Colombie : l’assassinat d’un directeur de prison révèle la crise du système carcéral

“Si vous fouillez à nouveau notre cour, je vais buter votre famille.” C’est l’une des nombreuses menaces reçues par le directeur de la prison de Bogota La Modelo, Elmer Fernández, avant qu’il ne soit abattu par des tueurs à gage dans la capitale de la Colombie, le jeudi 16 mai 2024.

Un meurtre qui “représente non seulement le pire coup porté au système pénitentiaire colombien lors des deux dernières décennies, mais aussi une démonstration du pouvoir que détiennent de dangereux criminels qui, bien qu’ils soient derrière les barreaux, conservent entière leur capacité à décider de qui va mourir dans les rues” du pays, déplore le journal El Tiempo, se faisant l’écho d’une préoccupation relayée par toute la presse nationale.

C’est “une tragédie annoncée”, a surenchéri El Espectador dans un éditorial intitulé “Le gouvernement a-t-il perdu le contrôle des prisons ?” Fernández venait en effet d’être nommé à ce poste il y a six semaines par le président Gustavo Petro pour tenter de mettre de l’ordre dans les prisons, où opèrent de puissants réseaux mafieux qui contrôlent 47 % des extorsions dans le pays. Des délits qui ne cessent de progresser, selon les chiffres officiels.

Cinq fonctionnaires tués

Et “ce n’est pas un fait isolé”, ajoute le quotidien de gauche. Cinq membres de l’Institut national des pénitenciers et des prisons (Inpec) ont en effet été assassinés ce dernier semestre. De quoi révéler “un problème circulaire : les fonctionnaires de l’Inpec sont terrorisés par la violence liée à l’accomplissement de leur travail, mais ils doivent continuer à la faire, car le système pénitentiaire est embourbé dans une évidente crise d’autorité”.

La crise n’est pourtant pas nouvelle en Colombie. C’est même une affaire cyclique. C’est ce qui explique que l’assassinat du colonel Fernández par des motards, alors qu’il circulait à bord d’une voiture non blindée, “rappelle des époques obscures pour les habitants de Bogota”, signale la BBC.

État d’urgence décrété en février

Dans les années 1990 et 2000, les guérillas et les paramilitaires contrôlaient les centres pénitentiaires de tout le pays, alors que les cartels assassinaient ceux qui s’opposaient à eux en pleine rue. Puis les grands groupes ont éclaté et de petites bandes ont émergé. Lesquelles, “à force de violence, de corruption et de pouvoir d’intimidation, ont pris de l’ampleur”, assure El Tiempo. Des organisations telles que Los Costeños, Los Rastrojos Costeños, Los Pepes, Satanás ou encore La Inmaculada, cette dernière étant soupçonnée d’être impliquée dans le meurtre de Fernández.

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