"CE2" de Jacques Doillon: des députés dénoncent des maltraitances lors du casting de mineurs

Après avoir visionné des vidéos du casting des enfants du film "CE2" du cinéaste Jacques Doillon, deux députées Modem et une élue Renaissance soupçonnent des manquements et ont donc fait un signalement à la procureure de la République.

"Quand un enfant dit non, c'est non", insiste Erwan Balanant auprès de BFMTV.com ce mercredi 27 mars. Revenant sur des vidéos du casting du film CE2 de Jacques Doillon qu'il a visionnées, le député MoDem décrit une scène qui "l'a profondément choqué".

"Une petite fille, seule, d'une petite dizaine d'années, sans adulte référent, face à deux adultes, choisie parce qu'elle-même est victime de harcèlement - pire, de harcèlement sexuel - est amenée à plusieurs reprises à parler de son harcèlement, malgré ses refus répétés", nous raconte le député MoDem.

Confirmant une information du Monde de ce mercredi, il nous explique avoir saisi le Procureur de la République vendredi 22 mars, en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale, après avoir vu plusieurs vidéos.

Deux autres députées ont également fait un signalement: Perrine Goulet du MoDem et Véronique Riotton chez Renaissance. La première affirme à l'AFP que les vidéos visionnées "ne respectent pas le droit des enfants".

"Quelque chose de maltraitant"

"La répétition des questions posées à la petite fille, nous a posé un problème", développe le député Erwan Balanant. "On a eu un doute sur le fait que ça puisse être pénalement répréhensible", ajoute-t-il.

Qui dit doute, dit saisie pour l'élu membre de la délégation aux droits des enfants et auteur d'un rapport en 2021 sur le harcèlement scolaire. À la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, de décider si les faits de la vidéo sont caractérisés ou non.

Pour le député MoDem, il y a en tout cas quelque chose de maltraitant dans cette séquence. "Quand un enfant dit non, c'est non. Sur ce sujet du harcèlement subi par la petite fille et dont elle ne voulait pas parler, le sujet aurait dû s'arrêter là" de la part de la directrice de casting, estime-t-il.

"Aujourd'hui, on peut occuper ce poste (de directeur de casting de mineurs, NDLR) sans aucune qualification pour travailler avec des enfants", déplore le député MoDem.

Fin février, devant des sénateurs, l'actrice Judith Godrèche avait assuré que Jacques Doillon avait, pour les besoins de ce film, donné pour instruction de rechercher une petite fille victime de harcèlement "pour lui faire revivre à l'écran ce qu'elle a vécu dans la vie".

Une commission d'enquête demandée sur le sujet

Avec la parlementaire EELV Francesca Pasquini, membre elle aussi de la Délégation aux droits des enfants, mais également de la commission des affaires culturelles et de l'Éducation, ils ont demandé l'ouverture d'une commission d'enquête sur "la situation des mineurs dans l’industrie du cinéma, des arts du spectacle et de la mode".

Son but: cibler les ajustements à réaliser sur la prise en charge des enfants dans ces différents milieux. Mieux encadrer et réguler les pratiques. Et à terme, permettre une protection renforcée des droits des mineurs.

"Une maladresse" pour la société de production

Dans un communiqué à l'AFP, la société de production se dit, elle, "sereine" et affirme tenir à la disposition de la justice les "preuves" démontrant que "l'intérêt supérieur des enfants avait été préservé" durant les castings.

Sur la séquence avec la jeune actrice, en particulier, elle évoque "une maladresse commise par une seule personne dans une seule vidéo d'essai sur plus d'une centaine (...) réalisées".

Au-delà de cette saisie et de la proposition de résolution visant la création d'une commission d'enquête, des déclarations de Judith Godrèche début février accusant Jacques Doillon d'agressions sexuelles sur mineurs avaient fini par stopper la sortie de "CE2".

Actuellement, le film, dont la sortie était prévue ce mercredi 27 mars, est toujours reporté sine die, selon les propos de son producteur fin février.

Article original publié sur BFMTV.com