Dans les coulisses de la qualification de l'OM pour les demi-finales de Ligue Europa
Les bonnes prédictions de Jean-Louis Gasset, en grillant une petite cigarette… La scène se passe mercredi après-midi, et ce petit moment de vie olympienne est savoureux a posteriori: après sa conférence de presse de veille de match, nous apercevons l’entraîneur de l’OM dans les coursives du Vélodrome, prêt à retourner en voiture à la Commanderie. Un petit échange s’installe, détendu, sympathique et informel.
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La confession de Gasset, mercredi: "On peut se qualifier sur un coup d’embrouille!"
Gasset, la clope au bec, parle des centaines de minots avec qui il a posé en photo dimanche, lors d’un entrainement ouvert aux familles et enfants. Il nous raconte n’avoir jamais connu une telle ferveur. Il nous écoute parler de la vie à Marseille, de notre métier de journaliste, de tout et de rien. La conversation se termine, et nous lui souhaitons juste "Bon match pour jeudi, coach!". Gasset répond d’un ton sec: "Bah non, pourquoi? On n’est pas obligé de faire un bon match pour se qualifier! On peut faire un match pourri, montrer du caractère, marquer un but, et se qualifier sur un coup d’embrouille! Allez, bonne fin de journée."
Samuel Gigot prend le mégaphone virage sud
Il avait donc tout prévu, et déjà tout vu. Plus que jamais, l’OM a dû souffrir pour vivre ces émotions, et ce scénario intense, Amine Harit versant même quelques larmes… devant le banc, en pleine séance de tirs au but. Quand Luis Henrique envoie tout Marseille en demi-finale de Ligue Europa, le Vélodrome s’enflamme, et les joueurs avec.
Samuel Gigot, qui était en tribunes il y a 20 ans lors du quart de finale de Coupe de l’UEFA contre l’Inter Milan, prend le mégaphone du capo des Ultras, en bas du virage sud. Le capitaine lance un "Aux armes", repris en cœur par les supporters et les autres joueurs, tous en transe à ses côtés. Le tour d’honneur est vibrant. Le retour au vestiaire, émouvant.
Boli prend Balerdi dans ses bras, Papin embrasse Mbemba
A l’entrée du tunnel, le président Pablo Longoria et son conseiller Medhi Benatia, attendent les joueurs pour les embrasser et les féliciter. Fabrizio Ravanelli, souvent dans la délégation olympienne en Coupe d’Europe, ou encore Jean-Pierre Papin et Basile Boli sont également là. Ce dernier prend Leo Balerdi dans ses bras, pendant que JPP partage sa joie avec Chancel Mbemba.
"La vie est belle, la vie est belle!", n’arrête pas de crier l’entraineur des gardiens, Jon Pascua, dans les couloirs. Amine Harit débarque dans le couloir en criant: "Oh pu…, on est des fous, c’est un truc de malades!" Les blessés ou les Olympiens non qualifiés pour la Ligue Europa sont tous là: Valentin Rongier, Quentin Merlin, Jonathan Clauss, Ulisses Garcia, Pape Gueye, liste non exhaustive.
Raimane Daou… lance le cri de guerre
Comme un symbole, c’est Raimane Daou, l’un des deux minots lancés dans le grand bain par Jean-Louis Gasset, qui entame le cri de guerre, poursuivi ensuite par Harit. Les Olympiens, chantent, sautent et dansent. Daou, Lafont, M’Mmadi, Abdallah, les minots sont dans la place, et ils vivent un rêve éveillé. L’ambiance est à la hauteur du soulagement et du scénario improbable de cette rencontre, dans laquelle l’OM a tardé à faire la différence, avant de devoir tenir au forceps pour arracher la séance de tirs au but, avec Luis Henrique latéral, Gaël Lafont et Daou au milieu de terrain, Amir Murillo épuisé, et Jordan Veretout sur une jambe.
Les tauliers prennent aussi la parole. Pierre-Emerick Aubameyang prévient qu’il faut maintenant "aller au bout" et qu’une demi-finale de Coupe d’Europe n’est rien s’il n’y a pas de trophée à la fin. Samuel Gigot nourrit même quelques regrets et glisse que la saison aurait pu être bien plus réussie, s’il y avait toujours eu "ce caractère, cette volonté et cette application".
Longoria a aimé "ce sens du sacrifice"… mais "rien n’est encore gagné"
C’est d’ailleurs le sens du discours que va tenir Pablo Longoria dans le vestiaire. Le président de l’OM, malgré sa connaissance du football, ne pourra jamais réussir à analyser cette saison improbable, irrationnelle. Longoria fait savoir aux joueurs qu’il a été "fier de leur attitude, du sens du sacrifice" mais aussi de la "rigueur et de la concentration" affichées pendant la séance de tirs au but. C’est le combat n°1 de Longoria et de Benatia: inculquer au sein du club des valeurs d’exigence et d’efforts de chaque instant. En voyant un Veretout aller au bout de lui-même malgré les crampes, des jeunes s’arracher sans trembler malgré l’enjeu ou des joueurs dépanner à des postes peu habituels pour eux, les dirigeants marseillais ont eu la sensation qu’une prise de conscience a eu lieu au sein de l’effectif et qu’un déclic a peut-être eu lieu… Mieux vaut tard que jamais.
Et surtout… "Rien n’est encore gagné, il faudra encore souffrir pour vivre ces émotions", prévient le Président olympien, qui rejoindra ensuite les salons du Vélodrome, pour dîner en famille et aux côtés de Jeff Ingram, l’un des bras droits de l’actionnaire. Frank McCourt a d’ailleurs appelé Longoria, après le match, pour adresser toutes ses félicitations aux joueurs, au staff et aux dirigeants. Ingram est d’ailleurs au centre Robert-Louis-Dreyfus ce vendredi pour échanger avec la direction de l’OM et transmettre aux équipes le soutien et l’implication de McCourt.
Gasset au vestiaire: "On continue d’écrire notre propre aventure"
La soirée a été intense en émotions, et dans ces cas-là… la sagesse et l’expérience de Jean-Louis Gasset l’amènent à prendre un peu de recul. Dès le dernier tir au but marqué par Luis Henrique, Gasset était retourné au vestiaire. Là aussi, l’envie d’une petite cigarette, dans un coin de son vestiaire… et rapidement, le besoin de partager ce moment avec les siens. "Je veux mes trois petits enfants!", prévient Gasset… avant d’aller rejoindre les joueurs dans l’euphorie du vestiaire. Ses deux petites filles et son petit-fils l’entendront remercier les joueurs "de n’avoir rien lâché et d’avoir été une vraie équipe!" Gasset est venu pour "kiffer" et vivre des émotions, il a été servi. "On sait souffrir, mais on continue d’écrire notre propre aventure", clame l’entraineur de l’OM… qui confiait dans la nuit mettre énormément de temps pour redescendre en tension et savourer.
Des blessures à soigner, un calendrier de matchs à assumer, une pression qui doit vite retomber… le staff de l’OM a vite basculé sur la suite. Gasset s’autorisera juste un petit verre de champagne avant de quitter le Vélodrome. Il n’y a encore rien à fêter, mais cette soirée était déjà pétillante.