Consignes contre les artistes du Sahel : la mise au point d’Emmanuel Macron et Rima Abdul-Malak

Interrogé sur les consignes passés à l’encontre des artistes en provenance du Mali, du Niger et du Burkina Faso, le président de la République Emmanuel Macron a fait une mise au point, évoquant une réponse juste face à la situation sécuritaire sur place. Un peu plus tôt, la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak en avait fait de même.
Interrogé sur les consignes passés à l’encontre des artistes en provenance du Mali, du Niger et du Burkina Faso, le président de la République Emmanuel Macron a fait une mise au point, évoquant une réponse juste face à la situation sécuritaire sur place. Un peu plus tôt, la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak en avait fait de même.

CULTURE - À son tour, il monte au créneau pour balayer les critiques. Alors que la décision du Quai d’Orsay de demander aux scènes culturelles subventionnées par l’État de ne relancer aucune coopération avec des artistes originaires du Mali, du Niger ou du Burkina Faso fait scandale dans le milieu artistique, Emmanuel Macron s’est livré à une mise au point ce vendredi 15 septembre, à l’occasion d’une prise de parole sur le thème de la préservation du patrimoine depuis la Collégiale Notre-Dame de Semur-en-Auxois, en Côte-d’Or.

« Lorsque l’on dit qu’il n’y aura pas de visa, et que l’on annule tous les événements qui auront lieu en France avec des artistes du Mali, du Burkina et du Niger, c’est faux », a lancé le chef de l’État en réponse à la question d’un journaliste. « La vocation de la France, c’est d’accueillir les artistes, les intellectuels et de pouvoir les faire rayonner en toute liberté », a-t-il ajouté, évoquant à ce propos plusieurs initiatives menées durant son mandat en lien avec l’activité artistique sur le continent africain, comme vous pouvez le voir ci-dessous.

« Des ennemis de la culture »

« Oui, nous avons bien stoppé les actions, mais au Sahel. Pas chez nous », a ensuite poursuivi Emmanuel Macron, insistant sur ce « distinguo ». Et d’expliciter : « Au Sahel (au Burkina, au Mali, au Niger), vous avez des putschistes qui aujourd’hui nous attaquent, attaquent la culture chez eux et ne nous permettent plus de le faire (soutenir la culture, ndlr). » À ce titre, il a notamment pris l’exemple du Mali où la junte au pouvoir a interdit tout soutien français à la culture ou encore celui du Burkina Faso où les institutions culturelles françaises ont été ciblées.

« C’est un devoir de réduire notre présence et de même stopper notre coopération », a-t-il encore insisté, citant en guise d’autre exemple le cas de l’ambassadeur français au Niger, empêché par les auteurs du coup d’État de sortir de son ambassade. « Comment voulez-vous que nous délivrions des visas ou que nous fassions de la coopération culturelle quand vous n’avez plus la possibilité, même en tant qu’ambassadeur, de sortir, qu’il est persona non grata et qu’on refuse qu’il puisse s’alimenter ? Il ne faut pas retourner la charge : la faute, c’est celle des putschistes. »

Et de conclure : « Vous avez au Mali, au Niger, au Burkina des ennemis de leur peuple, des ennemis de la liberté d’expression, des ennemis de la culture. »

Une première mise au point de Rima Abdul-Malak

Un peu plus tôt dans la journée, la ministre de la Culture s’était déjà justifiée sur le sujet en évoquant une « situation sécuritaire très, très spécifique, extrêmement dégradée ». Rima Abdul-Malak s’est en effet défendue, dans la matinale de RTL ce vendredi 15 septembre, de tout « boycott » contre les artistes originaires du Sahel.

« Je suis très attachée aux liens culturels qui existent depuis très longtemps entre ces pays et la France, entre tous les pays d’Afrique et la France », a exposé la ministre, comme vous pouvez le voir ci-dessous, ajoutant que ces liens avaient « même été intensifiés ». Et d’évoquer une situation uniquement conjoncturelle pour justifier le message envoyé par le ministère des Affaires étrangères aux institutions culturelles, demandant de ne plus inviter, ni financer des projets impliquant des ressortissants de ces trois pays du Sahel.

Interrogée sur le fait que la France n’ait jamais mis en place de mesures similaires à l’égard par exemple de la Russie, Rima Abdul-Malak s’est en effet opposée à toute idée de « boycott », insistant sur le fait qu’il s’agit d’une mesure circonstancielle face à la situation sécuritaire dans ces pays qui ont tous vécu des coups d’État ces derniers mois et années, en plus d’une forte poussée des jihadistes.

Une simple explication technique

« Dans ces pays, des bâtiments français ont été pris pour cible ; au Niger, l’ambassadeur est enfermé dans l’ambassade ; à Ouagadougou, l’institut français a été incendié par exemple… », a listé Rima Abdul-Malak, faisant valoir que « dans ces conditions, dans cette violence qui monte (...) la France a décidé de réduire ses équipes dans les ambassades et de fermer ses services (de délivrance) de visas ». Ce qui lui fait dire que « matériellement, il n’est pas possible de délivrer des visas pour des artistes, ou pour toute autre personne de ces pays qui ferait des demandes pour venir en France ».

« Il n’est pas question d’arrêter d’échanger avec des artistes, avec des lieux culturels, des musées, des festivals », a ajouté la ministre de la Culture, promettant qu’un messager serait envoyé dans la journée par ses équipes pour clarifier les consignes qui ont été passées par le Quai d’Orsay. « C’est juste qu’un nouveau projet de coopération qui démarrerait maintenant, c’est extrêmement difficile. Les conditions de mise en œuvre des projets sont extrêmement difficiles. »

« Je veux quand même préciser que pour les artistes qui ont déjà des visas, qui ont des tournées ou des spectacles prévus, ceux-là vont pouvoir venir comme prévu », a ajouté la ministre dans son interview à RTL, assurant en outre que les artistes « d’origine burkinabée, nigérienne ou malienne, mais qui vivent en France » ne sont « évidemment » pas concernés.

Quant à savoir si, au-delà de ces explications techniques, elle était embarrassée par l’image renvoyée par une telle situation, la ministre a promis que la France « continuerait » d’accueillir les artistes « en danger dans leur pays ». « C’est une adaptation à un contexte sécuritaire extrêmement dégradé », a-t-elle encore répété, rejetant une nouvelle l’idée d’un changement de doctrine par rapport au monde artistique.

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