Une caméra a filmé l’intérieur d’un réacteur à fusion nucléaire et c’est impressionnant

RÉACTEUR NUCLÉAIRE - Soudain, des fils lumineux serpentent autour d’un très gros donut de métal : voici l’intérieur d’un réacteur à fusion en fonctionnement. Le 3 février dernier, le réacteur à fusion JET (Joint European Torus) réalisait un test, dans le but de mieux comprendre et réussir à maîtriser la fusion thermonucléaire. Et les images, à retrouver dans la vidéo en tête de cet article, sont à couper le souffle.

Prises par l’autorité britannique de l’énergie atomique, ces images ont été capturées depuis l’extérieur de l’appareil, filmées au travers d’un hublot en cristal transparent (généralement du saphir). Dans la vidéo, on peut observer des particules à très, très haute vitesse (un tiers de la vitesse de la lumière pour les électrons et près de 1000 km/s pour les noyaux, plus lourds).

Impossible de filmer depuis l’intérieur du réacteur à cause de la chaleur. Lorsqu’il est en action, la température monte en effet à 150 millions de degrés. En comparaison, l’endroit le plus chaud du soleil (son noyau) est dix fois moins chaud avec « seulement » 15 millions de degrés. Un indice témoignant de la complexité à maîtriser cette technologie.

Une technologie en développement

Pour ceux qui ne sont pas physiciens nucléaires, cette technologie consiste à prendre deux noyaux atomiques légers (ndlr : qui sont le centre d’un atome) et les unir pour en former un seul plus lourd. C’est l’inverse de la fission nucléaire, qui divise en deux (ou plus) un noyau atomique.

Aujourd’hui c’est la fission nucléaire qui est utilisée dans nos centrales, mais elle produit beaucoup de déchets radioactifs, demande beaucoup de combustibles et il y a un risque d’emballement (et virer à la catastrophe). À l’inverse, la fusion nucléaire est présentée comme plus sûre, demande peu de combustibles et n’émet pas beaucoup de déchets.

Le tout en produisant elle aussi beaucoup, beaucoup de chaleur et donc d’énergie : « La fusion peut générer quatre fois plus d’énergie par kilo de combustible que la fission, et près de 4 millions de fois plus d’énergie que la combustion de pétrole ou de charbon », promet l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA) à la première page de son bulletin publié en mai 2021.

Un projet plus coûteux que la conquête spatiale ?

Il s’agit donc d’une source d’énergie très convoitée, et nombreux sont les chercheurs et entreprises qui se sont lancés à l’assaut de cette technologie. À l’heure actuelle la fusion nucléaire n’a pu être réalisée que pendant quelques secondes, par manque d’infrastructure. Réaliser la fusion, c’est réussir à contenir la gigantesque chaleur émise. Or aucun matériau ne résiste à plus de 100 millions de degrés. Les chercheurs ont alors mis au point, tout autour du globe, des « tokamaks ».

C’est un ensemble d’aimants faisant le tour du four où les noyaux atomiques sont fusionnés, créant une sorte de cage magnétique qui contient la chaleur sans contact matériel. Le tokamak n’est pas encore en phase expérimental et pour réaliser une fusion nucléaire qui dure, il doit être grand et ça coûte cher, très cher.

C’est pourquoi trente-cinq pays (parmi lesquels l’Union européenne, les États-Unis, la Chine, la Russie, la Suisse, l’Angleterre, le Japon, l’Inde et la Corée du Sud) se sont alliés pour contribuer au financement d’ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) un réacteur à fusion nucléaire gigantesque possédant un tokamak plus grand que l’arc de triomphe (73 mètres). Après 15 années d’études, la construction d’ITER a débuté en 2020 dans les Bouches-du-Rhône. Fin prévue des travaux : 2030.

Au total, le projet est estimé par le Département de l’énergie américain à environ 54 milliards d’euros. Hormis la Station spatiale internationale, il s’agit de l’expérience scientifique la plus chère de l’histoire humaine. De quoi poser la question de l’intérêt d’une telle entreprise pour certains chercheurs, qui regrettent le manque de financement dans d’autres domaines de recherche (comme l’adaptation au réchauffement climatique). D’autres remettent également en question la viabilité de la fusion nucléaire, qui ne serait pas une solution miracle à la crise énergétique.

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