Covid: Le port du masque a empêché des contaminations, mais combien?

Alors que l'on s'apprête à tomber le masque, l'heure est au bilan chiffré. Quelle efficacité sur le terrain aura eu ce symbole de la lutte contre la pandémie?

CORONAVIRUS - C’est le grand jour. Ce lundi 14 mars, c’en est fini des masques à l’intérieur, à quelques notables exceptions près. Bien plus qu’une gêne depuis le début de la pandémie de Covid, ces protections contre les gouttelettes et la contamination aérosol sont devenues un symbole de la vie “avec le virus”. Mais que leur doit-on vraiment?

Dans leur aspect quantitatif, l’effet des masques n’a rien de simple à estimer, tant la contamination par Sars-CoV-2 peut dépendre de facteurs multiples. Cliniquement en revanche, l’efficacité des masques pour faire barrage à la maladie est depuis longtemps une chose entendue.

Bien sûr, la protection apportée dépend de la matière dont est composé le masque, ainsi que de la façon dont il est porté. Mais une chose est claire, que les recherches n’ont cessé de confirmer depuis 2020: le masque “fonctionne”. Une étude récente parue dans la revue Pnasindique que le risque de contamination entre deux personnes se parlant sans masque (quand l’une d’elles est malade) atteint les 90% au bout d’une heure. Ce risque tombe à 30% si les deux personnes portent un masque chirurgical...et à 0,4% si elles sont munies d’un masque FFP2.

La valeur clinique face au virus n’a donc plus à être démontrée, mais qu’en est-il de l’effet mesuré sur le terrain des masques? Ont-ils été une arme décisive dans cette bataille que l’on espère voir toucher à sa fin? Des éléments de réponse existent, bien qu’ils soient à prendre avec un certain recul.

Nombre des hospitalisations divisé par deux

Des recherches sur le terrain ont en effet eu lieu dès la première année de la pandémie, pour tenter d’évaluer la valeur des obligations du port du masque, notamment dans les magasins, sur le lieu de travail ou à l’école. Ainsi, une étude allemande parue également dans Pnas a comparé dès le mois de décembre 2020 l’évolution de la maladie dans les différentes régions d’Outre-Rhin, en fonction du moment ou le port du masque y a été généralisé.

Les conclusions sont impressionnantes: les auteurs y voient une diminution allant de 47% à 70% de cas d’infections par le Covid. Autrement dit, la généralisation du masque serait une véritable cassure dans la dynamique épidémique. On se souviendra, à ce sujet, que l’Allemagne faisait à ce moment-là figure d’exception en Europe, avec un nombre très bas de malades en comparaison du reste de l’Europe de l’Ouest. Il faut également se rappeler qu’il s’agissait alors de la souche Alpha du virus, moins contagieuse que son descendant, Omicron.

Pour juger de l’efficacité du masque face à ce dernier variant, il faut se reporter cette fois à une analyse américaine récente, parue le 9 mars 2022 dans la revue American Academy of Pediatrics. Les chercheurs de l’université de Duke, en Caroline du Nord, ont comparé les États imposant le port du masque à l’école et ceux laissant élèves et professeurs libres de le mettre. Et là encore, pas de débat possible: sur une population étudiée de plus d’un million de personnes, le risque de transmission par une personne contaminée fut entre 3 et 4 fois plus faible dans les États masqués.

Une seconde analyse, toujours aux États-Unis, s’étend cette fois à toute la population pour tenter une estimation: et si jusqu’au 1er juillet 2022, date à laquelle 80% des Américains devraient être vaccinés, perdurait l’obligation de porter le masque? La question est d’importance, alors que des deux côtés de l’Atlantique, les restrictions sont en train d’être levées. Encore une fois, pas de place pour le doute. La modélisation, parue dans la revue The Lancet, prévoit que le nombre des hospitalisations pour Covid serait divisé par deux!

En France, une estimation risquée

Bien que rigoureusement chiffrées, ces analyses présentent bien sûr d’importantes limites, soit par leur ampleur, soit tout simplement par leur méthode. Il ne s’agit pas ici d’études de cohorte avec un groupe de contrôle qui permette de comparer, à conditions égales, une population portant un masque et une de taille équivalente n’en portant pas. Il existe pourtant une étude de la sorte, parue en septembre 2021.

Rapportée par le journal Nature, la recherche a porté sur 350.000 habitants du Bangladesh, avec un groupe portant le masque à 13,3%, et l’autre à 42,3%. Dans ce dernier groupe, le nombre de personnes symptomatiques était inférieur de 9,5%. Un chiffre, obtenu cette fois dans les conditions d’une étude de cohorte randomisée, qui montre que le port du masque a un impact évident sur le terrain.

Cela ne dit pas combien de cas ont été évités dans l’hexagone. Mais il faut ici une prudence particulière. Les estimations les plus fines, celles fournies par l’Institut Pasteur, estimaient en juillet 2021 que l’ensemble des gestes barrière, s’ils étaient abandonnés, augmenterait de 10 à 40% sur le nombre des contaminations par le Covid-19.

Cela signifierait alors que le total du nombre total du nombre de personne ayant contracté le Covid ne serait plus de 23 millions, mais entre 26 et 33 millions. Avec un important détail cependant: ces mesures incluent également la distanciation sociale, le lavage de mains, l’aération... Car en France, comme ailleurs, le masque a toujours fait partie d’une politique globale. C’est ce qui le rend à la fois symbolique de la vie en temps de pandémie, sans que l’on puisse avec une absolue précision sur les chiffres en pointer les effets.

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Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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