CAC 40 : les grands patrons creusent (encore) leur écart de rémunération avec leurs salariés, dénonce Oxfam

Photo d’illustration de bureaux dans le quartier d’affaires de La Défense à Paris, France, le mardi 23 avril 2024.
Bloomberg / Bloomberg via Getty Images Photo d’illustration de bureaux dans le quartier d’affaires de La Défense à Paris, France, le mardi 23 avril 2024.

ÉCONOMIE - Un constat frappant, à la veille de la fête du travail. Une étude de l’ONG internationale Oxfam révèle ce mardi 30 avril les écarts de rémunérations « indécents » entre les patrons de CAC 40 et leurs salariés. Si cette différence a déjà été soulignée ces dernières années, le fossé s’est encore creusé.

Ainsi, en 2022, les patrons du CAC 40 ont gagné en moyenne 130 fois plus que le salaire moyen dans leurs entreprises, révèle une étude d’Oxfam publiée mardi. Cela correspond à une augmentation d’environ 17 % depuis 2019. Sachant qu’en 1979, ces patrons « ne gagnaient en moyenne +que+ 40 fois plus que le Smic », précise l’étude.

« Les richesses produites continuent de croître » dans les entreprises du CAC 40, « pourtant cette redistribution des richesses est inéquitable », dénonce l’ONG.

Le PDG de Carrefour gagne 426 fois plus que ses salariés

Ces écarts s’expliquent selon l’ONG par « des rémunérations de dirigeants démesurées et déconnectées » : en 2022, ces patrons ont gagné en moyenne 6,66 millions d’euros, soit 27 % de plus que trois ans auparavant. Les salariés ont de leur côté vu leurs salaires n’augmenter que de 9 %.

Certaines entreprises « creusent davantage les inégalités » que d’autres. Teleperformance affiche « de loin » le plus grand écart de rémunération, affirme ainsi Oxfam, son PDG Daniel Julien ayant gagné 1 453 fois plus que le salaire moyen de son entreprise en 2022, avec ses 19,7 millions d’euros. Teleperformance estime que cet écart souligné par Oxfam est « purement théorique et non réel ».

Juste après arrive Carrefour, dont le PDG a gagné 426 fois plus, un écart qui s’explique « par un très faible salaire moyen », précise Oxfam. « Alexandre Bompard gagne en seulement 9 heures l’équivalent du salaire moyen annuel des salariés de Carrefour, alors même qu’on est en pleine crise agricole et qu’on subit encore les conséquences de l’inflation », résume Léa Guérin, chargée de plaidoyer sur les questions de régulation des multinationales.

Carrefour affirme à l’inverse que les calculs d’Oxfam ne correspondent « pas à une quelconque réalité », puisqu’ils rapportent la rémunération d’Alexandre Bompard à celle des 334 000 salariés à travers le monde - dont une majorité au Brésil -, malgré des « écarts de pouvoir d’achat » entre pays. Le salaire moyen dans la grande distribution est par ailleurs « significativement inférieur à d’autres secteurs », a indiqué le groupe, car la main-d’œuvre est « souvent peu qualifiée ».

Relation « toxique » entre actionnaires et dirigeants

Quant au patron de Stellantis, Carlos Tavares, ce dernier ne figurait en 2022 « que » sur la troisième marche du podium des mauvais élèves, ses 22 millions d’euros représentant 341 fois plus que le salaire moyen chez le constructeur automobile. Un montant déjà jugé « choquant et excessif » par le président français Emmanuel Macron.

En 2023, la hausse spectaculaire de sa rémunération - qui pourrait cette fois-ci atteindre 36,5 millions d’euros - a encore créé la controverse, bien qu’elle ait été validée par les actionnaires à 70 %. Pour Oxfam, c’est justement la relation « toxique » entre actionnaires et dirigeants qui permet le versement de ces rémunérations « stratosphériques ».

L’association milite pour que la rémunération des dirigeants soit conditionnée à une stratégie climat articulée, à un salaire « décent » dans l’ensemble de l’entreprise et qu’elle soit moins liée aux critères financiers. Elle réclame surtout l’instauration d’un salaire maximum, qui représenterait 20 fois le salaire médian de l’entreprise. C’est à peu près l’ordre de grandeur qu’on trouvait en 2022 avec le salaire moyen chez Crédit Agricole (23) ou Orange (29).

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