"C'est une atteinte à l'honneur": pourquoi Karim Benzema porte plainte contre Gérald Darmanin

"La plainte a été déposée parce que ces propos sont totalement faux, inexacts", débute Me Hugues Vigier au micro de RMC, après le dépôt de cette plainte devant la Cour de Justice de la République, mardi matin. Dans ce document de 92 pages, que RMC a consulté, Karim Benzema dénonce un "opportunisme politique petit, mesquin" de Gérald Darmanin.

"Et puis, quand on prétend ne pas vouloir importer le conflit israélo-palestinien en France, on mesure mal comment on peut ainsi, par des propos faux, prendre le risque d'attiser davantage les braises, explique le buteur de 36 ans. Pour ce qui me concerne, je rappelle de nouveau que j'ai fait choix de pratiquer mon sport en Arabie Saoudite où les frères musulmans sont considérés comme terroriste."

"J’ai quand même peine à croire que le ministre de l’Intérieur ne soit pas informé, il a toute la police pour travailler, complète l’avocat de l’ancien international français. Si ce ministre n’est pas foutu de savoir qu’il n’y a aucun, et qu’il n’y a jamais eu aucun lien entre Karim Benzema et les Frères Musulmans, c’est assez préoccupant".

Et d’ajouter: "Allez, concédons-lui néanmoins la bonne foi, l’ignorance et une forme de bêtise." Selon le conseil du joueur, les réactions du ministre de l’Intérieur dans les médias après cette sortie sont "choquantes moralement". Karim Benzema est "instrumentalisé" parce qu’à travers l’attaquant français "on vise toute cette jeunesse qu’on voue à la détestation", complète l'avocat.

Comment Benzema a-t-il pris cette décision?

Début décembre a été un tournant. "Je me suis longuement posé la question au sujet de cette plainte. La question était de savoir si ça constituait ou non une diffamation, en tout cas dans un premier temps. Mais la formulation de Gérald Darmanin dans son propos du 16 octobre constitue une atteinte à l’honneur et à la considération de Karim Benzema. Je pense que personne n’a envie d’être accusé de choses inexactes", explique Me Hugues Vigier.

Sur le moment, son avocat a longuement réagi "un peu à chaud" sur les plateaux de télévision. Aujourd’hui, l’avocat décortique tous les mots de cette sortie de Gérald Darmanin où "Karim Benzema est décrit comme un ennemi". En octobre, l’avocat concède qu’il "a posé la question" pour savoir si "on se contente uniquement d’un communiqué de presse". Et d’ajouter: "Je n’ai pas une âme de procureur et Karim n’avait pas forcément envie de judiciariser ce dossier, même s’il a trouvé ça scandaleux." Me Hugues Vigier explique aussi que les enfants de Karim Benzema "se font traiter de fils de terroriste, Karim reçoit des menaces, c'est insupportable".

"Et puis début décembre, le ministre confirme ses propos (…) Si je ne dépose pas plainte, il pourra ensuite se gausser devant les médias en disant 'vous voyez, ce que j’ai dit est vrai'. Donc il faut marquer le coup avec cette plainte. Après cette nouvelle sortie, Karim me dit 'J'en ai marre, maintenant tu déposes plainte'. C’est dans ce contexte qu’intervient cette plainte. C’est Gérald Darmanin qui porte l’accusation et c’est à lui de prouver ses propos. Evidemment, il n’a pas, il n’aura pas et il n’a jamais eu un seul élément", tacle son avocat qui dénonce des "fake news" et une "hypocrisie indécente". Dans la plainte, Karim Benzema explique aussi que ses "enfants ont été accusés d'avoir un père terroriste parce qu'un ministre de l'Intérieur ne peut pas dire des choses mensongères ou inexactes !"

Et maintenant ?

"C’est un enfer, je n’ai plus aucun contrôle sur cette plainte", confie le conseil de l’attaquant après le dépôt de la plainte devant la CJR. La Cour de Justice de la République est compétente pour juger les membres du gouvernement pour les actes délictueux ou criminels commis dans l’exercice de leur fonction.

Me Hugues Vigier a déposé cette plainte mardi, et elle doit maintenant passer devant la commission des requêtes. "Si cette commission nous dit de circuler, je ne peux rien faire", concède l’avocat. La commission des requêtes peut classer les plaintes ou les transmettre à une commission d'instruction. A l'issue de l'instruction, cette commission décide d'un non-lieu ou d'un renvoi en procès.

Très loin de toute cette affaire, le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, est actuellement en déplacement à La Réunion, deux jours après le passage du dévastateur cyclone Belal. Depuis le début, le locataire de la Place Beauvau n'est jamais revenu sur ces propos tenus sur un plateau de télévision, le 16 octobre 2023.

Article original publié sur RMC Sport