Ces médicaments innovants ne sont pas accessibles en France
Malgré des résultats parfois spectaculaires, certains médicaments comme des anticancéreux ne sont pas disponibles pour les patients français hors essai clinique.
Un médicament contre un cancer du poumon a fait sensation lors de sa présentation au congrès mondial de cancérologie à Chicago (Etats-Unis) ce week-end. Et pour cause, l'osimertinib, un comprimé commercialisé sous le nom de Tagrisso et développé par le groupe pharmaceutique AstraZeneca, a permis de réduire de moitié les récidives de cancers chez des patients souffrant d’une forme de cancer du poumon.
Plus précisément, cette forme de cancer concerne une mutation sur le récepteur EGF (Epithelial Growth Factor) et touche entre 10% et 25% des patients atteints d'un cancer du poumon. Les résultats de cet essai clinique de 5 ans étaient attendus, même si l'osimertinib est déjà autorisé dans des dizaines de pays. Une majorité de malades bénéficient déjà de cette thérapie ciblée en France, note franceinfo. Ce n’est pas le cas de tous les médicaments, malgré leurs résultats parfois très prometteurs.
En France, c’est l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) qui autorise ou non la mise sur le marché d’un médicament. La Haute Autorité de santé (HAS) décide ensuite si son intérêt clinique mérite une prise en charge par l’Assurance maladie, notamment par rapport aux traitements déjà disponibles. Si le médicament obtient une note comprise entre 1 et 4, il a une chance d’être remboursé. Avec la note de 5 (ASMR 5), la plus mauvaise, il ne le sera pas ou à la charge des hôpitaux. “Cela revient à condamner le médicament, les établissements de santé ne pouvant assumer une telle dépense”, relève Le Monde qui cite l’exemple de la thérapie cellulaire Carvykti (Janssen), destinée au traitement du myélome multiple, un cancer rare de la moelle osseuse.
Plusieurs médicaments anticancéreux
Depuis le mois de janvier, des avis défavorables répétés de la HAS ont agacé de nombreux oncologistes. “Ne pas les inscrire au remboursement, c’est empêcher l’ensemble des malades d’y accéder. La perte de chance est immense”, regrette par exemple Pascal Pujol, président de la société française de médecine prédictive, dans les colonnes du Parisien. “Pour un médecin, il n’y a rien de pire que de savoir que le bon médicament existe mais qu’il ne pourra pas le donner”, renchérit la Pr Frédérique Penault-Llorca, directrice du centre anticancer Jean-Perrin à Clermont-Ferrand également interrogée. Les médecins sont d’autant plus en colère que ces médicaments ont été validés au niveau européen.
Ont ainsi été retoqués le Keytruda (pembrolizumab) dans le traitement d’un cancer rare de l’endomètre avancé ou récidivant ou de cancer gastrique, de l'intestin grêle ou des voies biliaires. De même pour le Retsevmo (selpercatinib), candidat au remboursement pour un traitement d’un cancer du poumon avancé présentant une fusion positive de RET (REarranged during Transfection). La thérapie montre pourtant des taux de réponse excellents, selon une étude. Le Brukinsa (zanubrutinib) aussi a reçu un avis défavorable au remboursement pour le traitement des patients atteints de macroglobulinémie de Waldenström, un cancer du sang rare. Cette thérapie autorisée en novembre 2021 par l’Union européenne est remboursée dans plusieurs autres pays.
La HAS justifie ses choix par des données “insuffisantes” pour démontrer un bénéfice ou une innocuité pour le patient dans les thérapies en question, tout en se disant prête à revoir ses décisions en cas de nouvelles données. Pas suffisant pour calmer les médecins et patients. “Il n’y a pas de raison que pour le même cancer, certains aient les bonnes armes, et d’autres non”, s'insurge ainsi auprès du Parisien Suzanne, 43 ans, diagnostiquée d’un cancer du poumon qui a bénéficié du Rozlytrek (entrectinib) dans le cadre d’un essai clinique.
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