« Compléments à la théorie sexuelle et sur l’amour », ou le sexe selon Pascal Quignard

En 1905, à Vienne, paraissent les Trois Essais sur la théorie sexuelle. En faisant remonter la sexualité à la prime enfance, Freud va à l'encontre d'une « innocence » supposée de l'enfant, et fait scandale. Du jour au lendemain, on ne salue plus le Dr Freud dans la rue, on change même de trottoir. En 1915, un médecin-chef d'un escadron de hussards entreprend de traduire les Trois Essais en hongrois, tout en affirmant sa propre théorie sexuelle dans Thalassa. Considéré avec quelque mépris par Freud comme son « paladin et vizir secret », Sandor Ferenczi est mis au ban de la communauté psychanalytique, avant d'être réhabilité.

Ayant navigué sur l'encre tourmentée de ces deux textes qu'il juge « insurpassables », ayant entretenu maintes conversations enfiévrées avec le fantôme de leurs auteurs, Pascal Quignard rassemble dans ces passionnants Compléments ses propres observations sur l'amour et la sexualité, fruits d'une curiosité érudite, de l'angoisse qui en découle, et de cette « joie de l'étude » qu'exsude son texte par chacun de ses mots.

Couvrez ce sein que je ne saurais voir…

Le lecteur rencontre d'abord l'écrivain dans la bibliothèque d'une université américaine, au lendemain du vote d'une loi contre « les images indécentes », après que 140 millions de spectateurs du Super Bowl ont aperçu sur leur écran le sein de Janet Jackson lors de sa performance avec Justin Timberlake. Si un sein ne saurait être vu, qu'en est-il des sexes, qu'en est-il de l'« étreinte [...] Lire la suite