Chauffeur de bus tué à Bayonne : les témoins de l'altercation racontent

Le 5 juillet dernier, le chauffeur de bus Philippe Monguillot a été agressé puis tué par un groupe de jeunes à Bayonne suite à une altercation survenue dans le bus.

Le Monde a consulté les déclarations des témoins aux enquêteurs ainsi que le rapport des caméras de vidéosurveillance concernant l’affaire du chauffeur de bus tué à Bayonne en juillet dernier, révélant des éléments de l’enquête encore inconnus jusqu’à aujourd’hui.

C’est une affaire qui a choqué toute la France cet été. Dimanche 5 juillet, Philippe Monguillot, un chauffeur de bus, a été passé à tabac puis laissé dans un état de mort cérébral sur un trottoir à Bayonne par plusieurs jeunes après que ce dernier leur a demandé de porter leur masque et de présenter leur ticket de transport. Quelques jours plus tard, l’homme de 59 ans décède des suites de ses blessures. À ce jour, quatre personnes sont mises en examen dont deux de 22 et 23 ans, déjà connus des services de police, pour “homicide volontaire” et deux autres pour “non-assistance à personne en danger”.

Le quotidien Le Monde a pu consulter les déclarations faites par plusieurs témoins aux enquêteurs ainsi que l’analyse des procès-verbaux d’exploitation des caméras de vidéosurveillance permettant de révéler de précieux détails de cette altercation qui aurait débuté plus tôt qu’on ne le pensait.

“Le chauffeur était un peu nerveux dans sa conduite”

Dimanche 5 juillet, en fin de journée, un groupe de trois personnes prend place à l’arrière du bus conduit par Philippe Monguillot. “Ils étaient sans masque, ils mangeaient des frites et buvaient des cannettes”, raconte une femme assise en face d’eux dans le bus. Un autre témoin placé deux rangs devant eux décrit l’ambiance dans le bus qui est rapidement devenue pesante : “J’ai remarqué que le chauffeur était un peu nerveux dans sa conduite car il avait touché un trottoir et était passé trop vite sur un ralentisseur. Les jeunes ont commencé à plaisanter avec ça et je pense que le chauffeur avait entendu les plaisanteries et l’agitation du groupe”.

Quelques minutes après, peu après 19h, un quatrième individu, connu des services de police, monte dans le bus et salue les trois autres jeunes assis dans le fond du véhicule avant de s’installer avec eux. À 19h06, le chauffeur sort du bus et passe par la porte arrière pour demander aux jeunes de présenter leur titre de transport. Un témoin raconte que les jeunes lui répondent “qu’ils s’en fichent complètement”. Passablement énervé, Philippe Monguillot leur indique également qu’ils doivent porter le masque sinon ils dégagent du bus. “Le ton est monté d’un coup, ils [l’ont] insulté en lui disant qu’ils allaient le démonter dehors, raconte un des témoins. Ce n’était pas les quatre jeunes mais deux en particulier qui étaient virulents et provocateurs”, détaille-t-il.

“Un violent coup de tête” puis une bagarre

La femme assise face aux jeunes détaille le début de l’altercation physique en racontant que c’est le chauffeur qui a asséné le premier coup : “Comme le chauffeur était énervé, il a donné un coup à l’un des jeunes et de là, ça a tout déclenché.” Grâce aux images de la caméra de vidéosurveillance qui filme l’intérieur du véhicule, les enquêteurs s’aperçoivent que le chauffeur a mis un “violent coup de tête” à W.M. Un coup si violent que le jeune “est quasiment tombé contre la paroi”, selon un des témoins.

Une bagarre éclate alors à l’intérieur du bus entre W.M., un autre membre du groupe et le chauffeur, puis se termine hors du bus, hors-champ caméra. Des témoins racontent que M. Monguillot tombe au sol, il est “quasiment K.-O. au sol” et W.M. lui assène “plusieurs violents coups de pied à la tête et au ventre, il n’arrivait pas à s’arrêter […]. Il était devenu complètement fou”, raconte un témoin. Quelques secondes plus tard, le chauffeur revient péniblement vers son bus, dans le champ de la caméra, mais W.M. s’approche de lui et “administre un crochet ample dans le visage de la victime. [...] [Le chauffeur] chute vers l’arrière de tout son poids” et “heurte le sol avec l’arrière de la tête”. À 19h09, soit 3 minutes après le début de l’altercation, le groupe de jeune prend la fuite.

Une précédente altercation dans l’après-midi

Selon Véronique Monguillot, la femme du chauffeur de bus, la justice doit prendre en considération une précédente altercation entre les jeunes et son mari. Vers 14h le même jour, un des jeunes aurait déjà reçu une remarque de Philippe Monguillot pour ne pas avoir payé son ticket. “Le drame est un peu programmé dans son funeste dénouement dès ce moment-là”, commente Me Novion, l’avocat de Mme Monguillot.

Les deux parties attendent désormais les résultats de l’autopsie pour déterminer les causes exactes du décès du chauffeur de bus. De leur côté, les avocats de la défense essaient de requalifier les faits en “coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner”, punis de quinze ans de réclusion criminelle. À ce jour, les deux jeunes ayant porté les coups risquent toujours la prison à perpétuité.

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