Covid-19 : le débat sur l'espacement entre les deux doses de vaccin relancé ?

Photo d'illustration

Fin janvier, le gouvernement avait écarté l'idée d'espacer davantage les doses de vaccin Pfizer, évoquant le manque de données sur la durée de la protection fournie par la première dose.

Allonger le délai entre les deux doses de vaccin pour vacciner davantage de personnes rapidement mais partiellement. L'hypothèse, pour combler le manque de vaccin pour l'ensemble de la population, avait été évoquée en janvier dernier et balayée par le gouvernement. Une question qui se pose surtout pour les vaccins Pfizer et Moderna, dont les deux doses doivent être espacées de 21 à 28 jours, tandis que les deux doses du vaccin AstraZeneca sont espacées de 9 à 12 semaines.

Alors que la Haute Autorité de Santé estimait que le temps entre les deux doses pouvait aller jusqu'à 42 jours, les autorités ont tranché. "Nous n'avons aucune information disponible sur l'efficacité dans la durée d'une première dose", expliquait en janvier Alain Fischer, le "monsieur vaccin" du gouvernement.

La crainte d'un "terrain favorable" à l'émergence d'un nouveau variant

L'Académie de médecine avait de son côté mis en avant un risque d'offrir "un terrain favorable" à l'émergence de nouveaux variants du coronavirus "échappant à l'immunité induite par la vaccination". "Nous sommes face à une part d'inconnu, je fais le choix de la sécurité des données validées", avait conclu Olivier Véran, suivant l'avis du professeur Fischer, pour maintenir une stratégie suivant les recommandations du fabricant, avec un délai maintenu à 21 à 28 jours entre deux doses.

Mais depuis le mois de janvier, de nouveaux éléments sont venus balayer les deux arguments sur lesquels se basaient les craintes de l'exécutif. Dans un article publié dans la revue scientifique Nature, des chercheurs mettent en avant les avantages d'une stratégie soit d'espacement des doses, soit d'injection de demi-doses de vaccin, afin de vacciner davantage de personnes plus rapidement, mais partiellement.

Des vaccins efficaces dès la première dose

Selon les données de Moderna et Pfizer, deux semaines après la première dose, le vaccin est efficace à 92,1% et 92,6% contre les formes graves. Les données de la vaccination menée en Israël montrent également qu'une dose de Pfizer réduit les infections symptomatiques et toutes les infections documentées, respectivement, de 57% et de 46%.

Or, écrivent les chercheurs, "tant qu'une dose unique a plus de la moitié de l'efficacité contre la maladie par rapport à deux doses, la couverture plus élevée de la population via des schémas à dose espacée devrait protéger davantage de personnes contre les infections cliniques, l'hospitalisation et le décès".

Une dose de vaccin permet de réduire la transmission du virus

Autrement dit, pour lutter contre l'épidémie à court terme et optimiser le nombre de doses disponibles, il est préférable de ne faire que des primo-injections et de repousser les secondes doses à plus tard, afin de protéger, même partiellement, un maximum de personnes.

D'autant que, ajoutent les chercheurs, cette vaccination même partielle, peut permettre de réduire la transmission du virus, et donc sa circulation dans la population. Ainsi, les données de Moderna montrent que la première dose a réduit la positivité de la PCR nasopharyngée de 61,5%, tandis que les données de Pfizer en Israël montrent également que la première dose contribue à réduire la transmission du virus.

Le pari gagnant de la Grande-Bretagne ?

Ce qui permet également aux chercheurs d'écarter l'autre crainte liée à cette stratégie, celle de favoriser l'apparition d'un variant plus résistant au vaccin. Allonger le délai entre la première et la seconde dose "n'augmentera pas nécessairement le risque d'échappement au vaccin et pourrait même le réduire", écrivent les chercheurs dans Nature. Si pour eux le risque existe, la stratégie d'espacer les deux doses permet de réduire le risque d'apparition d'un variant résistant au vaccin en réduisant la circulation du virus dans la population.

La Grande-Bretagne a choisi cette stratégie, en espaçant de 12 semaines les deux doses, pour les vaccins Moderna, Pfizer et AstraZeneca, afin de se concentrer sur les premières injections. 46,5% de la population a reçu au moins une dose de vaccin, mais seulement 8% de la population est totalement vaccinée. Une stratégie qui a été critiquée mais qui semble payante. La vaccination, associée à un confinement, a permis au pays de drastiquement réduire la circulation du virus, et de préparer le déconfinement. Les terrasses doivent rouvrir le 12 avril en Grande-Bretagne.

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