La canicule joue sur votre santé mentale, voici pourquoi

PSYCHOLOGIE - La chaleur accablante a tendance à vous rendre irascible ? Ce n’est pas surprenant. Outre les effets physiologiques de la canicule qui conduisent les autorités de santé à multiplier les messages de préventions, les températures élevées peuvent aussi s’avérer particulièrement néfastes pour notre santé mentale.

Météo France a placé 19 départements en vigilance rouge ce mercredi 23 août. Comme en début de semaine, les températures dépasseront à nouveau les 40 °C dans de nombreuses communes.

En 2013, une étude menée par des chercheurs des universités de Berkeley et de Princeton révélait déjà qu’une simple hausse de 1 °C par rapport à la normale saisonnière suffisait pour que le nombre de violences – telles que les violences conjugales, meurtres, viols – augmente de 4 %.

Causes physiologiques

Comment expliquer cet état d’agressivité et d’impulsivité en période de fortes chaleurs ? « Physiologiquement, quand il fait chaud, notre rythme cardiaque s’accélère, le pouls est plus fort, notre pression artérielle augmente, et notre niveau de cortisol [l’hormone du stress] augmente donc on aura tendance à se sentir plus irritable, mais les réactions varient d’un individu à l’autre et il manque encore des études poussées sur la question », rappelle Élodie Gratreau, doctorante en histoire et philosophie des techniques de soin en psychiatrie au sein du laboratoire Costech, contactée pour Le HuffPost.

Le manque d’oxygène accentue également ce sentiment d’irritabilité. En effet, lorsque certaines régions du cerveau commencent à manquer d’oxygène, notre corps envoie plus de sang que d’ordinaire dans le reste de notre corps pour le refroidir. Dans ce cas-là, nous finissons par agir de manière plus impulsive, sous le coup de l’émotion. D’ailleurs, l’un des premiers signes du coup de chaleur, est « l’agressivité inhabituelle », rappelait il y a quelques années l’INPES, ancêtre de Santé Publique France.

La chaleur exacerbe la fragilité mentale

Après deux ans de crise, la hausse des températures vient aussi exacerber la fragilité mentale des Français. « Dans un temps de confinement, d’incertitude civilisationnelle où l’on ne sait pas à quelle sauce on va être mangé d’un point de vue politique et sanitaire, évidemment que la canicule se vit autrement. Surtout lorsqu’on reste chez soi en télétravail, au bord du burn out », assure Joseph Agostini, psychologue clinicien contacté par Le HuffPost.

Par ailleurs, ces fortes chaleurs ont davantage tendance à toucher les personnes fragilisées. « L’impact de la canicule touche particulièrement les personnes isolées, vieillissantes, du troisième ou quatrième âge qui se retrouvent dans une solitude et dans un mal-être physique. Il y a chez eux un sentiment de dépression et la peur de mourir qui se manifeste », poursuit Joseph Agostini.

Outre les personnes âgées, les personnes sous traitements psychologiques peuvent également présenter plus de difficultés à supporter les fortes chaleurs. « Il y a de l’anxiété parce que le corps sent qu’il est en danger vital », témoigne Élodie Gratreau, atteinte de trouble de la personnalité borderline. « Personnellement, lorsqu’il fait chaud, je peux souffrir de tachycardie après avoir pris des antidépresseurs et des neuroleptiques. »

Mais comme le rappelle Joseph Agostini, la chaleur a pour autre conséquence de creuser encore plus les écarts de mode de vie. « Entre les personnes qui disposent de la climatisation et les familles qui vivent à plusieurs dans les logements sociaux, les conséquences ne seront pas les mêmes. »

L’éco-anxiété

Il existe également le phénomène récent et encore mal connu de l’éco-anxiété. Il s’agit de personnes – la plupart des jeunes entre 18 et 24 ans – qui développent « une peur chronique d’un environnement condamné », selon la définition de l’Association américaine de psychologie.

En d’autres termes, il s’agit d’une impression d’assister aux conséquences du réchauffement climatique sans pouvoir ne rien y faire. Chez les personnes qui en souffrent, cela entraîne souvent « une souffrance individuelle avec des troubles associés comme des phobies et des angoisses extrêmes », a expliqué à la RTBF Véronique Lapaige, la psychiatre qui a conceptualisé cette notion d’éco-anxiété.

« La canicule vient clairement brandir le spectre des catastrophes climatiques », remarque Joseph Agostini. « Entre les inondations, les catastrophes naturelles à répétition et les pandémies mondiales, la vision de la canicule de 2003 a changé, il n’y a plus de rareté à l’événement, aujourd’hui c’est récurrent », souligne le psychologue.

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