Crispr-Cas9 : coupure à vif dans le vivant

En une décennie, l'outil capable de couper l'ADN s'est répandu dans les labos du monde entier. Rapide, peu chère et diablement efficace pour inactiver ou remplacer un gène, cette technologie ouvre des perspectives infinies… et suscite son lot de controverses.

Cet article est issu du magazine Les Indispensables de Sciences et Avenir n°216 daté janvier/ mars 2024.

Sous la plume des journalistes comme dans la bouche des biologistes, un adjectif revient immanquablement lorsqu'on évoque la jeune technologie Crispr-Cas9 : "révolutionnaire". Il faut dire que depuis sa mise au point en 2012, cet outil a permis d'innombrables prouesses, en recherche fondamentale comme en agronomie ou en médecine, en passant par la très décriée naissance des premiers "bébés OGM".

Si l'outil n'a qu'une dizaine d'années, ses origines remontent à 1987, lorsqu'une équipe japonaise découvre de courtes séquences d'ADN répétées dans le génome d'une bactérie. Les décennies qui suivront seront le théâtre d'une minutieuse enquête autour du rôle de ces séquences, par la suite appelées Crispr. Première surprise : chez de nombreuses bactéries, elles entourent des portions d'ADN issues de virus. On découvre également qu'un type de protéine capable de couper l'ADN leur est généralement associé, protéine qui prendra le nom de Cas, pour "Crispr Associated Protein".

Au fil des années, le système Crispr-Cas se dévoile comme un ingénieux mécanisme immunitaire bactérien : lorsqu'une bactérie est infectée par un virus, elle intègre des séquences d'ADN de ce dernier. Lors d'une nouvelle infection par le même virus, le système reconnaît son ADN et y envoie la protéine Cas qui coupe la séquence virale, stoppant l'agresseur.

L'outil se charge même de recoller les morceaux

La dernière brique de l'enquête prendra la forme d'une publication parue dans la revue Science en 2012, qui offrira à ses deux auteures principales, la Française Emmanuelle Charpentier et l'Américaine Jennifer Doudna, le prix Nobel de chimie en 2020. "Cette étude a montré que le système utilisant la protéine Cas9, plus simple que ceux utilisant d'autres protéines Cas, pouvait être détourné pour couper in vitro n'importe quelle séquence ADN, résume Carine Giovannangeli, directrice de recherche dans l'unité[...]

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