COP28 : les énergies renouvelables et le nucléaire face aux énergies fossiles
Au 3e jour de la conférence sur le climat à Dubaï, aucune avancée tangible n'est attendue pour sortir les énergies fossiles du mix énergétique.
Derrière les sourires de la photo de famille des dirigeants de la planète, les désaccords sur le pétrole restent profonds : après des dizaines de discours de dirigeants mondiaux à la tribune de la COP28 vendredi, le succès d'un grand accord pour rompre la paralysie climatique semble loin d'être acquis.
Les uns après les autres, présidents et monarques ont pris acte du climat extrême en train de conquérir la Terre et de l'apathie collective face au réchauffement.
Mais la plupart se sont contentés de répéter leurs engagements existants sur le climat, dont presque aucun n'est en ligne avec l'accord de Paris, sans que les opposants à une sortie des énergies fossiles n'annoncent de volte-face.
Le Premier ministre Narendra Modi, rappelant que l'Inde représentait "17% de la population de la planète" pour "4% des émissions mondiales", s'est ainsi lancé dans un plaidoyer des efforts de son pays d'1,4 milliard d'habitants, un "modèle pour le monde" dans l'équilibre trouvé "entre écologie et économie".
L'Inde vise la neutralité carbone en 2070, 20 ans après la plupart des pays riches, sommés par ailleurs par les experts de dépenser plus pour remplacer les hydrocarbures par de l'électricité propre et avancer encore cette date.
Emmanuel Macron a enjoint les pays riches du G7 à donner l'exemple et à cesser de brûler du charbon d'ici 2030, rappelant que la France fermerait ses dernières centrales au charbon, maintenues en activité avec la crise énergétique, avant 2027.
"La Terre en a ras-le-bol des accords sur le climat qui ne sont pas respectés", a tonné le président brésilien Lula, qui accueillera la COP30 dans deux ans.
La combustion du charbon, du pétrole et du gaz depuis le 19e siècle nous emmène vers un réchauffement invivable de près de 3°C d'ici 2100. Tout le CO2 généré est de très loin la principale source du réchauffement, mais jamais une COP n'a appelé à en sortir, tant cela implique de changements économiques et sociaux.
Comme un avertissement aux négociateurs pour les deux prochaines semaines, le président polonais, Andrzej Duda, a lancé à la tribune : "Sortir des énergies fossiles trop vite engendre une charge trop lourde pour la société".
Accord non contraignant sur les énergies renouvelables
En parallèle des discours des dirigeants, les hôtes émiratis ont catalysé de grandes annonces d'engagements non contraignants de pays, pour donner une impulsion positive aux négociations officielles, sous l'égide de l'ONU.
La plus attendue ce samedi était l'engagement de plus de 110 pays à tripler les capacités d'énergies renouvelables d'ici 2030, un objectif mondial qui apparaît désormais à portée de main, étant donné la croissance folle du solaire ces dernières années.
Une solution : le nucléaire ?
Une vingtaine de pays dont les États-Unis, la France et les Émirats arabes unis ont appelé samedi, dans une déclaration commune à la COP28, à tripler les capacités de l'énergie nucléaire dans le monde d'ici 2050, par rapport à 2020, pour réduire la dépendance au charbon et au gaz, grand enjeu de cette COP.
La Chine et la Russie, importants constructeurs de centrales nucléaires dans le monde aujourd'hui, ne comptent pas parmi les signataires.
Parmi ceux-ci figurent encore la Bulgarie, le Canada, la Finlande, le Ghana, la Hongrie, le Japon, la Corée du sud, la Moldavie, la Mongolie, le Maroc, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, la Suède, l'Ukraine, la République Tchèque et le Royaume-Uni.
"La déclaration reconnaît le rôle clef de l'énergie nucléaire dans l'atteinte de la neutralité carbone d'ici 2050 et pour conserver l'objectif de (limiter le réchauffement à) 1,5°C à portée de main", indique le texte.
"Nous savons par la science, la réalité des faits et des preuves qu'on ne peut pas atteindre la neutralité carbone d'ici 2050 sans nucléaire", a affirmé John Kerry lors de l'événement à Dubaï.
Le président roumain Klaus Iohannis a expliqué que le nucléaire représentait pour son pays "une source stable d'énergie contribuant à la sécurité énergétique et la décarbonisation".
Les pays signataires appellent également les actionnaires des institutions financières internationales - comme la Banque mondiale - à inclure le nucléaire dans leurs financements.
"Il existe des dispositions statutaires, parfois dans certaines institutions de crédit internationales, qui excluent le nucléaire. Je pense que ça, c'est complètement obsolète", avait déclaré un peu plus tôt à l'AFP le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi.
Ses promoteurs voient dans l'énergie nucléaire, modulable et qui n'émet quasiment pas de gaz à effet de serre, un moyen incomparable de produire une électricité vertueuse et abondante.
Certains défenseurs de l'environnement soulignent en revanche les risques d'accident, la question des déchets sur le très long terme ou encore les coûts élevés de l'atome.
D'ici la fin de la conférence prévue le 12 décembre, plus de 170 dirigeants sont attendus à la COP28.