Désigner l’adversaire

Le salafisme jihadiste, voilà l’ennemi. Si besoin en était, nos enquêtes sur les réseaux islamistes montrent bien que la violence insensée dont usent les assassins de France, de Tunisie, de Syrie ou d’Irak dérive d’un schisme interne à l’islam. Sectaire, archaïque, opposé aux interprétations majoritaires, le fondamentalisme, qu’on présente parfois comme une simple opinion plus ou moins folklorique, porte la violence comme la nuée porte l’orage. Le mal-être des banlieues, la discrimination ou le chômage, maux cardinaux de la société française, sont des facteurs aggravants. Ils fournissent aux prêcheurs fanatiques un vivier de recrutement. Mais ils ne sont en rien la cause première du terrorisme. C’est la faveur dont jouit l’interprétation littérale des textes islamiques et l’utopie à la fois meurtrière et délirante d’un retour à la pureté originelle qui nourrissent la radicalisation de milliers de jeunes. Dans ces conditions, l’attaque indistincte contre les musulmans, dont certains courants politiques ont fait leur cheval de bataille, tombe à plat.

Au contraire, elle facilite la tâche des rabatteurs de l’ombre. Il faut désigner l’adversaire et l’isoler : c’est le bon sens même. Aucune indulgence, aucune naïveté dans cette ligne de conduite : le fanatisme doit être détecté, recherché, étroitement surveillé, combattu sans relâche. Expulser des Français de naissance ? Fermer des mosquées ? Ces moyens sont frustes, souvent illégaux et au bout du compte inopérants. C’est l’alliance des moyens politiques - favoriser un islam européen intégré dans la cité - et policiers - accroître les moyens, infiltrer les réseaux, exercer une vigilance extrême dans le cadre des lois républicaines - qui donne la clé du problème. Sauf à s’étourdir de slogans vengeurs et inefficaces.



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