Covid-19 : la pandémie est elle "terminée", comme le dit Joe Biden ?

Photo d'illustration (Photo by Evan Vucci - Pool/Getty Images)
Photo d'illustration (Photo by Evan Vucci - Pool/Getty Images)

Le président américain a fait une sortie très commentée sur la chaîne CBS pour l’émission 60 minutes.

Joe Biden est en train de tourner la page du Covid. Le président américain a affirmé sur CBS que selon lui, la pandémie est terminée, même s'il a reconnu avoir "encore un problème avec le Covid". Pour appuyer son argumentaire, le président des États-Unis a lancé : "Si vous regardez autour de vous, personne ne porte de masque, et tout le monde a l’air en plutôt bonne forme. Donc je pense que c’est en train de changer".

Mais l'assertion de Joe Biden est-elle vraie ? Si l'on s'en réfère à la définition proposée par le site Ameli, une pandémie, c'est "une infection qui part d’une zone localisée puis s’étend au monde entier. Il peut y avoir des pandémies limitées dans le temps, ou des pandémies qui durent très longtemps (pandémie liée au VIH depuis plus de 30 ans par exemple)", illustre le site.

Un message "contre-productif, tout particulièrement avant l'hiver"

Du côté des experts, la sortie du président américain ne convainc pas vraiment. "Il n'y a pas de réponse scientifique ou épidémiologique sur la définition de sortie d'une pandémie. On peut peut-être considérer que la pandémie sera terminée lorsqu'on arrêtera de parler de l'impact du Covid dans nos vies, ce qui n'est pas le cas", estime l'épidémiologiste Antoine Flahault, pour qui le message de Joe Biden "est contre-productif, tout particulièrement avant l'hiver, car si on ne prend pas de mesures particulières comme porter un masque, faire une dose de rappel, on continuera à avoir une mortalité élevée".

Selon les chiffres officiels, on recense plus de 400 morts par jour liés au Covid aux Etats-Unis. Une mortalité rapportée à la population qui reste importante, tout comme au Japon, au Brésil ou en France.

Morts par million d'habitants en France, au Japon, au Brésil et aux Etats-Unis.
Morts par million d'habitants en France, au Japon, au Brésil et aux Etats-Unis.

"La page des restrictions est tournée"

"Il y a plusieurs façons de sortir de la pandémie de Covid : une suppression du virus, via le progrès scientifique, avec un vaccin qui empêcherait la transmission par exemple, ou une amélioration de la qualité de l'air pour lutter contre la contamination, ou une évolution du virus qui deviendrait bénin. Mais c’est de la science-fiction pour l’instant…", complète le docteur Michaël Rochoy, chercheur en épidémiologie.

Si les propos de Joe Biden sont réfutés par Antoine Flahault d'un point de vue purement épidémiologique, il reconnaît une part de vérité dans le discours du président. "Ce qui est vrai dans ce que dit Joe Biden, c'est qu'il n'y a plus de couvre-feu, de confinement dans les sociétés démocratiques, il n'y a plus de conseil de défense dédié au Covid en France. Donc peut-être que pour les politiques, la page du Covid est tournée", concède Antoine Flahault. "Mais peut-on dire que 'c'est terminé', avec plus de 200 000 morts depuis le début de l'année aux Etats-Unis, et plus de 30 000 en France ?", s'interroge l'épidémiologiste, alors que s'amorce en France une huitième vague, et que les vagues font environ 10 000 décès chacune.

D'une pandémie à une endémie ?

Si Joe Biden parle de la fin de la pandémie, il n'est pas le seul. La semaine dernière, le patron de l'Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, avait indiqué que "nous n'avons jamais été dans une meilleure position pour mettre fin à la pandémie" à condition de maintenir les efforts en place. "Si nous ne saisissons pas cette opportunité, nous courrons le risque d’avoir plus de variants, plus de morts, plus de perturbations et plus d’incertitude", a-t-il mis en garde lors d'un point presse.

"Si nous sortons d'une pandémie, dans le sens où le Covid ne progresse plus significativement et a touché tous les continents, nous allons entrer en phase d'endémie. C'est-à-dire lorsqu'une maladie est connue, identifiée mais cela ne signifie ni qu’elle est en progression, ni qu’elle se répand. Ce n'est pas pour autant une bonne nouvelle car la mortalité ne diminue pas nécessairement en passant d'une pandémie à une endémie", prévient le docteur Michaël Rochoy.

La huitième vague en approche

"Le risque, si les politiques décident de tourner la page du Covid, c'est que cette maladie reste parmi les toutes premières causes de décès. Cela dépendra de ce que les dirigeants jugent acceptables. Si, pour prendre l'exemple de la France, 40 000 morts par an sont acceptables, alors la page sera tournée", estime Antoine Flahault.

En France, le taux d'incidence a sensiblement augmenté ces derniers jours, avec plus de 28 300 nouveaux cas en moyenne chaque jour, soit des contaminations en hausse de 58% en l'espace de seulement une semaine.

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