriptions originales sont particulièrement croustillantes dans le film -, Kempton Bunton est condamné (à trois mois de prison)... mais seulement pour le vol du cadre du tableau qui, lui, n’a jamais été rendu!

Si le retraité est mort dans l’anonymat en 1976, un nouveau rebondissement change quelques lignes de cette histoire une vingtaine d’années plus tard - mais on préservera là le suspens à ceux qui iront voir le film. Porté par l’acteur Jim Broadbent qui incarne ce héros délicieusement british, aux côtés de sa femme jouée par la brillante Helen Mirren, The Duke est une jolie fable pleine d’optimisme et de naïveté aussi qui fait du bien au moral.

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Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.