C’est en voulant faire don de mes ovocytes que j’ai découvert mon infertilité

J'ai appris coup sur coup que je ne pourrai ni donner mes ovocytes, ni avoir d'autres enfants, mais voici pourquoi je le vis bien.
Pablo_K via Getty Images J'ai appris coup sur coup que je ne pourrai ni donner mes ovocytes, ni avoir d'autres enfants, mais voici pourquoi je le vis bien.

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Mes symptômes font désormais de mon quotidien. C’est un long travail d’acceptation qui commence.

SANTÉ - J’ai 33 ans, je vis en couple et je n’ai pas d’enfants. Mon histoire n’est pas classique car j’ai appris mon infertilité non pas parce que j’ai consulté après des essais bébés infructueux mais parce que j’ai voulu faire don de mes ovocytes.

De candidate donneuse...

L’histoire commence il y a un an quand, après plusieurs symptômes (spotting, douleurs au sein), j’arrête de prendre ma pilule que je prends en continu depuis 13 ans. La sage-femme que je consulte à cette époque est la première à me parler d’un dérèglement hormonal en me palpant les seins. La faute à la pilule selon elle. Nous décidons avec mon compagnon de recourir au préservatif pour se protéger car il était clair et net que nous ne voulions pas d’enfants avant 2 ou 3 ans, le temps pour nous de vivre de nos boîtes (nous sommes tous les 2 indépendants).

Les mois suivant l’arrêt de la pilule j’ai commencé à avoir des symptômes très forts : SPM fort, migraine avec aura, douleurs inflammatoires aux cervicales, douleurs articulaires, douleurs aux ovaires, ballonnements, troubles de l’humeur, règles fortes mais courtes, cycles courts. J‘étais un peu livrée à moi-même ne sachant pas si cela était normal. Comme beaucoup de femmes de ma génération, je connais mal mon cycle.

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En parallèle, de tout cela, je décide de faire don de mes ovocytes pour parrainer une amie qui est ménopausée à cause des traitements qu’elle a reçus pour combattre une leucémie. Le seul moyen pour elle de porter la vie est donc de faire appel aux ovocytes d’une autre femme. Malheureusement, en France, les donneuses sont peu nombreuses (900 en 2021) alors que les couples en attente de dons sont 4 000. Après m’être renseignée, je décide en novembre 2021 de prendre rendez-vous dans un centre PMA pour me porter candidate. Pour être acceptée, il a fallu que je fasse une échographie de comptage de follicules et une prise de sang avec un bilan hormonal des marqueurs de fertilité.

... À infertile receveuse

Le 11 mars 2022, me voilà donc toute fière de moi en arrivant au CECOS pour passer les examens. Dans la salle d’attente, je croise les regards de couples en attente, je devine leur fatigue, leur tristesse. C’est à ce moment-là que je prends la mesure de mon geste. Je les observe sans me douter que je serai à leur place dans quelques semaines.

4 jours plus tard, la gynécologue m’appelle. Je comprends tout de suite que les nouvelles ne sont pas bonnes. Tous les mots qu’elle prononce se bousculent dans ma tête, trop d’informations à assimiler, à comprendre, à retenir. Elle me dit que mes analyses indiquent une réserve ovarienne faible, que mes ovaires sont fatigués et ont l’âge d’une femme de 46 ans, qu’on doit me faire une analyse génétique pour voir s’il n’y a pas une maladie génétique, que je devais aller consulter rapidement un spécialiste pour faire des examens complémentaires et qu’en l’état des choses on ne pouvait pas m’accepter en tant que donneuse car c’est moi qui allais avoir besoin d’aide désormais.

J’ai eu l’impression qu’un 33 tonnes m’était passé dessus, il m’a fallu gérer la tristesse de ne pas pouvoir donner mes ovocytes et aider mon amie. Immédiatement, je me suis sentie privée du choix d’attendre quelques années avant de faire un enfant.

Les examens supplémentaires ont été encore moins bons. Mes analyses indiquaient un vrai bordel hormonal. L’échographie de comptage montrait que mon stock était quasiment vide. Une Insuffisance Ovarienne Précoce (IOP) m’a été diagnostiquée. Nouvelle claque. En 10 minutes le spécialiste me dit que la préservation ovocytaire n’est plus possible car il n’y a presque plus rien à stimuler et qu’en plus d’être infertile, je suis à 2 ou 3 ans de ma ménopause et que malheureusement les techniques d’insémination artificielle ou de FIV ne sont pas une option pour moi. Je dois m’inscrire sur les listes d’attente pour le don d’ovocytes. Le comble ! Moi qui voulais être donneuse. Ce changement de statut est brutal. On ne pensait pas qu’on passerait de la plus petite marche de la PMA avec la possibilité d’une préservation ovocytaire à la plus haute marche avec l’attente d’un don.

Vivre les symptômes de la ménopause à 33 ans et faire un travail d’acceptation

Il m’a fallu du temps pour comprendre que les symptômes que j’avais eus à l’arrêt de la pilule étaient en fait les effets de la préménopause. À qui parler de mes bouffées de chaleur, de mes douleurs articulaires, de ma cataracte précoce (oui oui autant aller jusqu’au bout dans la vieillesse !), de mes sautes d’humeur ? J’ai 2 choix : soit j’en parle à mes copines qui accouchent les unes après les autres mais qui sont très loin de tout cela, soit je prends le thé avec ma mère et ses copines. C’est cela, je crois qui est le plus dur : se sentir déclassée en tant que femme. Mes symptômes font désormais de mon quotidien. C’est un long travail d’acceptation qui commence.

J’ai eu l’impression qu’un 33 tonnes m’était passé dessus, il m’a fallu gérer la tristesse de ne pas pouvoir donner mes ovocytes.

Il faut également faire face à l’incompréhension des proches. À leurs maladresses parfois. À partir du moment où on annonce une infertilité, automatiquement, l’entourage pense que la PMA fait des miracles dès le premier coup. Difficile pour nous de leur faire comprendre que j’ai une infertilité compliquée qui, en plus de nous exclure du monde de ceux qui conçoivent un enfant sous leur couette, elle nous prive de la PMA. J’ai réalisé à quel point c’était encore tabou et mal connu. Tout cela, je pense, à cause d’un manque d’informations et de visibilité dans l’espace public.

J’ai malgré tout appris une belle leçon de vie : rien ne se passe jamais comme prévu ! C‘est grâce au don que j’ai été diagnostiquée. Je me sens chanceuse de l’avoir appris maintenant. Je suis fière d’avoir voulu être donneuse et espère que mon témoignage suscitera l’intérêt pour le don d’ovocytes.

À voir également sur Le HuffPost : Elle a donné ses ovocytes pour les personnes noires en attente d’un don

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