Corrida : la Colombie l’interdit, où en est la France ?

La Colombie rejoint une longue liste de pays d'Amérique latine à interdire cette pratique, importée par les colons espagnols. En France, la situation est complexe.

La Colombie vient d'interdire la corrida (Photo d'illustration ALBERTO SIMON / AFP)
La Colombie vient d'interdire la corrida (Photo d'illustration ALBERTO SIMON / AFP)

Quel avenir pour la corrida ? Un nouveau pays, la Colombie, vient de l'interdire. Une majorité de pays où l'Espagne avait répandu cette pratique avait déjà pris la même décision, au moins partiellement. Avant la Colombie, le Chili, l'Argentine, l'Uruguay, le Paraguay et Cuba ont en effet planté la première banderille vers la fin du XIXe siècle en interdisant la corrida, qui avait été importée par les colons espagnols au XVIe siècle.

Puis d'autres pays d'Amérique latine ont emprunté la même voie, comme le Panama, en 2012. Dans d'autres pays, la fin de la corrida est plus progressive, avec des interdictions partielles comme au Mexique, où la capitale Mexico mais aussi cinq États ont interdit la corrida ou encore l'Espagne où la Catalogne les a interdites en 2010.

Au Portugal ou aux États-Unis, la corrida reste autorisée mais sans mise à mort, comme vous pouvez le voir sur la carte ci-dessous. Dans une grande majorité de pays du monde, la corrida, de tradition espagnole, n'est pas pratiquée.

En France, la situation est complexe. Officiellement, la corrida est interdite depuis la loi Grammont de 1850 interdisant les sévices aux animaux. Mais une exception est créée dans le code pénal en 1951, autorisant la corrida "lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être invoquée".

En 2000, la Cour d’appel de Toulouse est amenée à préciser les lieux où la corrida est légale. "Il ne saurait être contesté que dans le midi de la France, entre le pays d’Arles et le Pays basque, entre garrigue et Méditerranée, entre Pyrénées et Garonne, en Provence, Languedoc, Catalogne, Gascogne, Landes et Pays basque, existe une forte tradition taurine qui se manifeste par l’organisation de spectacles complets de corridas de manière régulière", écrivaient les juges.

On peut donc voir aujourd'hui des corridas à Béziers, Bayonne ou Arles par exemple, alors même qu'elles sont interdites dans d'autres villes françaises. Une exception qui semble toutefois menacée à plus ou moins long terme.

Ces dernières années, les initiatives pour interdire la pratique se multiplient, sur fond de soutien populaire puisque 77% des Français se déclaraient en faveur de la suppression de cette pratique dans un sondage Ifop de février 2022.

En septembre 2013, les deux coprésidents du groupe Europe Ecologie-Les Verts (EELV) à l’Assemblée nationale, Barbara Pompili et François de Rugy, déposaient une proposition de loi afin de retirer l’exception accordée à la corrida. Le texte ne sera finalement jamais examiné en séance publique.

En octobre 2021, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi sur la maltraitance animale, le groupe écologiste du Sénat dépose un amendement pour supprimer cette exception locale pour la corrida. Le gouvernement et la commission des affaires économiques émettent un avis défavorable et l'amendement est rejeté.

Plus récemment, en décembre 2022, le député LFI Aymeric Caron, défenseur de la cause animale, dépose une proposition de loi pour à son tour mettre un terme à l'exception dont bénéficient certains territoires.

Des élus de droite et d'extrême droite déposent alors plusieurs centaines d'amendements pour faire trainer les débats et empêcher l'examen de la proposition de loi, dans le cadre de la niche parlementaire de LFI. "Je dois bien me rendre à l'évidence. Nous ne pourrons pas abolir la corrida en France aujourd'hui", déplore alors le député insoumis, dénonçant "l'obstruction" de ses opposants. Il retire finalement sa proposition de loi, jurant de la redéposer dans les mois à venir.

Un texte qui avait fortement divisé les députés de tous les camps, seuls LR, favorable à la corrida, et EELV, opposés, ayant une position commune au sein de leur groupe, les autres formations politiques laissant le plus souvent la liberté de vote à ses membres. Emmanuel Macron s'était prononcé, estimant alors que ce texte n'était "pas la priorité du moment".