Climat, finances... La Cour des comptes épingle sévèrement le gouvernement dans son dernier rapport

Le premier président de la juridiction, Pierre Moscovici, tacle la trajectoire de la France sur le déficit public et ses objectifs environnementaux.

ÉCONOMIE - La situation est « préoccupante », voire « sérieuse ». La Cour des comptes étrille le gouvernement pour sa gestion des finances publiques dans le rapport annuel qu’elle publiera ce mardi 12 mars, lui reprochant un scénario initial « improbable » pour 2024 et une trajectoire « peu ambitieuse et fragile » sur le déficit public.

Sur plus de 700 pages, largement consacrées à l’adaptation au changement climatique, le Cour des comptes dresse comme chaque année un état des lieux global des finances publiques. « Pour moi, la situation est sérieuse », « au-delà » de juste « préoccupante », a résumé devant la presse Pierre Moscovici, premier président de la juridiction financière.

La trajectoire présentée par le gouvernement dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2023 à 2027 « conjugue trois faiblesses », estime la Cour : « un scénario macroéconomique trop optimiste dès 2024 », un « retour tardif » du déficit public sous les 3 % du PIB en 2027 et « des efforts de maîtrise des dépenses inédits mais non documentés et renvoyés à la période 2025-2027 ».

Une trajectoire « peu ambitieuse et très fragile »

« La trajectoire fixée par le gouvernement est peu ambitieuse et très fragile », dit-il aussi dans une interview aux Échos publiée lundi soir. Or, tout retard pris dès cette année « risque de fragiliser, voire de rendre caduque la trajectoire » de retour du déficit sous les 3 % en 2027, note le rapport. Le gouvernement, qui a revu ses chiffres mercredi dernier, estime que le déficit public 2023 devrait dépasser « significativement » l’objectif de 4,9 % du PIB.

La Cour des comptes estime également que les finances publiques « resteront en 2024 parmi les plus dégradées de la zone euro ». Avec une dette publique prévue à 109,7 % du PIB en 2024 et 108,1 % en 2027, « on est solidement installé sur le podium des trois pays les plus endettés de la zone euro » avec la Grèce et l’Italie, regrette Pierre Moscovici.

Sa juridiction préconise donc la « sélectivité dans les dépenses et de compenser tout surcroît de dépense ou baisse d’impôt par des économies ou des hausses de recettes ». « Il y a des efforts considérables à faire », affirme Pierre Moscovici, selon qui le prochain projet de loi de finances (PLF) sera « le plus difficile à réaliser depuis la crise financière », nécessitant « courage et volonté politique ».

Des objectifs peu concluants

Le rapport de la Cour des comptes s’intéresse aussi longuement au changement climatique et félicite la « prise de conscience » de l’urgence. Toutefois, les magistrats soulignent « la nécessité que l’action publique en faveur de l’adaptation au changement climatique soit transparente, cohérente et efficiente ».

« Nous constatons un kaléidoscope de réponses, de plus ou moins grande qualité », relève Pierre Moscovici. Mais elles « ne sont pas articulées » car « l’État ne joue pas correctement son rôle de stratège, qui consiste notamment à fixer des objectifs et à définir une trajectoire pour les atteindre », regrettent les auteurs.

« L’évaluation des coûts actuels et futurs de l’adaptation est lacunaire, voire inexistante, faute de données suffisantes mais également parfois d’objectifs clairs », notent encore les magistrats. La problématique est prise en compte depuis longtemps par exemple chez le gestionnaire du réseau de transport d’électricité RTE mais reste « embryonnaire au ministère des Armées », note-t-elle.

Même si la situation des finances publiques est compliquée, Pierre Moscovici défend les dépenses en faveur de l’environnement : « Il serait paradoxal d’aller taper dans le secteur sur lequel on a le plus besoin d’investissement ; ce n’est pas ce que je recommanderais ». Le message va-t-il passer ?

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