Conditions météo, réchauffement climatique... Pourquoi les avalanches sont-elles si difficiles à prévoir?
Des drames qui se répètent, sans qu'on puisse les anticiper. Le monde de la montagne a été à nouveau endeuillé, dimanche 25 février, par la mort de quatre alpinistes, ensevelis dans une avalanche au-dessus de la station du Mont-Dore.
Les victimes étaient pourtant des personnes "aguerries" et "bien équipées", selon le préfet du Puy-de-Dôme Joël Mathurin. L'une d'elles était d'ailleurs guide de haute montagne.
Les sept alpinistes, dont trois sont revenus en vie, ont été surpris par "un glissement neigeux imprévisible" dans une zone de hors-piste. Les avalanches, si elles sont fréquentes à haute altitude, sont en effet difficiles à prévoir malgré les efforts de Météo-France pour informer le public.
Une surveillance intense de Météo-France
Chaque jour à 16 heures, de novembre à juin, l'institut météorologique publie pour chaque massif des bulletins d'estimation du risque d'avalanche. Ceux-ci sont réalisés à partir de plusieurs indicateurs comme les conditions météorologiques ou l'état du manteau neigeux, indique le site de Météo-France.
Le manteau neigeux, qui se définit par l'empilement de couches correspondant aux chutes de neige successives, est scruté de près par les quatre centres spécialisés d'études de la neige basés dans les Alpes du nord, du sud, dans les Pyrénées et en Corse.
Deux fois par jour, des pisteurs secouristes effectuent différentes mesures: température de l'air et de la neige, vitesse et la direction du vent, précipitations, qualité de la neige, etc. Toutes les semaines, une "coupe du manteau neigeux" est également réalisée, comment on peut le voir dans une vidéo (ci-dessous) publiée sur la chaîne YouTube de Météo-France.
Le but de l'opération est de "discerner les différentes strates de neige et déterminer si, au sein du manteau neigeux, on trouve une couche fragile" susceptible de déclencher une avalanche, y explique le nivologue Laurent Valbert. Une couche de neige friable, dont les flocons ne collent pas les uns aux autres, est par exemple particulièrement à risque.
Entre 1.600 et 3.100 mètres d'altitude, 29 stations automatiques (Nivôses) collectent également des informations dans les secteurs inaccessibles à l'observation humaine.
Un niveau d'alerte de 1 à 5
Toutes ces données, associées à des modèles de prévision numérique, alimentent les bulletins d'information et déterminent aussi un indice de danger avalanche. Adopté par tous les pays de l'arc alpin dès 1993, il compte cinq niveaux allant de 1 (risque faible), à 5 (risque très fort). Au moment du drame, ce dimanche, le risque d'avalanche était de niveau 3 dans le massif du Sancy.
S'il est "possible d'estimer et de prévoir un risque d'avalanche, c'est-à-dire de déterminer une probabilité de déclenchement et d'identifier les zones les plus susceptibles d'être touchées", Météo-France affirme toutefois sur son site qu'il est "rigoureusement impossible de prévoir la survenue d'une avalanche".
Qualité de la neige, épaisseur des couches, températures, ensoleillement, inclinaison de la pente... Les facteurs dont dépendent les avalanches sont en effet trop nombreux et trop variables, à la fois dans le temps et dans l'espace.
Météo-France précise d'ailleurs que l'indice de risque d'avalanche ne s'applique "que sur des zones géographiques d'au moins 100 km2", une échelle trop grossière pour prévoir un phénomène localement.
L'impact du changement climatique
Alors que la prévision des avalanches est déjà un exercice difficile, le réchauffement climatique ajoute à la complexité. "Aujourd'hui, on peut avoir 15°C une journée et le lendemain -5, -10 avec quatre jours de neige", explique sur BFMTV Éric Mesnier, un ancien secouriste du peloton de gendarmerie de haute montagne.
Ces fortes variations de températures "changent tout le dispositif et toute l'étude du manteau neigeux qu'on connaissait jusqu'à maintenant", estime-t-il, assurant que "la neige n'a jamais été aussi complexe et compliquée, même pour les professionnels de la montagne".
Une étude de l’INRAE, de Météo France, du CNRS a par ailleurs montré que l’activité avalancheuse a tendance à se concentrer "dans des altitudes de plus en plus élevées". Ce mouvement s'accompagne d'une "division par 7 du nombre d’avalanches, un raccourcissement de la saison des avalanches, et une réduction de leur taille par rapport à la fin du Petit âge glaciaire".