Créer un État palestinien est indispensable, selon les ministres des Affaires étrangères de l'UE
Les diplomates européens sont en désaccord avec les propos du Premier ministre israélien. Benjamin Nétanyahou a réaffirmé au cours du week-end son opposition à la création d'un État palestinien après la guerre. Il balaye ainsi les pressions de l'Occident en faveur d'une solution à "deux États".
Les propos du responsable israélien ont fait réagir les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne lors de leur arrivée lundi à Bruxelles. Ils affirment que la création d'un État palestinien devait faire partie des futures négociations de paix.
"Les déclarations de Benjamin Nétanyahou sont inquiétantes", explique Stéphane Séjourné, ministre français des Affaires étrangères, à la presse avant la réunion avec ses homologues. "Nous avons besoin d'un État palestinien avec des garanties de sécurité pour tous".
L'Irlandais Micheál Martin qualifie les propos de Benjamin Nétanyahou d'"inacceptables". Il appelle le dirigeant israélien à "écouter la grande majorité du monde qui veut la paix et qui veut la solution des deux États (...) la garantie ultime de sécurité pour Israël et pour les citoyens israéliens".
"Les Palestiniens ne peuvent vivre dans la dignité, la sécurité et la liberté que si Israël vit dans la sécurité. C'est pourquoi la solution à deux États est la seule solution et ceux qui ne veulent pas en entendre parler n'ont pas encore proposé d'autre alternative", ajoute l'Allemande Annalena Baerbock.
Son homologue autrichien, Alexander Schallenberg, considéré comme l'un des plus fidèles alliés d'Israël, qualifie les déclarations de Benjamin Nétanyahou de "myopes", défendant le droit des Palestiniens à l'autodétermination comme la "seule solution".
"Ni les Israéliens, ni les Palestiniens ne disparaîtront dans la nature. Ils devront tous deux vivre côte à côte dans cette région", ajoute-t-il.
Le Letton Krišjānis Kariņš va même plus loin et demande à l’UE d’utiliser son levier économqiue pour obtenir des concessions de la part d'Israël.
"Le plus grand levier de l'Europe a toujours été son portefeuille", insiste le chef de la diplomatie lettonne. "L'Union européenne dispose d'un soutien financier incroyable qui circule dans tous les sens. Nous voyons que dans la politique interne de l'UE, l'argent peut aider à focaliser les esprits, et je pense que nous devrions commencer à penser à cela au niveau international."
S'adressant à Euronews lundi, le ministre palestinien des Affaires étrangères, Riyad al-Maliki, dénonce "l'impunité" de Benjamin Nétanyahou. Mais elle met en doute la capacité des 27 à faire avancer la question.
"Je ne pense pas qu'ils (les ministres de l'UE) puissent vraiment offrir plus que des condoléances", indique Riyad al-Maliki. "Oui, ils ont essayé, mais puisque la guerre continue et que le massacre continue vraiment, alors (...) je pense qu'ils ne pourront pas obtenir beaucoup en termes d'implication de leur part", poursuit-il.
Riyad al-Maliki et son homologue israélien, Israël Katz, ont tous deux participé à des discussions avec les ministres des Affaires étrangères de l'UE, mais il n'est pas prévu qu'ils se rencontrent.
Dans ses remarques aux journalistes, le chef de la diplomatie israélienne a refusé de commenter le rejet controversé de la solution à deux États par son Premier ministre et a concentré sa brève intervention sur la libération des otages.
Les ministres des Affaires étrangères de l'Égypte, de la Jordanie et de l'Arabie Saoudite seront également présents à la réunion de lundi. Les discussions portent sur une feuille de route en dix étapes présentée par Josep Borrell, responsable de la politique étrangère de l'Union européenne, qui vise à rallier l'UE et d'autres acteurs internationaux clés autour d'un plan commun destiné à mettre fin aux hostilités dans la bande de Gaza, à créer un État palestinien indépendant et à instaurer une sécurité à long terme dans la région.
Le ministre jordanien, Ayman Safadi, a également critiqué avec force la position israélienne, qu'il qualifie de "programme raciste radical", et soutient la perspective de sanctions ciblées pour faire pression sur Israël.
"Israël, avec son agression actuelle de Gaza (...) condamne l'avenir de la région à davantage de conflits et de guerres", a expliqué le chef de la diplomatie jordanienne. Il ajoute que le monde devrait prendre des "mesures" à l'encontre d'Israël en tant que "partie qui nie le droit de la région à vivre en sécurité".
La guerre dans la bande de Gaza a fait plus de 25 000 morts, selon le ministère de la Santé dirigé par le Hamas.
Alors que les combats se concentrent à Khan Younis, la principale ville du sud de l’enclave palestinienne, les craintes d'un débordement régional sont toujours présentes, car les renseignements indiquent que les rebelles houthis, soutenus par l'Iran, cherchent à se procurer davantage d'armes pour intensifier leurs attaques contre les navires commerciaux naviguant dans la mer Rouge.
Sanctions contre les colons et mission en mer Rouge à l'ordre du jour
Les 27 ministres des affaires étrangères devraient également discuter des projets de l'UE de sanctionner les colons israéliens responsables d'attaques dans les territoires palestiniens occupés de Cisjordanie, à l'instar des États-Unis et du Royaume-Uni.
Vendredi, l'Union européenne a mis en place un nouveau cadre de sanctions visant directement les personnes qui soutiennent le Hamas et le Jihad islamique palestinien, désignés comme organisations terroristes par l'UE.
Elle a également sanctionné six autres personnes responsables d'avoir "apporté un soutien financier au Hamas", qui feront désormais l'objet d'un gel de leurs avoirs et d'une interdiction de voyager dans l'UE.
Le ministre tchèque des Affaires étrangères, Jan Lipavský, assure toutefois qu'il n’est pas au courant qu'une proposition visant à sanctionner les colons israéliens était "sérieusement sur la table de l'UE".
Selon des sources diplomatiques, les discussions sur les mesures à l'encontre des colons israéliens sont moins avancées et il est peu probable qu'elles soient approuvées séparément.
Le ministre irlandais des Affaires étrangères, Micheál Martin, précise qu'"un ou deux pays" s'opposaient à de telles sanctions et s'est engagé à "faire pression très fortement" pour que ces capitales se rallient au projet.
"Je m'entretiendrai avec ceux qui pourraient avoir des réserves afin d'insister sur une politique de sanctions à l'échelle de l'UE en ce qui concerne ce qui se passe en Cisjordanie, car cela crée également d'énormes tensions", Micheál Martin.
L'UE envisage également d'envoyer une mission navale pour patrouiller en mer Rouge, où des navires européens ont été attaqués par des rebelles houthis soutenus par l'Iran au cours des dernières semaines.
Selon un document vu par Euronews, l'Union envisage d'envoyer au moins trois navires de guerre qui, selon des sources diplomatiques, devraient provenir d'Allemagne, d'Italie et de France. La Belgique s'est également engagée à envoyer sa propre frégate dans le cadre de la mission de l'UE, selon les médias locaux.